À l’Est, les guerres s’emballent. Ou plutôt, la guerre mondiale se profile. La crise du Moyen-Orient et la crise ukrainienne sont les deux faces d’une même médaille. Épuiser la Russie, asservir l’Europe, est l’objectif des faucons américains.
Pour un certain nombre de géo-politiciens, derrière l’emballement des guerres à l’Est, Ukraine et Proche-Orient, se cache la main des faucons américains. Épuiser la Russie, asservir l’Europe, est l’objectif de ce deep state qui tient les États-Unis.
Derrière l’emballement des guerres à l’Est, Ukraine et Proche-Orient, se cache la main des faucons américains
MPI a souvent relayé les articles du blog italien Piccole Note qui fonde ses analyses sur les documents et médias américains, voire ukrainiens, que l’on peut difficilement soupçonnés d’être incorrects par rapport à la pensée unique. Hier, Piccole Note a commis un article particulièrement intéressant car il connecte les derniers événements de ces deux conflits à une même source, celle du parti guerrier, militaro-financier et messianiste qui sévit aux États-Unis.
« L’attaque ukrainienne contre le dépôt de munitions de Tver à l’aide de missiles à longue portée, qui a provoqué une énorme explosion relativement près de Moscou, avait un objectif bien précis. Strana (quotidien ukrainien en ligne, ndlr de MPI) écrit à ce sujet, mentionnant, entre autres, que certaines sources rapportent qu’il était également dirigé contre une base secrète de missiles nucléaires russes, un détail sur lequel il n’y a cependant aucune confirmation. Indépendamment de la véracité ou non des détails, il reste précisément que des missiles à longue portée ont été utilisés, même si l’Ukraine déclarait qu’il s’agissait de missiles de fabrication artisanale – ce qui est impossible – guidés, comme cela est nécessaire, par les systèmes de satellites de l’OTAN, un détail évidemment omis par Kiev.
L’attaque ukrainienne contre le dépôt de munitions de Tver à l’aide de missiles à longue portée : une véritable provocation
« Une véritable provocation pour la Russie, qui a outrepassé le refus de Biden quant à l’utilisation par Kiev de telles ogives, mais surtout une manière de faire pression sur le président des États-Unis pour qu’il obtienne l’approbation officielle de l’utilisation de tels missiles. Ainsi Strana écrit : « Il n’est pas encore clair si une base a réellement été attaquée avec des missiles nucléaires. Mais, probablement, ces informations (ainsi que, en général, les attaques contre des entrepôts militaires au sein de la Fédération de Russie qui ont eu lieu la semaine dernière) seront utilisées par les autorités ukrainiennes pour obtenir de Biden l’autorisation de frapper avec des missiles à longue portée le territoire usant de cette motivation : « nous frappons les installations nucléaires de la Fédération de Russie et aucune réponse n’a été vue, nous ne devons donc pas avoir peur des menaces de Moscou ».
« Oui, mais cette fois plus que d’autres, la Russie a mis en garde contre les conséquences de cette décision : « Les autorités russes, écrit Strana dans un autre article, à tous les niveaux, y compris Poutine, ont déclaré que les attaques contre la Fédération de Russie par les missiles occidentaux indiqueront que les pays de l’OTAN sont entrés en guerre contre la Russie et Moscou ‘prendra les décisions appropriées’. Cela ne s’était jamais produit auparavant, à la veille des escalades précédentes impliquant le franchissement des « lignes rouges », lorsque seuls le ministère des Affaires étrangères (en termes assez généraux) et Dmitri Medvedev, sur leurs chaînes Telegram, effrayaient l’Occident en l’admonestant sur le terrain des conséquences. »
Le leadership américain perçoit la guerre en Ukraine comme une occasion unique d’épuiser la Russie, et d’asservir l’Europe
« « Par conséquent, l’une des principales questions qui circulent actuellement est la suivante : quelle sera réellement la réaction de la Fédération de Russie ? Beaucoup s’attendent à une sorte d’attaque contre les ‘centres de décision’ occidentaux, d’autres prétendent que Poutine bluffe. Il semblerait que la Russie, d’un point de vue purement militaire, ne devrait pas être intéressée à impliquer les pays de l’OTAN dans la guerre en Ukraine, car cela modifierait radicalement l’équilibre des forces et ne serait pas en faveur de Moscou. Dans ce cas, sans le recours aux armes nucléaires, la Fédération de Russie sera confrontée à la défaite. Alors que l’utilisation d’armes nucléaires conduirait à une destruction mutuelle. »
« Les avertissements russes, explique Strana, ont diverses motivations : « La première et la plus évidente raison de telles déclarations est d’inciter Washington et Londres à abandonner leur intention d’accorder le droit de frapper avec des missiles à longue portée. C’est exactement ainsi qu’interprètent la situation les autorités ukrainiennes et le ‘parti de la guerre’ occidental, nous invitant à ne pas avoir peur de franchir les ‘lignes rouges’ de Poutine. Cependant, l’intensité des déclarations menaçantes de Moscou, ainsi que le fait qu’elles ont été exprimées personnellement par Poutine, indiquent que cette fois, la question ne se limite peut-être pas aux seuls mots. Dans le même temps, le Kremlin a sa propre motivation pour exposer l’Occident à la perspective d’une guerre directe avec la Fédération de Russie. À en juger par les déclarations de Poutine, il perçoit la guerre en Ukraine comme seulement un élément d’un processus plus global visant à établir un nouvel ordre mondial et à encourager l’Occident, et en particulier les États-Unis, à conclure des accords à cet égard. Cependant, le problème pour Poutine est que Washington ne considère pas la guerre en Ukraine comme un problème si grave qu’il faille négocier avec le Kremlin pour le résoudre. Au contraire, le leadership américain perçoit la guerre en Ukraine non pas comme un problème ou une menace, mais comme une occasion unique de résoudre plusieurs problèmes importants d’un seul coup : épuiser la Russie et lier encore plus étroitement l’Europe à lui-même, en réprimant les tentatives des Européens de jouer à un jeu géopolitique indépendant avec les Russes ou les Chinois. »
La dialectique entre réalistes et faucons
« L’article de Strana poursuit en expliquant que la seule chose qui pourrait faire changer d’avis les dirigeants occidentaux est qu’ils perçoivent la perspective d’une guerre mondiale comme réelle, d’où l’insistance des Russes sur ce point (après tout, c’est le cas). Il y a beaucoup de folie dans tout cela, alimentée par ce que Strana souligne implicitement, à savoir que même les milieux les plus raisonnables en Occident sont convaincus qu’alimenter cette guerre est un signe avant-coureur des avantages évoqués, convergeant en cela avec les faucons qui l’alimentent à outrance. Autrement dit, les milieux réalistes sont convaincus qu’ils peuvent continuer sur le chemin qu’ils ont entrepris tout en parvenant, en même temps, à garder sous contrôle les forces subversives des faucons. Une folie qui a conduit aux escalades qui ont caractérisé le conflit, qui ont marqué les nombreuses victoires du parti de la guerre mondiale, qui, dans le chaos général, s’est révélé plus fort et plus déterminé.
« De plus, les nombreuses victoires remportées ont encore renforcé leurs positions, marginalisant de plus en plus les réalistes. Maintenant nous attend un nouveau point crucial où cette dialectique atteindra un autre sommet. La semaine d’ouverture verra en effet la réunion de l’Assemblée générale des Nations Unies, en marge de laquelle « la décision de Biden d’accorder ou non le droit de lancer des attaques de missiles contre la Russie devrait être annoncée ». « Cette décision peut être très décisive pour le monde entier. Nous sommes arrivés à un carrefour à partir duquel deux voies s’ouvrent : soit la fin de la guerre en Ukraine et d’autres décisions visant à réduire les tensions mondiales, soit l’escalade et la menace d’une guerre mondiale. »
Le conflit du Moyen-Orient est également à la croisée des chemins, et les deux crises vont de pair
« On peut ajouter que, parallèlement, le conflit du Moyen-Orient est également à la croisée des chemins, puisqu’il existe un risque de guerre à grande échelle entre Israël et le Hezbollah, avec la perspective d’une implication des États-Unis et de l’Iran. Les deux crises vont de pair, puisque les sphères qui poussent à l’escalade en Ukraine sont les mêmes que celles qui soutiennent les efforts déployés par Netanyahu pour déclencher une guerre majeure au Moyen-Orient.
« Cela dit, il semble difficile que des décisions cruciales puissent être prises avant les élections présidentielles américaines. Le mieux que l’on puisse obtenir est de geler les conflits. Moment de suspension, pendant lequel tout peut arriver. »
Francesca de Villasmundo
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