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Rex sum ego : homélie de Mgr Carlo Maria Viganò pour la Fête du Christ-Roi

« Satan sait que Jésus-Christ est Roi. Son seul but est de

nous inciter à nous révolter contre notre Souverain »

Dixit itaque ei Pilatus : Ergo rex es tu ? Respondit Jesus : Tu dicis quia rex sum ego.  Ego in hoc natus sum, et ad hoc veni in mundum, ut testimonium perhibeam veritati : omnis qui est ex veritate, audit vocem meam. [Jo 18, 37]

Pilate alors lui dit : « Donc, tu es roi ? » Jésus répondit : « Tu le dis : je suis roi. Voici pourquoi je suis né, voici pourquoi je suis venu dans le monde : c’est pour rendre témoignage à la vérité. Quiconque appartient à la vérité entend ma voix. » [Jo 18, 37]

Par la volonté providentielle du Pape Pie XI, ce dernier dimanche d’octobre est consacré à la Royauté universelle de Notre-Seigneur. L’encyclique Quas Primas, promulguée le 11 décembre 1925, illustre cette doctrine et les raisons pour lesquelles, en vertu de l’Union hypostatique – c’est-à-dire l’union de la divinité et de l’humanité en la personne de Jésus-Christ – nous devons reconnaître notre Seigneur et Souverain dans le Verbe de Dieu incarné.

L’Évangile de dimanche dernier – le vingt-deuxième après la Pentecôte – a en quelque sorte préparé la fête d’aujourd’hui, en nous invitant à contempler la Royauté du Christ également dans le précepte Donnez à César ce qui est à César , et à Dieu ce qui est à Dieu (Mt 22, 21). Reconnaître Notre-Seigneur comme le Souverain des individus et des sociétés est en effet déjà contenu dans ces simples paroles : Donnez à Dieu ce qui est à Dieu.

Je crois que chacun de vous a su redécouvrir cette belle vérité de notre sainte Religion ; une vérité qui a été préservée depuis l’aube de l’Église. L’institution de cette fête, apparemment redondante étant donné que toute la Liturgie est une profession de Foi en la divine Royauté de Notre-Seigneur, nous montre comment les Pontifes Romains surent réaffirmer Sa Seigneurie universelle précisément au moment où les erreurs du Laïcisme, du Socialisme et du Libéralisme (dans ses deux variantes collectiviste en Russie et nationaliste en Allemagne) essayaient d’évincer Dieu de la sphère publiques, portant les erreurs et les horreurs de la Révolution de 1789 jusqu’à leurs conséquences extrêmes mais logiques. Derrière cette conspiration séculaire contre le Christ, qui a commencé bien avant que nous puissions l’imaginer, nous savons qu’il y a l’œuvre subversive de la Synagogue de Satan, de l’anti-église maçonnique vouée à l’établissement du royaume de l’Antéchrist. Le Protestantisme, les Rosicruciens, les Illuminati bavarois, la Franc-Maçonnerie et toutes les sectes qui ont conspiré depuis le XVIe siècle contre l’Europe Catholique sont des expressions de cette guerre totale contre le Christ et son Église.

Les Papes qui régnèrent entre le XVIIIe et le XIXe siècle condamnèrent avec une sévérité apostolique les principes révolutionnaires au nom desquels les Monarchies Catholiques furent renversées. Les Pontifes voyaient bien quelles ruines immenses suivraient leur propagation dans le monde, et mettaient en garde le peuple chrétien contre tout compromis avec la mentalité séculaire, libérale, laïque et matérialiste que ces erreurs véhiculaient.

Ce que les Pontifes ne pouvaient pas prévoir – tant, en ces temps, seulement l’imaginer était inouï et scandaleux – c’est que cette rébellion contre le Christ Seigneur pourrait non seulement trouver un soutien dans les Papes à venir avec toutes les instances du Modernisme importés dans le sein de l’Église Catholique avec Vatican II, mais que cette rébellion s’étendrait à tout le corps ecclésial, jusqu’à l’apostasie de la Foi et l’affranchissement de l’autorité vicaire du Pontife Romain de celle possédée exclusivement et pleinement par le divin Chef du Corps mystique, Roi et Prêtre. Les papes postconciliaires, artisans d’innovations dans la théorisation et l’exercice de la Papauté, en sont venus à adapter et réinterpréter la Papauté dans une clé synodale (ad intra) et œcuménique (ad extra), démontrant ainsi leur volonté de changer ce que Notre-Seigneur a établi en fondant son Église.

L’apostasie de l’église bergoglienne, sous les yeux de tous, n’est pas un phénomène isolé. Ses causes se trouvent dans les erreurs délibérément insinuées par le Concile et obstinément soutenues par les papes de la période post-conciliaire. La révolution moderniste de Vatican II a consisté précisément à avoir accueilli dans l’Église les principes anticatholiques – maçonniques et libéraux – des États modernes, malgré le fait que les immenses dégâts causés par la Révolution en l’espace de quelques décennies, en premier lieu au salut éternel des âmes et au bon gouvernement des nations, étaient sous les yeux de tous.

Mais en quoi consiste essentiellement cette capitulation inconditionnelle devant les idéologies anticatholiques que l’Église avait condamnées sans relâche et sans appel ? Pourquoi des concepts tels que liberté, fraternité et égalité sont-ils si opposés à l’Évangile et si désastreux dans leurs effets sur les individus et les sociétés, sur l’État et sur l’Église ?

Pour répondre pleinement à cette question, nous devons tout d’abord garder à l’esprit que tout ce qui vient du Malin n’est que tromperie et mensonge. Satan ment quand il trompe l’humanité en insinuant l’illusion de pouvoir se « libérer » de la Seigneurie du Christ, présentée comme un « joug oppressant ». Satan ment lorsqu’il nous fait croire qu’on peut revendiquer pour soi-même une souveraineté qui appartient à Notre Seigneur et à Lui seul. Satan ment quand il trompe les hommes leur faisant croire qu’ils peuvent être « frères », tout en niant la Paternité de Dieu. Il ment en montrant l’uniformité dans le péché et l’homologation dans le vice comme désirable – parce que c’est cela sa conception de l’égalité – et il ment quand il indique comme quelque chose à rejeter la multiplicité et la variété des dons dont la magnificence de Dieu comble chacun de nous d’une manière unique et irremplaçable.

Nous sommes la race élue, le sacerdoce royal, la nation sainte, le peuple que Dieu a acquis pour lui-même pour proclamer les œuvres merveilleuses de celui qui vous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière (1 P 2, 9), et c’est contre cette race – qui est le lignage de la Femme (Gn 3, 15) en perpétuelle inimitié avec le lignage du Serpent – que Satan se déchaîne, dans sa jalousie livide du destin de gloire qu’il a refusé irréversiblement avec son Non serviam.

Satan sait que Jésus-Christ est Roi. Son seul but est de nous inciter à nous révolter contre notre Souverain, à L’avoir pour ennemi, à renier notre juste et nécessaire soumission à Lui, notre Rédempteur et Seigneur, afin de nous soumettre à l’esclavage odieux du Malin. En bref, ce que Satan veut, c’est nous faire renier le Christ Roi et Pontife, et nous faire acclamer l’Antéchrist, qui est Sa contrefaçon blasphématoire. Voilà la raison de cet acharnement, de sa part et de celle de ses serviteurs, à vouloir nier au Christ Ses droits souverains sur les Nations et aussi sur l’Église.

Seuls ceux qui ne croient pas et ne veulent pas que le Christ soit Roi peuvent accepter l’idée que les autorités civiles ne doivent pas reconnaître publiquement la véritable et unique Église, dont Il est le divin Fondateur. Seuls ceux qui ne croient pas et ne veulent pas que le Christ soit Roi peuvent accepter l’œcuménisme syncrétiste et théoriser que « toutes les religions sont un chemin qui mène à Dieu ». Seuls ceux qui ne croient pas et ne veulent pas que le Christ soit Roi peuvent s’arroger le droit sacrilège de changer son Église et la Papauté établie par Lui pour obéir servilement à Ses ennemis.

En revanche, ceux qui reconnaissent que Notre Seigneur Jésus-Christ est Dieu, Seigneur, Roi et Pontife ramènent tout à Lui, Lui renvoient tout, Lui consacrent tout.

Nous ne pouvons pas nous déclarer Catholiques, Apostoliques et Romains sans proclamer la Royauté du Christ, et sans la vivre quotidiennement en commençant par nous-mêmes, nos familles, nos communautés. En effet, comment pouvons-nous espérer que le Seigneur ne nous abandonne pas et revienne régner sur les sociétés civiles, si ceux qui les composent ne Le reconnaissent pas comme Roi ? Amené devant Pilate par le Sanhédrin, Notre-Seigneur se retrouve à répondre au Procurateur Romain qui lui demande s’Il est Roi : Tu dis-les, je suis Roi. Je suis né pour cela, et c’est pour cela que je suis venu dans le monde : pour rendre témoignage à la Vérité ; quiconque vient de la vérité entend Ma voix (Jn 18, 37).

Nous écoutons la voix de Notre-Seigneur si nous venons de la vérité et Le reconnaissons comme notre Roi. C’est dans cette sequela Christi Regis que nous trouverons les raisons de notre lutte en cette heure de l’Histoire et nous serons capables de reconnaître qui est aligné sous Ses saintes bannières et qui, scelesta turba (foule de mécréants – cf Hymne des Vêpres), est aligné avec l’Antéchrist. Qui non est mecum, adversum me est ; et qui non colligit mecum, dispergit (Lc 11, 23). Celui qui n’est pas avec Moi est contre Moi, et celui qui ne rassemble pas avec Moi disperse.

La première créature à écouter la voix de Notre-Seigneur fut la Très Sainte Vierge Marie, Regina Crucis et Trône mystique du Roi divin. Souvenons-nous bien de ceci : là où le Christ règne, Son auguste Mère doit aussi régner, puisque c’est la volonté du Fils qu’Elle soit Celle qui, dans Sa Virginité sans tache humilie l’esprit impur, et qui, dans Son Humilité écrase la tête orgueilleuse du Serpent. Qu’elle soit Dame et Reine de chaque Chrétien et en particulier de chaque âme sacerdotale, afin que la Médiatrice de toutes les Grâces intercède devant le Trône du Très-Haut pour la Sainte Église, pour tous ceux qui professent fidèlement la Foi Catholique et pour les sorts du monde. Et qu’il en soit ainsi.

+ Carlo Maria Viganò, archevêque

27 octobre 2024, D.N.J.C. Regis

© Traduction de F. de Villasmundo pour MPI relue et corrigée par Mgr Viganò

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