Photo: Ressortissants Français, djihadistes en Syrie
Monsieur Ali Zaoui, Algérien, expert en questions sécuritaires et lutte anti-terroriste (*) apportent quelques clefs pour comprendre le système djihadiste:
« Si on comptabilise le nombre de radicaux [algériens ndlr] ayant rejoint durant ces trois dernières années la Syrie, on s’aperçoit que ce chiffre ne dépasse pas la centaine, ce qui est bien peu par rapport à la Tunisie, au Maroc et à d’autres pays. D’ailleurs, pendant deux ans et demi, c’est surtout par l’Italie qu’est passée la majeure partie des djihadistes se rendant en Syrie et c’est toujours par l’Italie, carrefour stratégique, qu’ils sont rentrés dans leurs pays respectifs, pas par les pays du Maghreb.«
On ne sera pas trop étonné que l’Italie soit la plaque tournante du trafic, malheureusement il est à craindre que le pape François par son intervention à Lampedusa ait conforté le système de transit en demandant à l’Italie et aux Catholiques (donc à l’Occident) de protéger et d’accueillir les migrants. Ce que facilite amplement le traité de Shengen. Or nous savons que les migrants qui transitent par l’Italie sont majoritairement musulmans et que leurs motivations sont diverses et variées. M. Ali Zaoui, met en lumière l’une de ces motivations qui est le combat djihadiste. Il serait intéressant de savoir la part islamo-djihadiste exate de ce trafic.
« Au stade où nous en sommes, on constate que le Daesh est extrêmement composite puisqu’il regroupe toutes les mouvances djihadistes du monde. Nous estimons qu’il y a 1000 Français partis en Syrie et qui vont rentrer, auxquels s’ajoutent 1500 binationaux. La menace que cela représente est donc réelle. «
Les chiffres énoncés par M. Ali Zaoui montrent que 2500 ressortissants français, -mais qui touchent combien de familles ?- se battent pour une organisation qui a déclaré la guerre au monde et en particulier à la France. Cela recoupe les chiffres du Ministère de l’Intérieur français qui indique que le tiers des combattants occidentaux qui se battent pour l’Etat Islamique sont Français, or ces étrangers occidentaux sont évalués à 10 000 au total.
« On avait demandé à l’Occident de cesser de cautionner l’opposition syrienne parce qu’elle va tôt ou tard se transformer en organisation terroriste qui va menacer le monde entier. D’ailleurs, cette menace s’est considérablement accrue suite à l’assassinat de Kadhafi. «
Encore cette fiction d’une opposition syrienne modérée! Quant à l’assassinat de M. Kadhafi, il a été diligenté grâce aux agresseurs de l’Irak, par les Américains en violation totale du Droit International, ce qui a déclenché le processus guerrier actuel dans lequel sont impliqué la Syrie, l’Irak, les Kurdes, la coalition, l’Etat Islamique, Al Qaïda, et autres groupuscules, sans que l’on puisse avec précision déterminer qui se bat contre qui.
« Nous avions pourtant mis en garde ceux qui étaient derrière en arguant de fortes répercussions sur le Mali et, partant de là, sur l’ensemble du Moyen-Orient. » (…)Le retour des djihadistes n’augure rien de bon. L’Europe est cette fois directement menacée. Pourtant, nous l’avions prévu déjà en 2010, nous l’avions répété en 2012 : il ne fallait pas s’ingérer dans les conflits internes qui secouent des pays souverains, quelle que soit la nature de ces conflits. Ce constat valait notamment pour la Lybie qui géostratégiquement est plus proche du Vieux Continent ».
Le principal acteur des désordres, des massacres et de la naissance du djihadisme en Syrie est Nicolas Sarkozy, il faut le dire et le répéter, alors qu’il s’apprête à briguer un second mandat à la tête de la France. François Hollande dans ce domaine est son digne successeur, qui voulait engager les troupes françaises contre le régime de Bachar el Assad en Syrie, mais qui faute de pouvoir le faire en raison du veto russe, a armé l’opposition syrienne prétendument modérée.
D’ailleurs en soutenant le projet de zone tampon pour la Turquie, Hollande continue de soutenir indirectement l’Etat Islamique, allié objectif actuel de la Turquie. La Turquie a joué et continue de jouer un rôle particulièrement important dans les allers-et-venues des recrues de tous horizon de l’EI, et tout particulièrement des recrues « Françaises ».
« C’est le MAK qui a donné naissance à Al-Qaïda en Afghanistan. Or, la plupart des djihadistes d’Al-Qaïda sont issus des pays arabes. Ils ont été ensuite réexportés vers d’autres pays. On avait demandé à l’Occident de cesser de cautionner l’opposition syrienne parce qu’elle va tôt ou tard se transformer en organisation terroriste qui va menacer le monde entier. «
Le MAK, de quoi s’agit-il ? Le Maktab al-Khadamāt ou Maktab Khadamāt al-Mujāhidīn al-Arab est ce qu’on appelé le Bureau de services, ou Bureau afghan, qui a été fondé par les Frères musulmans, auxquels était lié Oussama Ben Laden. Le Mak est apparu durant la guerre soviéto-afghane. Il s’agissait d’un petit groupe d’une centaine de combattants soutenus par des dons de musulmans collectés par des réseaux internationaux dans les pays arabes et occidentaux. C’est ce MAK qui a donné naissance à Al Qaïda; Al Quaïda que les Américains ont « booster » dans leurs combats djihadistes contre les Russes, dans les derniers temps de la guerre froide. Les Russes qui soutenaient le régime légal d’Afghanistan, leur allié.
Nous connaissons la suite, l’instrumentalisation du fondamentalisme musulman est depuis devenu une des tactiques favorites dans la guerre des américano-mondialiste, des Balkans à la Syrie, en passant par la Lybie. Cette lèpre s’étend maintenant en Afrique et est en train de gagner une partie de l’Asie, avec des attentats très meurtriers au Yemen dernièrement, notamment.
Et ce n’est pas avec l’enrôlement des 5000 « opposants syriens » que les USA comptent former et armer, que nous serons au bout du processus.
(*)Interrogé par Françoise compoint
E. DEfresne
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