Parenthèse au milieu d’une longue et insupportable litanie de repentance, Emmanuel Macron a jeté un gros pavé dans la mare des relations entre Paris et Alger. En s’interrogeant sur l’existence de la « nation algérienne » avant la conquête française de 1830, il a en effet frappé au cœur la fausse histoire de l’Algérie. Cette histoire reconstruite sur laquelle repose la « légitimité » des profiteurs de l’indépendance (voir à ce sujet mon livre Algérie, l’Histoire à l’endroit) qui, depuis 1962, mettent le pays en coupe réglée après avoir dilapidé l’incomparable héritage laissé par la France.
Le président Macron n’est d’ailleurs pas le premier à poser la question de la réalité historique de l’Algérie. Ainsi Fehrat Abbas, le futur premier chef d’Etat algérien en 1962 qui avait déclaré au mois de février 1936 dans l’Entente franco-musulmane :
« L’Algérie en tant que Patrie est un mythe. Je ne l’ai pas découverte. J’ai interrogé l’Histoire ; j’ai interrogé les morts et les vivants ; j’ai visité les cimetières : personne ne m’en a parlé. »
Dans sa conférence de presse du 16 septembre 1959, le général De Gaulle disait la même chose :
« Depuis que le monde est le monde, il n’y a jamais eu d’unité, ni, à plus forte raison, de souveraineté algérienne. Carthaginois, Romains, Vandales, Byzantins, Arabes syriens, Arabes de Cordoue, Turcs, Français, ont tour à tour pénétré le pays, sans qu’il y ait eu, à aucun moment, sous aucune forme, un Etat algérien ».
Au Mali, pourquoi, dix ans après avoir été applaudie, lors du déclenchement de l’Opération Serval, la France y est-elle désormais détestée ? Pourquoi une aide salvatrice dans laquelle elle a laissé 52 de ses meilleurs enfants et des dizaines de mutilés, s’est-elle transformée en entreprise « néo-coloniale » aux yeux des Maliens ? Pourquoi les dizaines de milliers de déserteurs maliens installés dans la région parisienne et qui laissent les militaires français se battre à leur place osent-ils critiquer la France ? Pourquoi un tel retournement de situation ? Pourquoi un tel échec politique ?
La réponse est pourtant claire : par refus idéologique et dogmatique de prise en compte du réel ethnique au profit des éternelles nuées démocratiques. Si les dirigeants français avaient eu un minimum de culture, ils auraient pu méditer cette phrase écrite dans le rapport de 1953 du Gouverneur général de l’AOF, précisément au sujet des pays du Sahel :
« Moins d’élections et plus d’ethnographie, et tout le monde y trouvera son compte ».
Tout est dit dans cette phrase qui explique en quelques mots l’échec actuel de la France dont les dirigeants n’ont pas vu que nous n’étions pas face à une guerre religieuse, mais face à une guerre ethno-raciale millénaire dans laquelle les islamistes se sont insérés. Comme je ne cesse de le dire depuis le début de la guerre, dans toute la BSS, l’islamisme n’est en réalité que la surinfection d’une plaie ethnique historique. Mais encore faut-il ne pas refuser de le voir. Et là encore je dois renvoyer à mon livre Les guerres du Sahel des origines à nos jours dans lequel cette problématique millénaire est longuement expliquée.
Bernard Lugan
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