Dans la Somme Théologique : surtout : IIaIIae, qu.64, a.2.

Résumé : Est-il permis de tuer les pécheurs ?

Objections :

  1. Notre-Seigneur interdit d’arracher l’ivraie (Mtt.XIII,29-30) ;
  2. Dieu ménage les pécheurs pour leur pénitence ;
  3. Tuer est mauvais en soi.

Or : le moins parfait est ordonné au plus parfait. Cette subordination existe entre la partie et le tout. Toute partie – de par sa nature – est subordonnée au bien du tout : sacrifier l’imparfait pour le parfait. Ainsi, si l’individu constitue un péril, il faut le mettre à mort au nom du bien commun.

Réponses aux objections :

  1. Ceci est vrai si on ne peut discerner les bons des méchants (Abraham demandant à Dieu d’épargner Sodome : Gen.XVIII,23-32).
  2. Ceci est vrai s’il n’y a aucun danger pour autrui ; or les grands malfaiteurs ont toujours menacé l’ordre public.
  3. Si tuer un homme fidèle est mauvais, ne pas oublier qu’un homme pécheur perd sa dignité humaine [en ce sens, il y renonce].

Remarque : la peine de mort n’est pas l’application de la loi du talion (où la peine est calquée sur la faute : œil pour œil, dent pour dent) mais demeure une question de bien public qui va au-delà de la légitime défense ; c’est une question de justice sociale : l’État a pour devoir de guérir le mal et protéger la société (caractère médicinal, exemplaire et réparateur).

Il est vrai que l’homme ne doit point détruire ce que Dieu a fait à son image et a racheté par son sang, ne devant point abréger le temps imparti à chaque créature pour faire son salut. Mais il est également vrai que la question de la peine de mort demeure un problème complexe où sont engagées des appréciations sur la liberté humaine, la responsabilité morale et la vie en société.

Saint Thomas admet par ailleurs que :

  • Par charité un juge peut condamner à mort un ami (cf. IIaIIae, qu.25,art.6, ad.2).
  • Le Chef de la Cité peut infliger la mort par pouvoir coercitif (IIaIIae,qu.65,a.2,ad.2).
  • La peine de mort est légitime quand il y a des dommages irréparables ou une perversité infamante (IIaIIae,qu.66,a.6,ad.2).
  • Il n’est pas injuste de tuer le malfaiteur ou l’ennemi de l’État (IIaIIae,qu100,a.8,ad.3) ; tuer peut donc constituer une “dispense” au Décalogue, tout comme on peut dépouiller quelqu’un de ses biens à bon droit.
  • Si la mise a mort des malfaiteurs et des ennemis de l’État n’est pas une injustice, l’autorité publique demeure libre de l’appliquer et de changer cette législation positive (IaIIae,qu.100, a.8,ad3).
  • La peine doit être proportionnée au dommage social et à la nature du délit (IaIIae,qu.87,a.3,ad1).
  • Le but de la peine est l’expiation et la conservation de l’ordre social (Ia,qu.48,a.6 ; IaIIae,qu.102,a.3,ad5 ; IIaIIae,qu.108,a.4).
  • La prison perpétuelle ou l’exil sont envisageable comme châtiment de l’homicide (IaIIae,qu.87,a.3,ad1).

Dans la Somme contre les Gentils

Ce texte comporte : un principe – une doctrine – une objection – une réponse.Saint Thomas légitime la peine de mort au regard du droit positif divin.

Extraits : (…) La divine Providence a-t-elle disposé que sur terre des hommes imposeraient aux autres le respect de la justice par des peines sensibles et présentes (…).

PRINCIPE : Le bien commun l’emporte sur le bien particulier, aussi convient-il de sacrifier celui-ci à celui-là. Puisque la paix entre les hommes est compromise par quelques hommes dangereux, il faut les retirer de la société des hommes.

DOCTRINE : (…) le médecin ampute sagement et utilement un membre gangrené si, à cause de ce membre, tout le corps court le risque de la gangrène. Le chef de la cité met donc à mort justement et sans péché les hommes dangereux afin que la paix de la cité ne soit pas troublée (…).

OBJECTION : Ainsi, on écarte de ceux qui prétendent de ceux qui prétendent que les punitions temporelles sont illicites. Ils trouvent un fondement à leur erreur dans ce mot : “Tu ne tueras pas” (…). “Laissez-les croître l’un (l’ivraie) et l’autre (le bon grain) jusqu’à la moisson” (…). Les méchants ne doivent donc pas être arrachés par la mort du milieu des bons. Ils disent encore que tant qu’il est en ce monde, l’homme est susceptible d’amendement.

RÉPONSE : Ces raisons sont sans consistance. La loi qui dit “Tu ne tueras pas” ajoute un peu plus bas “Ne souffre pas que le malfaiteur vive”, ce qui laisse comprendre que l’on défend la mort injuste des hommes. (…) cette mort est injuste dont la cause serait la colère et non le zèle de la justice. La mort des méchants serait alors interdite, si les bons étaient de ce fait en péril : ce qui arrive souvent si des péchés manifestes ne distinguent les méchants d’avec les bons, ou s’il est à craindre que les mauvais n’entraînent après eux beaucoup de bons.Le fait enfin que tant qu’ils vivent, les méchants peuvent s’amender, n’empêche pas qu’ils puissent être mis justement à mort, car le risque que fait courir leur vie est plus grand et plus certain que le bien attendu de cet amendement.

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