Le propre du catholique est, sans lapalissade, d’être catholique. En tout lieu, en toute circonstance. Et, contrairement aux négligences ou aux errements contemporains, être catholique n’est pas une sinécure, ce n’est pas de tout repos. Loin s’en faut. Il s’agit d’une exigence de l’être, dans son intelligence et dans sa volonté, dont l’origine tient de Dieu lui-même, dont la fin se résume en Dieu lui-même, qui ordonne l’ensemble de ses actes à la volonté divine révélée à l’homme il y a plus de deux milles ans par Notre Seigneur Jésus-Christ et continuée, depuis lors, en son Eglise. L’affaire n’est pas mince et elle n’est pas simple ; elle ne se rejette pas d’un revers de la main. Le catholique est le fils corporel et spirituel d’un Dieu Trinitaire qui, après la chute originelle, est venu lui rappeler sa filiation, la racheter dans son essence et son existence, afin de la réordonner à ce tout d’ordre de bonté, de justice, de vérité et de beauté qu’Il est, Lui, en son essence première.

Le catholique se place donc sous l’autorité divine comme l’élève se place sous l’autorité du maître ou l’instrumentiste sous l’autorité du chef d’orchestre. L’on perçoit d’ores et déjà le lien de subordination de l’inférieur humain au supérieur divin, ou lien hiérarchique ; l’on relève aussi le lien de considération du sujet humain à l’objet divin, ou lien causal ou de causalité ; mais l’on réalise encore le lien d’existence de l’humain au regard du divin, un lien essentiel ou d’essentialité. Le catholique n’est rien sans Dieu qui lui préexiste mais il est aussi « quelqu’un » parce qu’ « un autre » que lui-même, placé sous le même regard du divin, lui donne ses raisons d’exister. Cet autre devient rapidement plusieurs autres, et ce « plusieurs autres » devient rapidement une société, une société en corps constitué. Ainsi, en homme qu’il est, le catholique vit en société, au sein d’une société, concourt au bien de cette société, participe de l’essor de cette société, contribue à l’épanouissement de cette société en vue du perfectionnement de celle-ci comme de son propre perfectionnement. Il s’agit là du fameux « bien commun ». Du bien commun social à promouvoir. Du bien commun rigoureusement entendu et qui se distingue de « l’intérêt général » en ce que ce dernier est un ordre public établi et donc à préserver, tandis que le bien commun est la finalité de perfectionnement du corps social poursuivie sans cesse par les membres qui le composent. En somme, le catholique est cet homme qui fait du bien commun de la société la finalité même de son existence politique et le perfectionnement adéquat de celle-ci. En être raisonnable qu’il est, le catholique est donc un animal politique placé sous le regard du divin Maître, au service d’une société politique placée, elle aussi, sous le regard du divin Maître.

Tel est le principe politique catholique que l’Eglise, en digne épouse du Christ, n’a pas manqué de rappeler au cours de son histoire.

A ce principe, différents systèmes politiques sont venus correspondre ou, au contraire, se heurter.

Très brièvement et sans remonter à l’époque vétérotestamentaire qui, par définition, n’est pas encore catholique, l’antiquité néotestamentaire latine, fidèle en cela à la tradition précédente, a érigé en système politique un type de régime institutionnel essentiellement hiérarchique : l’empire. Ce régime était en phase, en soi, avec le principe politique catholique et, à partir de la conversion de Constantin en 312-313, en fut le serviteur plus ou moins affirmé selon les empereurs.

Au déclin de l’empire, et notamment à sa chute en occident, en 476, le désordre barbare, vainqueur du premier, s’est étonnement transformé en structure monarchique stable, vingt ans plus tard, en Gaule. Clovis, par son baptême en 496, fut le protagoniste d’une société monarchique en phase avec le principe du politique catholique. Par cet acte fondateur, il devint le détenteur et le gardien des clefs d’un royaume placé désormais sous le regard du divin Maître. Le principe du politique catholique s’affirma alors, conduisant à un deuxième acte politique et religieux éminemment fondateur, le sacre de Pépin le Bref, en 752. Ainsi se perpétua, treize siècles durant, le baptême puis l’onction royale. Ainsi se transmit la garde des clefs du royaume et l’empreinte du sceau royal. Le royaume devenait peu à peu comme un « depositum fidei », sa géographie en portait l’éclat et les hommes qui le peuplaient devenaient ces sujets de droits que le prince, lieutenant ou tenant-lieu de Dieu en son territoire, leur conférait par leur appartenance ou leur adhésion au royaume. Ce n’est pas une loi parlementaire qui conférait alors ses droits et devoirs au peuple mais le prince. Le prince seul, gardien et dépositaire du royaume. Ainsi se posait le principe hiérarchique et monarchique d’une société ordonné à son gardien que la mort même de ce dernier ne pouvait interrompre. La remise des clefs au chef suprême, Dieu, faisait revenir celles-ci à son successeur désigné selon l’adage « le roi ne meurt pas en France » ou la célèbre exclamation populaire : « le roi est mort, vive le roi » ! La continuité du « depositum » était assurée.

La Révolution française renversa cet ordre du haut vers le bas pour lui substituer un désordre de bas en haut. Plus de baptême et plus de sacre. Plus de gardien et plus de transmission. Plus de « depositum ». Le pouvoir s’horizontalisa au gré de la supposée « volonté générale » et le contrat social s’installa qui conféra désormais les droits. La loi ne fut plus incarnée par le prince mais devint elle-même principe. Les clefs du royaume furent jetées au feu, fondues, et remplacées par la forge de l’équerre et du compas arborant leur nouvelle devise : « liberté, égalité, fraternité ». L’idée républicaine remplaça la personne du prince, l’idéalisme se substitua au réalisme. La démocratie moderne se posa désormais en valeur institutionnelle incontournable qui, par déréliction divine et exaltation humaine, s’opposa au principe du politique catholique. Cette démocratie devint soit libérale soit totalitaire ; elle est aujourd’hui la citadelle institutionnelle planétaire, celle à laquelle le catholique ne peut plus se soustraire. D’ailleurs, l’Eglise elle-même se rallia à ce régime pour devenir à son tour et depuis 55 ans une société pétrie de ses principes.

C’est ici que la question l’environnement de la démocratie politique se pose au catholique en toute rigueur de termes. C’est ici qu’il nous faut répondre à la question qui préside à cet article : le catholique doit-il être démocrate ?

Eu égard à la prémisse selon laquelle le catholique doit être un catholique avant tout ; eu égard encore à tout ce qui précède, la réponse à la question s’impose : un catholique ne doit pas être démocrate. Non, il ne le doit pas. Que la démocratie s’impose à lui désormais avec la complicité néfaste des autorités de l’Eglise est un fait qu’il doit supporter, une donnée structurelle qui ne doit pas le détourner de la source originelle du pouvoir venu d’en haut. Il peut donc se servir de la démocratie mais non point la servir. Il peut user du système démocratique, s’y tenir en catholique, sans toutefois le servir car le catholique ne peut servir deux maîtres que tout oppose.

Soulignons-le d’une phrase, la chaine de production de la démocratie moderne est intrinsèquement mauvaise : La Révolution française produisit le catholicisme libéral, qui produisit le ralliement à la République, qui produisit le modernisme, qui produisit la séparation de l’Eglise et de l’Etat, qui produisit le Sillon puis l’Action catholique, qui produisit le prêtre ouvrier, qui produisit le personnalisme dans l’Eglise, qui produisit la nouvelle théologie, qui produisit 89 dans l’Eglise, qui produisit l’œcuménisme abâtardi, qui produisit la trahison liturgique, qui produisit le tarissement ecclésiastique, qui produisit l’indifférentisme religieux, qui produisit le syncrétisme religieux, qui produisit l’errance théologique, qui produisit la renonciation volontaire de Benoît XVI, qui produisit François ; un François qui piétine doctrine et sacrements, qui produit la synodalité, qui édifie la Pachamama, qui sonne le cornu[1] de l’apostasie générale.

La démocratie moderne est ce fléau doctrinal ou idéologique, cette pyramide inversée ou subvertie qui, depuis deux siècles, corrompt la pensée politique catholique. Le catholique ne doit pas s’en réclamer.

Gilles Colroy.

[1] Le cornu est un instrument à vent d’origine Etrusque utilisé par les armées romaines, une sorte de cor muni d’une barre transversale.

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