Boulogne-sur-mer est actuellement le premier port de pêche de France et d’Europe ; ceci malgré la chute impressionnante de la ressource halieutique en raison de la surpêche déplaçant les « lieux de production » (sic) vers les pays du Nord. Mais bon-an mal-an persiste un certain nombre de traditions liées aux fêtes liturgiques et à la marine.
L’apparition du chalut, sorte de bonnet traîné par les bateaux a révolutionné les techniques de pêche. Mais les petits chalutiers plutôt localisés aux zones côtières ou de moyenne pêche avaient un système de répartition des bénéfices absolument incroyable de nos jours. Après la vente en halles il y avait une hiérarchisation des gains entre l’armateur et les marins payés en fonction de leurs responsabilités. Mais si la pêche avait été mauvaise, l’équipage devait rembourser à l’armateur les frais engagés. Alors il ne restait plus au marin, à part les yeux pour pleurer, qu’une seule chose, la gainée.
Ce mot vient de « gaine ». Il a de multiples sens. Les militaires quand ils étaient incorporés bénéficiaient d’une sorte de sac profond très sommaire pour porter leur paquetage. Il était appelé du nom de gaine.
Le marin partait à la mer avec un sac de ce genre. Quand la pêche était terminée les marins pouvaient quitter le bateau avec autant de poisson qu’il pouvait en porter dans ce sac. Ce qui menait à une sorte de trafic permanent dans le cadre de réseaux parallèles de vente. Ce qui gênait les professionnels de la pêche. Si bien que la gainée a été transformée en une ligne supplémentaire sur la fiche de paye. Ce mot y figure toujours.
Le marin en mer s’alimente de poisson qu’il fait cuire sur une sorte de fait-tout appelé la « caudière » en picard soit la chaudière contenu d’un chaudron ou caudron ce dernier mot étant incorporé à la patronymie depuis le XIème siècle. La caudière existait dans tous les foyers du monde de la marine. Mais c’est un bonheur de voir relancer la gastronomie locale sous le nom de « gainée » que l’on peut retrouver dans quelques restaurants.
Il s’est créé une sorte de confrérie appelée les 100 cravates avec bien sûr le costume traditionnel des marins -pêcheurs. Leur activité principale est de promouvoir la fête de la gainée le deuxième week-end de mai. Cette année le 18 mai.
Il s’agit de faire cuire dans un gigantesque chaudron de dix mètres de long où mijote une tonne de poissons côtiers (et frais) mis en filets sur place avec une tonne de légumes divers, 400 kilos de crème fraîche, 400 litres de vin blanc et les multiples ingrédients de la «caudière ». La recette est plus ou moins secrète. Le meilleur est de venir sur place et se mêler à la foule qui envahit le port pour déguster la gainée. Sur deux jours 6000 personnes se précipitent pour goûter de ce plat traditionnel le long des quais.
Il est des traditions qui meurent… Il en est qui naissent. Mais si l’idée vous prend de faire un détour sur place, vous serez ravi. Il y a désormais tellement d’animations dont un groupe de chants traditionnels de la marine qu’il y a de quoi passer une excellente journée. Les 100 cravates se feront alors un devoir de partager leur recette. Le tout très riche en couleurs. A bientôt j’espère…
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