Royaume-Uni : expulsion des migrants au Rwanda. Stop de la Cour européenne - medias-presse.info

Le gouvernement de Boris Johnson au Royaume-Uni a décidé de mettre un frein à l’immigration illégale. Un accord a été passé avec le Rwanda, à plus de 6 000 km de Londres, afin que ce pays d’Afrique de l’Est accueille les demandeurs d’asile arrivés clandestinement en Grande-Bretagne, et en attente de la décision concernant leur demande.

Hier, après avoir obtenu l’autorisation de procéder de la Haute Cour – qui a défini l’expulsion des migrants illégaux par le gouvernement comme légitime – le premier vol direct vers le pays d’Afrique centrale était prévu depuis le site Boscombe Down du ministère de la Défense à Salisbury pour 22h30 heure française. Une intervention de dernière minute de la Cour européenne des droits de l’homme a empêché le décollage, ordonnant de bloquer le transfert d’un des hommes qui aurait dû être emmené à Kigali. Décision qui, selon des sources du Guardian, aurait dû s’étendre aux autres également. La CEDH, basée à Strasbourg, a estimé que l’expulsion de cette personne irakienne devait être repoussée jusqu’à ce que la justice britannique ait examiné la légalité du projet de loi, ce qui est prévu en juillet. Il s’agit en particulier de s’assurer que les migrants puissent avoir accès à des procédures équitables au Rwanda et que le Rwanda soit considéré comme un pays sûr.

Tandis que les militants continuaient de manifester dans la rue, l’exécutif a réitéré son intention de procéder sur la route tracée depuis des mois par le ministre des Affaires Etrangères, Liz Truss.

Hier, le Premier ministre Johnson lui-même a vivement défendu le projet :

« J’ai toujours su qu’un tel plan aurait entraîné un grand nombre de recours en justice, a déclaré le chef du gouvernement, et pour cette raison, il est nécessaire de modifier la loi en la matière. »

Son ministre de l’Intérieur, Priti Patel a déclaré pareillement : « J’ai toujours dit que cette politique ne serait pas facile à appliquer et je suis déçue que les contestations judiciaires et les réclamations de dernière minute aient empêché le vol d’aujourd’hui de décoller », a-t-elle déclaré mardi soir. Le ministre juge « très surprenant que la Cour européenne des droits de l’homme soit intervenue malgré des succès antérieurs répétés devant nos tribunaux nationaux ». « On ne nous découragera pas de faire ce qu’il faut et de mettre en œuvre nos plans pour contrôler les frontières de notre pays », a-t-elle cependant averti, ajoutant que l’équipe juridique du gouvernement « examine chaque décision prise sur ce vol et la préparation du prochain vol commence maintenant ». A Kigali, le gouvernement rwandais affirme de son côté qu’il n’est « pas découragé » par l’annulation du vol et reste « engagé » dans ce partenariat.

Quatre hommes, pas plus tard qu’hier, ont perdu l’appel présenté au tribunal anglais. L’un d’eux, un Iranien kurde de 25 ans, a déclaré à la BBC qu’il « préférait la mort » plutôt que d’être envoyé au Rwanda. En attendant la décision des juges, avec l’aide d’un interprète, il raconte avoir été kidnappé par des trafiquants d’êtres humains alors qu’il tentait de rejoindre le Royaume-Uni et avoir subi des abus de toutes sortes. Il a déclaré aux journalistes qu’il attendrait beaucoup plus du gouvernement britannique.

« Depuis que j’ai appris que j’allais être renvoyé, a-t-il déclaré, je peux à peine prendre une bouchée ou parler à qui que ce soit. Je ne suis pas tranquille. Je préfère mourir que d’être transféré à cet endroit. »

Cette année, quelque 10 500 clandestins sont arrivés sur les côtes anglaises dans de petites embarcations de fortune, risquant de périr lors de la traversée et mardi plus de 270 sont arrivés à Douvres.

Lors du conseil de cabinet d’hier, Johnson a confirmé qu’il voulait lutter de toutes ses forces contre l’immigration clandestine.

« L’objectif principal, a expliqué le Premier ministre, est de tracer une ligne entre l’immigration autorisée par le gouvernement, qui arrive dans le pays par des voies sûres et légales, et celle qui, au contraire, traverse le canal en utilisant des méthodes illégitimes et dangereuses. C’est ce que nous entendons bloquer. »

La dépense de moyens et d’argent utilisés pour les transferts ne semble pas contrarier le ministre Truss qui, concernant le petit nombre de personnes dans l’avion hier, a déclaré :

« Si les autres personnes ne sont pas sur le vol d’aujourd’hui, elles seront embarquées sur les suivants. »

Glissant sur le coût exact du transport, Truss a rappelé le prix « énorme » payé au trafic d’êtres humains et à l’immigration clandestine. Johnson a également accusé les avocats représentant les migrants d’ « encourager le travail des gangs criminels ». « Il est trompeur et dangereux pour le Premier ministre de laisser entendre que nos avocats font autre chose que leur travail », a répondu sèchement l’homologue. Et dans une lettre ouverte au Times, les dirigeants de l’Église d’Angleterre ont également pris position contre la politique du gouvernement, qualifiant le plan de « politique immorale qui fait honte à la Grande-Bretagne ».

Quoi que l’on puisse penser de cet accord entre le Royaume-Uni et le Rwanda, et ce premier revers pour le gouvernement de Boris Johnson, ce plan anti-immigration aura comme effet de décourager les clandestins d’aller de l’autre côté de la Manche. Et cela est une victoire pour tous ceux qui luttent contre l’immigration illégale.

Francesca de Villasmundo

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