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Mort du rabbin Laras, protagoniste du dialogue judéo-chrétien avec le cardinal Martini

Mercredi 15 novembre est décédé à Milan une des majeurs autorités rabbiniques d’Italie et d’Europe : le rabbin Giuseppe Vittorio Laras, figure clé avec le cardinal ultra-progressiste Carlo Maria Martini, du dialogue judéo-chrétien et entre culture laïque et religieuse. Il avait 82 ans.

« Figure d’une haute dimension culturelle et humaine, le rabbin Giuseppe Laras a marqué une époque du judaïsme milanais et italien, mais pas seulement. Il a donné une impulsion au dialogue inter-religieux avec sincérité et courage ; il a divulgué les valeurs et la Pensée juives en devenant un pont de référence constant, par ses qualités intellectuelles et spirituelles »

peut-on lire dans un communiqué du Tribunal rabbinique du Centre Nord Italie.

Andrea Riccardi, connu comme étant le fondateur de la Communauté Sant’Egidio et un des instigateurs des fameuses rencontres inter-religieuses d’Assise, a fait l’éloge de son ami décédé : Giuseppe Laras

«  a été un profond connaisseur de la philosophie juive mais aussi un savant qui a su construire une riche trame de dialogue et de rapports avec différentes cultures ».

Andrea Riccardi a rappelé la présence fréquente de Laras aux nombreuses rencontres pour la paix organisée par la Communauté Sant’Egidio dans « l’esprit d’Assise » à Milan « où il vivait un important rapport d’amitié et de respect avec le cardinal Carlo Martini, et dans de nombreuses autres villes européennes comme Barcelone ou Cracovie, où il participa à un émouvant pèlerinage à Auschwitz ensemble avec d’autres représentants de toutes les religions ».

Né et grandi à Turin, Vatican Insider le décrit comme un « des fils de la Shoah ». Dans sa lettre-testament laissée à sa communauté juive de Milan, le rabbin Laras écrivait qu’il avait survécu, sans quitter l’Italie, « aux horreurs et aux cendres de la Shoah » « mystérieusement, grâce à la force et au courage de ma mère ».

Parallèlement à l’obtention de différents diplômes universitaires, il étudia avec le rabbin Disegni, une des grandes figures du judaïsme italien de l’après-guerre. Cela le fit rentrer dans la sphère du judaïsme culturel et « illuminé ». Cette formation culturelle et humaine juive fut complétée par la lecture de l’œuvre « illuminée et avant-gardiste » du rabbin Elia Benamozegh, un classique du judaïsme italien. Laras était également un des plus grands experts de la pensée de Mosè Maimonide, rabbin espagnol.

L’influence de ces deux figures du monde juif, Benamozegh et Maimonide, est primordiale pour comprendre la pensée et l’action inter-religieuses de Laras avec le Vatican.

Le rabbin de Livourne, Elia Benamozegh (1823-1900), est le théoricien de la religion noachide. Rabbin et philosophe italien d’origine marocaine, il est l’auteur d’une œuvre forte et originale dont l’importance et la modernité sont redécouvertes aujourd’hui. Bibliste, talmudiste, kabbaliste, philosophe, il compte parmi les précurseurs du dialogue judéo-chrétien. La Kabbale eut sur lui une influence déterminante et il défendit sa validité intellectuelle face à ses détracteurs. Il vit dans le judaïsme une synthèse des vérités éternelles susceptibles d’être retrouvées dans toutes les religions, les philosophies et les mythologies des autres peuples (Notice Edition In Press).

« La religion de l’humanité n’est autre que le Noachisme… Voilà la religion conservée par Israël pour être transmise aux gentils… Le noachisme est bel et bien dans le giron de la seule église vraiment universelle, fidèle de cette religion comme le Juif en est le prêtre, chargé, ne l’oubliez pas, d’enseigner à l’humanité la religion de ses laïques, comme il est tenu, en ce qui le concerne personnellement, de pratiquer celle de ses prêtres » (Lettres d’Elie Benamozegh citées par Aimé Pallière : Le Sanctuaire Inconnu, Paris, 1926).

Le rabbin Mosè Maimonide (1135-1204 ) est le grand penseur juif du Moyen-Age : philosophe, talmudiste, commentateur de la Mishna, jurisconsulte et décisionnaire, il est l’auteur du Mishné Torah, l’un des plus importants codes de loi juive. Un spécialiste de la pensée de Maimonide, Maurice-Ruben Hayoun, adepte du dialogue inter-religieux, dans un article intitulé « Ce que Maimonide peut nous apporter aujourd’hui » écrit :

«Un judaïsme ouvert, conscient des valeurs qu’il incarne mais aussi désireux de s’ouvrir et de pratiquer une exégèse dialogale. Un judaïsme qui ne réduise pas la portée du verbe et de la révélation de Dieu à sa seule portée ou convenance. Un judaïsme qui s’occupe autant de ses adeptes (Dix Commandements) que de l’écrasante majorité de l’humanité (les sept lois des Noahides). »

Comme on le voit, le rabbin Giuseppe Laras, figure clé contemporaine du dialogue judéo-chrétien comme le rappellent ses amis conciliaires, a puisé dans la plus authentique tradition juive promotrice de la religion noachide, véritable visage de cette religion mondialiste que les rencontres inter-religieuses préparent habilement. Pour le plus grand profit du messianisme juif ! Puisque selon la Torah et le Talmud, le messie d’Israël ne viendra qu’après l’établissement d’une nouvelle religion universelle qui devrait, dans leur dessein talmudique, reconstruire l’unité de la famille humaine afin de la mener vers un nouveau jardin d’Eden, ce meilleur des mondes bâti sur le Progrès. La religion noachide n’est, à proprement parler, qu’une contre-religion anti-chrétienne, la singerie de la religion catholique !

Dans sa lettre-testament le rabbin Laras évoque aussi le miracle d’Israël, décisif pour le dialogue inter-religieux avec le Vatican :

« Je me rappelle aussi les angoisses qui m’assaillirent, comme beaucoup d’entre nous, jusqu’à l’heure psente, en relation avec la survie de notre petit État. »

« Si un tel dialogue [judéo-chrétien] veut continuer (comme il est impératif que cela soit!) devant être en premier lieu non pas tant théorique mais pratique, il doit progressivement sortir de l’ambiguïté sur Israël, puisque c’est là que vit la majeur partie de notre Peuple et c’est toujours là qu’est en train de s’édifier, entre désillusions et espérance, le futur d’un judaïsme en grande partie post-diasporique. »

Que le rabbin Laras ait œuvré toute sa vie, au sein de ce dialogue inter-religieux, à l’avènement de ce messianisme juif est somme toute assez normal : il a travaillé pour « sa paroisse » ! Mais que depuis Vatican II les autorités de l’Église officielle aient si fortement collaboré avec lui dans ce même sens, et continuent sur cette même lancée avec les disciples de Laras, montre à quel point elles ont embrassé « cette contre-religion mondiale des démocraties occidentales » fruit de la plus pure pensée juive.

Francesca de Villasmundo

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