Des étudiants de Montréal qui étaient de passage à l’École secondaire Chanoine-Beaudet de Saint-Pascal de Kamouraska cette fin de semaine, où se tenait pour une 14e année le traditionnel tournoi provincial d’improvisation, ont été surpris et, selon le Huffington Post, surtout embarrassés de voir des dessins qu’ils qualifient d’inappropriés placardés sur les murs d’une classe. Les dessins, qui auraient été produits dans le cadre du cours de Monde contemporain par des élèves de 5e secondaire, portent pour la plupart sur la question de l’immigration et du marché de l’emploi et visent, selon le Huff Post, à « illustrer les bénéfices de l’immigration au Québec ». Voilà qui est neutre. « Si tu veux des fraises dans ton panier, accepte les immigrants », est-il écrit sur l’un des dessins, qui montrent d’un côté un homme avec une bière dans les mains, un fraisier plein de fraises et un panier vide, et de l’autre, un travailleur immigrant, dont le panier déborde de ces fruits.
Cette représentation caricaturale, apparemment encouragée et approuvée par l’école, puisque affichée sur les murs d’une classe, est choquante à deux égards :
1. Elle représente le Québécois sous les traits d’un homme bedonnant, fainéant, et juste bon à boire de la bière.
2. Nul besoin d’immigration pour avoir des fraises, ceux qui les récoltent sont des travailleurs saisonniers qui retournent dans leur pays à l’automne. Au Québec, 8 500 travailleurs saisonniers du Mexique et du Guatemala ont été embauchés en 2013. Cette imprécision ne peut que fausser le débat sur l’immigration.
Récurrence de l’oisiveté et de l’obésité des Québécois (et de la bouteille de bière !)
Dans un autre cas, une illustration semble montrer un homme portant la barbe qui, après avoir trouvé un emploi, renonce aux bombes. L’illustration reprend le même thème du travailleur (saisonnier pourtant) cueilleur de fraises (décidément) qui achète la maison d’un vieux (forcément) Québécois qui peut enfin prendre sa retraite. La même affiche insiste sur le fait que les immigrants sont industrieux et que le dollar ou la richesse augmenterait grâce à l’immigration. Est-ce seulement vrai avec des immigrants peu qualifiés qui feraient un travail sous-payé ? Ce n’est pas l’avis de plusieurs économistes. Mais il semble que les pauvres élèves de cette école n’en sauront rien. Toutes les affiches vont dans le même sens et débitent les mêmes clichés politiquement corrects. Ajoutons que rien ne prouve que les immigrants renonceraient au terrorisme uniquement parce qu’ils ont une bonne situation. C’est un peu court. Les terroristes du 11 septembre venaient de familles bourgeoises, étaient diplômés. Ben Laden avait fréquenté les écoles les plus huppées, sa famille était richissime, etc. C’est à nouveau un point de vue simpliste. En fait, selon Marion van San chercheuse au RISBO de l’université Erasmus à Rotterdam, plus l’intégration scolaire et économique est réussie plus, paradoxalement, le risque de radicalisation est grand parce que les attentes de ces jeunes diplômés sont grandes et que leurs déconvenues peuvent les faire basculer. (Aussi ici en néerlandais et là en anglais).
Selon l’un des étudiants, c’est environ une quinzaine de ces dessins qui figurent le long d’un des murs de la salle de classe située au 2e étage de l’établissement, qui a été transformée en salle de spectacle pour accueillir les matchs d’improvisation pendant la fin de semaine.
« Ça réduit l’immigration à un simple pourvoyeur de main-d’œuvre bon marché », a commenté un internaute. « Projet très mal encadré… franchement ! Peu flatteur pour tous… Québécois de souche inclus ! » souligne une autre personne.
Toujours les mêmes thèmes, on dirait vraiment qu’on a soufflé les réponses aux élèves.
Un membre du personnel, qui affirme connaître le professeur en question derrière l’activité, s’est limité à expliquer que la démarche ne se voulait pas méprisante envers les immigrants et que le projet du professeur ne se voulait « surtout pas mal intentionné » (envers l’immigration). Dans un autre dessin, un élève ressort les mêmes clichés éculés selon lesquels sans immigration les usines manqueront de bras, le Québec s’appauvrira et la tombe nous menace collectivement. Or, l’immigration n’est en rien une panacée sur ces trois plans (le Québec a tendance à perdre des emplois industriels, de nombreux immigrants sont au chômage ou mal payés et leur contribution au rajeunissement de la population est maigre). Voir à ce sujet le livre de Benoît Dubreuil et de Guillaume Marois : Le Remède imaginaire. Et 200 000 immigrants en quatre ans, est-ce bon pour le développement durable ?
Mais les pauvres élèves captifs de cette école secondaire n’en entendront probablement pas parler. Comme si souvent l’école québécoise semble politiser les débats et combat certains préjugés pour ne présenter que d’autres mythes, politiquement corrects ceux-là.
Le faible impact de l’immigration sur le rajeunissement de la population. En jaune, la pyramide des âges réelle du Québec en 2006 (avec immigration réelle). La ligne noire représente la pyramide des âges du Québec sans immigration pendant les 40 dernières années.
http://www.xn--pourunecolelibre-hqb.com/2015/04/controverse-projet-scolaire-sur.html
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