Voici quelques faits sur des sujets qui sont systématiquement abordés lorsque la question de l’État Indépendant du Congo puis du Congo belge est abordée :

1. Les historiens impartiaux s’accordent à dire que la réduction de la population observée à l’époque était due à diverses causes, parmi lesquelles : les maladies (maladie du sommeil, variole, paludisme, etc.), le manque d’hygiène, les famines généralisées et surtout les guerres tribales incessantes, avec le cannibalisme généralisé inhérent et enfin et surtout la traite des esclaves de l’Est pratiquée depuis des siècles par les Arabo-Swahili, comme Rumalisa, Rashid et Tippo Tip. Si les crimes commis par certains individus dans le cadre du commerce du caoutchouc sont indéniables et doivent être condamnés, ils ne peuvent certainement pas être considérés comme ayant eu un impact déterminant sur la décimation de la population.

2. En tant que Roi fortuné de la deuxième puissance industrielle du monde à cette époque, et l’un des seuls Chefs d’État du monde occidental avancé ne disposant pas d’une colonie, Léopold II voulait se hisser au rang de ses pairs qui avaient tous un empire colonial. Après plusieurs tentatives infructueuses dans différentes parties du monde, le Roi Léopold II a jeté son dévolu sur le bassin du fleuve Congo. Le gouvernement belge lui-même n’était pas du tout désireux de devenir une puissance coloniale et le parlement belge n’a soutenu qu’à contrecœur l’effort personnel du Roi pour créer un État indépendant en Afrique centrale et la souveraineté belge sur le Congo n’était pas du tout envisagée à cette époque. Le monarque poursuivait ce but de son propre chef, espérant toujours qu’avec le temps, cet État deviendrait une réalité pour le Royaume de Belgique. Son véritable objectif était d’accroître son pouvoir au sein du groupe des nations avancées, de pacifier son État Indépendant du Congo en mettant fin aux incessantes guerres tribales et aux atrocités qui en découlaient, comme le cannibalisme, l’empoisonnement, les sacrifices humains et les mutilations, et éliminant les trafiquants d’esclaves arabo-swahili qui décimaient la population de la partie orientale du pays.

3. A l’appui d’une stratégie diplomatique très astucieuse, il a réussi à convaincre les autres puissances coloniales de le laisser créer un État dans le bassin du fleuve Congo en échange de la promesse d’y permettre le libre-échange pour toutes les nations, d’éradiquer l’esclavage et d’y introduire la civilisation ; le traité de Berlin de 1885 est absolument clair à cet égard. Le Roi Léopold est devenu le Souverain de l’État Indépendant du Congo grâce à la reconnaissance diplomatique de tous les États importants de l’époque. Il n’a jamais été prévu d’organiser une expédition militaire pour « soumettre » les tribus du Congo. Suite à la reconnaissance internationale, le Parlement belge a autorisé Léopold II, outre le fait qu’il soit le Roi des Belges, à être également le Souverain de l’État Indépendant du Congo à titre personnel (c’était une pratique courante à l’époque. Voir par exemple la pratique britannique consistant encore de nos jours à autoriser le Chef d’État du Royaume-Uni à être également le Chef d’État du Canada, de l’Australie, etc.) La distinction est importante et tous les documents officiels signés par Léopold II portent la double référence : « Léopold, Roi des Belges et Souverain de l’Etat Indépendant du Congo ». Le gouvernement du Royaume de Belgique n’a pas eu son mot à dire dans la gestion par Léopold II de l’État Indépendant du Congo et n’assume donc aucune responsabilité juridique pour la période de l’État Indépendant du Congo.

4. Après avoir été reconnu comme le Souverain de l’Etat Indépendant du Congo, il a immédiatement entamé le vaste processus de pacification et de développement, mettant toute son énergie et son propre argent dans la réalisation d’énormes travaux d’infrastructure afin de désenclaver ce vaste territoire et d’y introduire des facteurs de progrès : la mise en place d’un réseau d’administrateurs et de postes avancés, l’organisation de la Force Publique, la venue de missionnaires avec leurs programmes d’éducation, la création d’une vaste infrastructure de transport et de communication, comme par exemple le chemin de fer de Matadi à Léopoldville et le développement et l’exploitation des voies navigables avec une grande flotte de bateaux à vapeur, la prospection du secteur minier, etc. Afin de réaliser tout cela dans un délai record, il a été contraint en 1890 de compléter ses énormes investissements personnels par un prêt de 25 millions de francs-or du gouvernement belge.

5. Dans sa toute première disposition légale officielle, l' »Ordonnance » du 1er juillet 1885, publiée au Bulletin officiel de l’Etat n° 1 (page 30), la question foncière était clairement définie comme suit : « Article 2. Nul n’a le droit d’occuper sans titre des terres vacantes, ni de déposséder les indigènes des terres qu’ils occupent ; les terres vacantes doivent être considérées comme appartenant à l’État « . C’est une pratique bien établie dans les autres régions coloniales : voir les  » Crown Lands » dans l’Empire Britannique. Et le principe de la propriété de l’État sur les terres vacantes garantissait que les indigènes seraient protégés en conservant leurs territoires.

6. Les différentes tribus étaient autorisées à vivre selon leurs propres coutumes et culture. Seules les pratiques considérées comme inhumaines étaient interdites, telles que le cannibalisme, les mutilations, l’enterrement d’un chef de tribu décédé avec ses épouses vivantes et les serviteurs tués.

7. Il est vrai que de jeunes hommes ont été réquisitionnés pour renforcer la Force Publique et remplacer progressivement les quelques milliers de mercenaires Ouest-Africains engagés dans les premières années, et que les chefs de tribu devaient fournir la main-d’œuvre nécessaire à l’entretien des routes, au portage et au canotage, au développement des activités économiques et à la fourniture de produits destinés à l’exportation, tels que le caoutchouc et l’ivoire. L’introduction d’une culture du travail pour les hommes, dans des sociétés où traditionnellement seules les femmes étaient chargées de travailler, était en soi un développement très difficile. La création de la Force Publique n’avait rien à voir avec la collecte du caoutchouc qui était principalement entre les mains de sociétés privées. La Force Publique a été principalement utilisée dans les campagnes anti-esclavagistes contre les Arabo-Swahilis. Il faut garder à l’esprit qu’elle ne comptait que 6.051 hommes en 1892, 10.294 en 1895, 14.799 en 1900, et 15.908 en 1905, dont des officiers supérieurs belges n’ont toujours constitué qu’une petite minorité.

8. Comme, d’une part, les fonctionnaires de l’administration, peu nombreux, étaient très puissants et peu contrôlés et que, d’autre part, les commerçants et les sociétés détenant de vastes concessions voulaient devenir rentables afin de maintenir et d’étendre leurs opérations, plusieurs atrocités et abus brutaux furent effectivement commis. L’utilisation de « sentinelles » locales pour superviser la collecte du caoutchouc ainsi que le système de primes pour les collecteurs officiels ont effectivement conduit à des abus incontestables. Mais il ne s’agissait pas d’un mode de fonctionnement systématique ni délibéré et certainement pas dans les intentions du roi : celui-ci créa dès 1896 une « Commission pour la protection des populations indigènes », composée de représentants des ordres religieux chrétiens et des missionnaires baptistes américains, et chargée de communiquer directement avec le gouverneur général. Comme des rapports faisaient état de nouveaux abus apportant des éléments effrayants, il décida en juillet 1904 d’envoyer une Commission d’enquête internationale sur place, qui produisit un rapport très franc après quatre mois de contacts intenses, proposant une longue liste de réformes. Son rapport accablant a été intégralement publié dans la Gazette officielle de l’État Indépendant du Congo (contrairement à la pratique dans d’autres États coloniaux). Le Roi les a approuvés sans réserve, les transformant en pas moins de vingt-quatre décrets d’application assortis de mesures correctives (texte intégral du rapport : voir www.kaowarsom.be/documents/BOC/BOEIC1905.pdf, voir pp 145-299). Les résultats ont été si étonnants qu’un chef local, Manangana d’Avakubi, a reconnu les progrès accomplis dans un message savoureux adressé à un officier suédois (Eskill Sundhagen), comme suit : « À l’époque où les Arabes dirigeaient notre pays, ils nous prenaient, nous, nos femmes et nos enfants, comme esclaves. Ils brûlaient nos villages. L’homme blanc ne brûle jamais les villages et quand nous lui apportons des poules ou des bananes, il nous paie bien. Il nous paye aussi équitablement pour la mupira (caoutchouc) que nous collectons. L’homme blanc a mis fin à l’esclavage... Mais nous, les Noirs, souhaitons néanmoins que les hommes blancs rentrent chez eux, car nous sommes obligés d’entretenir les routes et ne pouvons plus nous battre contre les tribus voisines et manger nos prisonniers, car si nous les mangeons, nous sommes pendus ! ».

9. Quant à l’histoire profondément ancrée des « mains coupées », la coutume de couper les mains des voleurs et de mutiler les ennemis était une coutume locale (encore prévalente dans les conflits actuels en Afrique). La coupe des mains des voleurs a été introduite pendant des siècles en Afrique par les Arabo-Swahili et était basée sur la loi musulmane de la Charia, mais la coutume s’est étendue à d’autres tribus, comme l’a déclaré l’Afro-Américain Sowell. Le premier code pénal introduit par Léopold II en 1888, interdisait strictement cette pratique cruelle. Le rapport de la « Commission d’enquête » de 1905 est absolument clair à cet égard.

10. Les revenus tirés de la vente du caoutchouc ont contribué essentiellement à financer le budget de développement de l’État Indépendant du Congo et à rembourser des prêts du Roi lourdement endetté, ils n’ont pas augmenté son immense fortune personnelle précoloniale. Une semaine de production de caoutchouc revenait à l’État comme forme d’imposition ; les revenus des trois autres semaines du mois allaient au cueilleur lui-même.

Il est vrai que les revenus du commerce du caoutchouc ont été utilisés en Belgique par le Roi pour un certain nombre de réalisations architecturales bien connues, qui sont aujourd’hui critiquées. Mais à l’époque, il était courant pour toutes les puissances coloniales de développer de grandes réalisations architecturales avec les revenus coloniaux.

11. Il convient de noter que la Belgique (État Indépendant du Congo/Congo belge) a été la seule puissance coloniale à ne s’être jamais livrée à la traite des esclaves, à aucun moment. Les peuples indigènes n’ont pas été réduits en esclavage mais plutôt libérés de la traite barbare des esclaves dirigée par les Arabo-Swahili qui étaient responsables d’atrocités indicibles. L’administration du Roi a réussi à développer des relations pacifiques avec la plupart des tribus et, avec la Force Publique – une force progressivement composée d’indigènes et dirigée dans les premières années par des officiers de diverses nationalités européennes avant d’être dirigée exclusivement par des Belges – à établir une pacification sur la quasi-totalité de ce vaste territoire (même en 1905, l’ensemble de la présence non indigène dans l’EIC ne totalisait que 2 511 personnes dont 1 410 Belges. Ces Belges étaient en grande majorité actifs dans l’administration, le commerce, les missions religieuses et le secteur privé).

12. Certains auteurs n’hésitent pas à affirmer, sans la moindre preuve, que le régime de Léopold II a été responsable de la mort de millions de Congolais. Cette affirmation n’est qu’une répétition de l’accusation de génocide qui n’a jamais été démontrée faute de statistiques et de connaissance de la taille de la population en 1885 lors de la fondation de l’Etat Indépendant du Congo.

Il est bien connu que Stanley a évalué la taille de la population indigène sur la base d’un nombre très limité d’observations le long du fleuve Congo, et de méthodes de calcul d’extrapolation douteuses contenant plusieurs erreurs. En fait, personne, même aujourd’hui, ne peut fournir de chiffres fiables. On peut se demander pourquoi tant de groupes différents de personnes nouvellement arrivées dans l’État Indépendant du Congo entre 1885 et 1908 (missionnaires établis dans différentes régions du Congo, ingénieurs, administrateurs, etc.) n’ont jamais tiré la sonnette d’alarme sur cette question alors qu’elle a été systématiquement amplifiée et soulignée, uniquement par les protestants anglo-saxons et scandinaves et n’a pas été soutenue dans les conclusions de la Commission d’enquête indépendante.

Il convient de noter que la création de l’État Indépendant du Congo a été le résultat d’une campagne diplomatique plutôt que d’une conquête militaire sanglante comme ce fut le cas par exemple pour les colonies espagnoles, ou pour la guerre entre l’armée américaine et les tribus indigènes indiennes qui ont été privées de leurs terres et enfermées dans de prétendues réserves.

Il peut également être intéressant d’examiner les abus qui étaient légion dans nos propres sociétés « éclairées » américaines et européennes de l’époque (travail des enfants, exploitation de la main-d’œuvre, etc.)

Pourquoi cette campagne de diffamation anti-Roi Léopold II / anti-belge ? L’agenda britannique !

Lors de la conférence de Berlin, aucune puissance coloniale ne s’est intéressée au bassin du Congo. Ce n’est que plus tard qu’il est apparu que ce vaste territoire présentait un intérêt bien plus grand qu’on ne le pensait à l’origine et que les représentants des puissances coloniales à la Conférence de Berlin avaient été déjoués par les diplomates belges. Mais les Britanniques et les Français n’étaient pas trop inquiets, car ils étaient convaincus que les nouveaux venus belges sur la scène coloniale ne seraient de toute façon pas en mesure de gérer ce vaste territoire. Mais lorsqu’il s’est finalement avéré que le Roi et son administration tenaient leurs promesses, les Belges devaient être écartés d’une manière ou d’une autre, de sorte que le bassin du Congo puisse être divisé entre les autres puissances coloniales. Quelle meilleure façon de faire expulser les Belges que par une campagne de calomnie ?

Lorsque les commerçants de la ville de Liverpool ont vu le centre du commerce des produits coloniaux se déplacer progressivement vers Anvers, ils ont soutenu la campagne de diffamation de l’Association pour la réforme du Congo d’E.D. Morel. Morel, à l’origine un admirateur de la colonisation belge (« Le travail que les Belges ont accompli en Afrique tropicale se comparera favorablement à celui de toute autre nation … Malgré la conduite d’une demi-douzaine de canailles que l’on retrouve dans tous les pays sous le soleil, les Belges ont de quoi être fiers. Nous ne pouvons pas leur rendre pleinement justice« ) admettra plus tard que dans son action contre la colonisation en général, il ne pouvait pas oser s’attaquer aux grandes puissances, surtout pas aux Britanniques et aux Français (il avait les deux nationalités) et devait s’attaquer au maillon le plus faible de la chaîne.

Certains missionnaires protestants avaient également une dent contre le Roi Léopold II car, dans sa quête de civilisation, le Roi s’appuyait fortement sur les missionnaires catholiques. Les missions protestantes présentes se sont d’abord senties lésées par ce qu’elles considéraient (probablement à juste titre) comme du favoritisme envers les missions catholiques.

Pour d’autres puissances coloniales, cette campagne de diffamation contre Léopold II était également une distraction bienvenue. N’est-il pas intéressant de noter que la campagne a plus ou moins coïncidé avec la censure du rapport établi par Savorgnan de Brazza en 1905 ( caché jusqu’à récemment) sur la situation au Congo français ? Avec le génocide allemand des peuples Nama et Herrero ? Et avec la conduite britannique pendant la guerre des Boers ?

En 1904, fatigué des accusations de fautes graves portées au Royaume-Uni contre des officiers belges, le Roi Léopold II demande qu’une action en diffamation soit intentée devant un tribunal de Londres. Les accusés britanniques (Burrows et Everett) furent condamnés pour diffamation car ils ne pouvaient pas prouver leurs accusations. Cette affaire, qui a eu un grand retentissement au Royaume-Uni, a mis fin à la campagne de diffamation de l’époque.

Le Consul britannique Roger Casement, à l’invitation d’un missionnaire américain, a ramené ce qu’il a qualifié de « preuve irréfutable de la cruauté belge ». Il avait en effet trouvé une personne vivante (la seule et unique) qui prétendait s’être fait couper la main par un soldat congolais. Cependant, il a été établi par la suite que le malheureux jeune homme avait menti car sa main avait été cliniquement amputée après une infection causée par la morsure d’un animal. Il est à noter que la fiabilité de Casement était plutôt douteuse. Ce diplomate irlandais a finalement été pendu par les Britanniques pour trahison.

13. Les droits souverains du Roi Léopold sur le Congo ont été transférés à la Belgique en 1908 par une majorité étroite dans un Parlement divisé, car l’élite commerçante en Belgique n’est pas du tout intéressée et donne la préférence à ses investissements en Chine, en Russie, en Égypte et en Amérique du Sud ! Mais le gouvernement belge a rapidement pris ses responsabilités et les droits fondamentaux du peuple congolais ont été renforcés (cf. la « Charte Coloniale » publiée dans le Bulletin Officiel du Congo Belge n°1).

L’Etat Belge a veillé à poursuivre le développement de ce vaste territoire, 80 fois plus grand que le sien, instaurant la « Pax Belgica » partout jusqu’aux confins du pays. Cela a créé la base d’un développement extraordinairement rapide et substantiel sur tous les fronts. En l’espace de trois générations, ce vaste pays a été propulsé dans le vingtième siècle. Au moment de son indépendance en 1960, le Congo belge était le pays le plus riche d’Afrique, avec un niveau de développement proche de celui du Canada et supérieur à celui de la Corée du Sud de l’époque.

Surtout, les colonisateurs belges ont réussi à établir dans le pays qu’ils gouvernaient, le soi-disant GNW (Gross National Welfare) qui se compose des éléments suivants :

– La paix, l’ordre et la sécurité partout

– L’absence de grandes famines

– Un service médical gratuit de haute qualité dispensé partout jusqu’aux endroits les plus reculés

– Une éducation gratuite et de qualité

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