Dans mon ouvrage L’Ultime Transgression, paru il y a un an, je rendais compte d’une manipulation génétique aboutissant à la naissance d’enfants ayant trois parents. Cette affaire depuis a connu des rebondissements multiples qui véritablement vont faire éclater la notion de filiation biologique d’une manière beaucoup plus grave que le gender.
Qu’est-ce que l’hérédité ?
Chacun sait que dans toute cellule du corps, il y a un noyau qui renferme les chromosomes, lesquels portent l’hérédité par les chaînes d’ADN dont ils sont formés. Bien sûr dans le cadre de la reproduction, ovules et spermatozoïdes sont porteurs de chromosomes qui seront transmis aux enfants lors de la fécondation.
Le noyau porte-t-il tout le potentiel génétique ? La réponse est non. Il existe dans le reste de la cellule en dehors du noyau des petits organites appelés mitochondries. Ce sont les batteries énergétiques de la cellule. Mais les généticiens ont constaté qu’il y avait aussi de l’ADN dans ces mitochondries ; et par voie de conséquence un message génétique : c’est le cas des ovules de la femme.
Or ce message génétique peut tout à fait être perturbé, ce qui entraîne après la fécondation, l’apparition de maladies rarissimes dites orphelines et surtout des cas de stérilités. Que faire ?
L’idée est venue de transférer le noyau de l’ovule dont les mitochondries portent un message défaillant vers un autre ovule venant d’une autre personne dont les mitochondries sont saines ; toutefois, auparavant on aura retiré le noyau (énucléation) de ce dernier ; sinon ce deuxième ovule aurait deux noyaux entrant en concurrence, ce qui entraîne la mort cellulaire.
Ce deuxième ovule comporte donc
– un noyau sain provenant du premier ovule
– des mitochondries saines
Ensuite cet ovule a été fécondé par un spermatozoïde dans le cadre d’une fécondation in vitro. C’est en gros ce qui a été effectué par Wilmut pour cloner la brebis Dolly. Il a pris un ovule d’une brebis, en a retiré le noyau et l’a remplacé par celui d’une cellule venant du pis de cet animal.
Les mutants
C’est à l’Université de Saint Barnabas dans le New-Jersey (USA) que les premiers essais ont été faits pour des femmes atteintes de stérilité par anomalies des mitochondries. Effectivement il y a cinq ans, sont venus au monde une vingtaine d’enfants qui, parait-il, sont en excellente santé. Ce sont des mutants au sens de la science-fiction c’est-à-dire des êtres humains dont on a modifié le patrimoine génétique. Ceux-ci ont un père, mais sont issus du rassemblement d’un noyau de leur mère implanté dans un autre ovule d’une seconde femme dont les mitochondries sont saines. Ils ont donc trois parents biologiques qui pourront se pencher sur leur berceau à la naissance. Deux mères et un père. Si en outre ces parents ont eu affaire à une mère porteuse (GPA ou grossesse pour autrui), le bébé aura trois mamans et un papa. Tout bonnement délirant. Une incroyable transgression de la nature.
L’Angleterre aussi…
Il y a deux ans, le gouvernement britannique s’est demandé s’il ne convenait pas d’utiliser cette technique, face à la demande de quelques femmes stériles en raison du message porté par les mitochondries de leur ovule. La réponse a été que oui. Mais quand même un peu gêné aux entournures, il décida de tâter l’opinion publique par un appel sur internet en faisant larmoyer sur le cas de ces personnes stériles comme on le fait en France dans le cadre du mariage des homosexuels. La plupart des 50.000 personnes qui répondirent avaient plus ou moins compris la question. Une petite majorité sur laquelle on avait fait jouer les sentiments se dégagea. C’était peu, mais assez pour que le gouvernement émette un décret de loi autorisant cette manipulation génétique. Mais l’affaire fit un flop gigantesque : en effet la Commission européenne souveraine en la matière rappela que le génome était inaliénable (c’est-à-dire ne pouvant être passé par manipulation à une autre personne). La décision était contraire aux normes européennes. L’Angleterre fut bien obligée de s’incliner.
Les Etats-Unis légalisent les mélanges génétiques
Les expériences de l’Université de Saint Barnabas citées plus haut, avaient été effectuées en l’absence de toute législation sur le sujet. Or il existe en Amérique un organisme du nom de FDA (Food ans Drug Administration) équivalent à notre Agence nationale du médicament. Il est d’une puissance redoutable par les contrôles qu’il exerce dans le cadre de la surveillance des recherches, la commercialisation de la nourriture et des médicaments. Elle vient de donner hier l’autorisation de procéder à des essais cliniques sur l’homme. Ceci par-delà les problèmes moraux et juridiques que de telles manipulations entraînent. Par ailleurs la FDA a manqué de la plus élémentaire des prudences. Assurément, se pose la question de l’avenir de ces mutants. Mais aussi, c’est toute la notion de filiation qui va changer en permettant de telles manipulations génétiques.
Un changement de civilisation… instaurant la maternité collective et détruisant la notion de famille.
Dr Jean-Pierre Dickès
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