Les négociations entre la Russie et l'Ukraine

La guerre lasse : « l’occident a besoin d’une nouvelle stratégie en Ukraine » écrit le fameux journal Foreign Affairs fondé en 1922, le principal média de discussion sérieuse sur la politique étrangère américaine et les affaires mondiales. Qui en appelle à une fin diplomatique du conflit.

« Lorsque l’offensive annoncée par l’Ukraine sera terminée, Kiev pourrait reconsidérer l’idée d’un accord négocié, après avoir déployé tous ses efforts et pris conscience » des limites de l’aide extérieure. Ainsi Richard Haass et Charles Kupchan qui, dans Foreign Affairs, esquissent une sortie de guerre articulée, avec une négociation qui devrait commencer immédiatement après l’offensive de Kiev, donc à la fin de l’année. Une offensive de printemps qui ne démarre jamais, point de détail occulté soigneusement par le quotidien américain, certainement pour ne pas décourager le moral des Ukrainiens et les tenants occidentaux de la victoire ukrainienne, qui continuent à envoyer argent et armes. Mais on peut penser que cette contre-offensive pourrait ne se faire qu’en paroles.

De la trêve à la paix ?

Quoi qu’il en soit, l’establishment occidental a bien conscience qu’il faut préparer les esprits aux négociations. Aussi, après avoir laissé entendre pourquoi la Russie pourrait accueillir cette perspective, l’article poursuit :

« Même du point de vue de l’Ukraine, il serait imprudent de poursuivre obstinément une victoire militaire complète qui pourrait s’avérer à la Pyrrhus. Les forces ukrainiennes ont déjà subi plus de 100 000 pertes et perdu bon nombre de leurs meilleures troupes. L’économie ukrainienne a chuté d’environ 30 %, le taux de pauvreté augmente et la Russie continue de bombarder les infrastructures essentielles du pays. Environ huit millions d’Ukrainiens ont fui le pays, et des millions d’autres ont été déplacés à l’intérieur du pays. L’Ukraine ne doit pas risquer de se détruire en poursuivant des objectifs probablement inaccessibles. »

En clair, il faut que Kiev arrête de croire qu’elle peut reprendre la Crimée et une bonne partie des territoires annexés. Car, même si l’offensive est très réussie, il est « peu probable » de reprendre tout le territoire perdu, aussi « alors que les coûts de la guerre augmentent et que la perspective d’une impasse militaire se profile, il vaut la peine de faire pression pour une trêve durable qui peut prévenir un nouveau conflit et, mieux encore, jeter les bases d’une paix durable ».

En effet, à la fin de la contre-offensive, qui devra de toute façon être soutenue par une augmentation de l’aide étrangère, « même les États-Unis et l’Europe auront de bonnes raisons d’abandonner leur politique déclarée de soutien à l’Ukraine ». Les coûts du conflit sont trop élevés, tant sur le plan économique que militaire.

Une initiative de paix qui, pour mieux réussir, devrait également impliquer l’Inde et la Chine

D’où une initiative de paix qui, pour mieux réussir, devrait également impliquer l’Inde et la Chine, envisage le très américaniste Foreign Affairs. L’article trace également les contours des négociations qui laisseraient une partie du Donbass à la Russie, avec la création d’une zone démilitarisée pour séparer ces régions du reste de l’Ukraine, vers laquelle les armes continueraient d’arriver et qui bénéficierait d’une protection supplémentaire grâce à un accord de sécurité avec certains pays qui garantissent sa défense, dont les États-Unis (comme pour Israël).

De plus, il ne serait pas demandé à Kiev de renoncer à jamais à son intégrité territoriale, mais seulement de reporter cette perspective à un avenir indéterminé (après la « mort de Poutine »). Enfin, il faut lui accorder l’adhésion à l’Union européenne pour assurer son redressement et son développement.

« Des conditions inacceptables pour Moscou (notamment le réarmement indéfini), commente le bog italien d’analyse géo-politique Piccole Note, mais c’est un changement de rythme par rapport au maximalisme actuel et une base de négociation. En outre, écrivent les auteurs, un accord de sécurité plus large devrait également être négocié avec la Russie, ce qui évite une confrontation mondiale avec l’OTAN. »

Bien sûr, Kiev pourrait résister, soulignent les auteurs dans Foreign Affairs, mais ils rappellent que l’OTAN dispose de nombreux leviers pour faire pression, puisqu’elle dépend de l’aide occidentale : « Depuis plus d’un an, l’Occident a permis à l’Ukraine de définir le succès et de fixer les objectifs de l’Occident dans cette guerre. Cette politique, qu’elle ait eu ou non un sens au début du conflit, a maintenant fait son temps », concluent les auteurs, « parce que les objectifs de l’Ukraine entrent en conflit avec d’autres intérêts occidentaux. Et c’est insoutenable, parce que les coûts de la guerre augmentent et que l’opinion publique occidentale et ses gouvernements se lassent de ce soutien continu. En tant que puissance mondiale, les États-Unis doivent reconnaître qu’une définition maximale des intérêts en jeu dans la guerre a produit une politique qui est de plus en plus en conflit avec d’autres priorités américaines ».

Le plan de paix évoqué ressemble à celui proposé en mars 2022 par la Turquie et que Washington avait empêcher Kiev d’accepter

Il faut donc « aider l’Ukraine à se défendre et à avancer sur le champ de bataille, en la mettant dans la meilleure position possible à la table des négociations qui devrait s’ouvrir d’ici la fin de l’année ». Pendant ce temps, estime Foreign Affairs, Washington devrait établir une voie diplomatique qui assure la sécurité et la viabilité de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières de facto [c’est-à-dire limitées], tout en travaillant à restaurer l’intégrité territoriale à long terme du pays. Cette approche peut être trop pour certains et pas assez pour d’autres. Mais contrairement aux alternatives, elle a l’avantage de combiner ce qui est souhaitable avec ce qui est faisable ».

Etonnement, ce plan ressemble à celui proposé en mars 2022 par la Turquie et que Washington avait empêcher Kiev d’accepter. Depuis, la fameuse victoire ukrainienne n’est toujours pas arrivée, la fin de Poutine non plus, la ruine de la Russie encore moins, pendant que des milliers de morts nourrissent la terre ukrainienne. Le réel, une lassitude des Occidentaux et une situation économique catastrophique à l’ouest, obligent l’Empire du Bien à revoir sa copie.

Francesca de Villasmundo

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