Mgr Schneider, évêque d’Astana au Kazakhstan, a été reçu dernièrement sur le plateau de TV Libertés. Au cours de l’entretien, il a évoqué la situation actuelle dans l’Église, les dubia à propos d’Amoris Laetitia des 4 cardinaux frondeurs, le silence du pape et un possible schisme au sein de l’Église actuelle :
« Il y a non seulement un risque de schisme, mais un certain type de schisme existe déjà dans l’Église. En grec, le schisme signifie se séparer de la totalité du corps. Le Christ est la totalité du corps de la Vérité divine, et l’unité dans son corps surnaturel est également visible. Mais nous assistons aujourd’hui à une forme bizarre de schisme. Extérieurement, de nombreux ecclésiastiques préservent l’unité formelle avec le pape, parfois pour le bien de leur propre carrière, ou par une sorte de papolatrie. Et en même temps, ils ont rompu les liens avec le Christ, qui est la Vérité; avec le Christ, le vrai chef de l’Eglise. »
« D’autre part, il y a des ecclésiastiques qui sont dénoncés comme schismatiques en dépit du fait qu’ils vivent dans la paix canonique avec le pape, et restent fidèles au Christ, la Vérité, en promouvant assidûment son Évangile de Vérité.
Il est évident que ceux qui sont à l’intérieur, les véritables schismatiques par rapport au Christ, vont faire usage de calomnies dans le seul but de faire taire la voix de la vérité, en projetant absurdement leur propre état de schisme interne sur les ecclésiastiques qui, indépendamment de la louange ou du blâme, vont défendre les vérités divines. »
Personne ne niera l’amour de l’Église catholique qui inspire cet évêque devenu un symbole de la résistance aux dévoiements du pape François concernant la morale catholique.
Cependant, il est difficile d’exonérer cet évêque d’une certaine responsabilité dans la confusion actuelle qui règne au sein du monde catholique et de l’Église. Mgr Schneider se contente très bien de la révolution conciliaire et de ses décisions, ne conteste ni la nouvelle ecclésiologie ni les décrets de Vatican II qui s’épanouissent dans l’esprit d’Assise et pratique la réforme liturgique de Paul VI. Il célèbre selon le Novus Ordo tout en ayant un penchant personnel, depuis le Motu Proprio de Benoît XVI, pour le « rite extraordinaire. » Conciliaire conservateur, bien en cour sous le pontificat de Benoît XVI, perçu comme une période post-conciliaire de recentrage vers la droite, d’arrêt du progressisme à outrance et d’un retour, non à la Tradition, mais à des formes liturgiques plus traditionnelles, il déplore aujourd’hui la reprise de cette révolution progressiste extrémiste qui, après avoir massacré la doctrine millénaire de l’Église dans le domaine de la Liberté religieuse, de l’œcuménisme et de la collégialité, s’attaque à la morale catholique et naturelle.
Depuis plus de 50 ans maintenant et le funeste concile Vatican II, une véritable révolution a miné le dogme, la liturgie, la doctrine, les sacrements, les règles disciplinaires. Mgr Lefebvre, l’évêque qui s’est levé au moment du concile et par la suite pour défendre la Tradition, parlait à son époque déjà de « cet esprit » libéral et moderniste qui a pénétré dans l’Église. De la nouvelle messe que célèbre Mgr Schneider, il affirmait :
« Cette nouvelle messe est un symbole, est une expression, est une image d’une foi nouvelle, une foi moderniste […]. Or il est évident que ce rite nouveau est sous-tendu, si je puis dire, suppose une autre conception de la foi catholique, une autre religion… »
« Je considère qu’un esprit de tendance moderniste et protestante se manifeste dans la conception de la nouvelle messe et d’ailleurs de toute la réforme liturgique »
Et il disait de l’Église des prédécesseurs conciliaires de François :
« A quelle Église avons-nous affaire ? Si j’ai affaire à l’Église catholique, ou si j’ai affaire à une autre Église, à une Contre-Église, à une contrefaçon de l’Église ? Or je crois, sincèrement, que nous avons affaire à une contrefaçon de l’Église et non pas à l’Église catholique. Ils n’enseignent plus la foi catholique. Ils enseignent autre chose, ils entraînent l’Église dans autre chose que l’Église catholique. Ce n’est plus l’Église catholique. Ils sont assis sur le siège de leurs prédécesseurs…, mais ils ne continuent pas leurs prédécesseurs. Ils n’ont plus la même foi, ni la même doctrine, ni la même morale que leurs prédécesseurs. »
Le père Calmel, dominicain réfractaire aux innovations conciliaires, autre figure de la résistance à l’esprit révolutionnaire qui a soufflé au moment de Vatican II, avait la même analyse clairvoyante dès 1971 :
« La fausse Église qui se montre parmi nous depuis le curieux concile de Vatican II, s’écarte sensiblement, d’année en année de l’Église fondée par Jésus-Christ. La fausse Église post-conciliaire se contredivise de plus en plus à la sainte Église qui sauve les âmes depuis vingt siècles (et par surcroît illumine et soutient la cité). La pseudo-Église en construction se contredivise de plus en plus à l’Église vraie, à la seule Église du Christ, par les innovations les plus étranges tant dans la constitution hiérarchique que dans l’enseignement et les mœurs. »
C’est bien de schisme dont parlent le Père Calmel et Mgr Lefebvre, d’une fausse Église à l’intérieur de la vraie Église, quelques décennies avant Mgr Schneider. Ce schisme d’avec la vraie Église catholique, qui donne naissance à une pseudo-église en construction portée sur les fonds baptismaux du concile Vatican II dont Mgr Lefebvre disait qu’il était « un concile schismatique », a perduré depuis un demi-siècle dans une quasi-indifférence générale, excepté pour quelques catholiques « traditionalistes », qualifiées bêtement d’intégristes, quelques prêtres, communautés et théologiens mis au ban de la société conciliaire…
Aujourd’hui, l’actuel détenteur du trône pétrinien s’attaque à la morale naturelle et détruit les quelques restes de catholicisme encore présents dans cette Église conciliaire néo-protestante et néo-moderniste qui a pris en main les rouages de l’Église catholique et la destinée des pauvres fidèles qui obéissent aveuglément à la hiérarchie ecclésiastique actuelle. Et l’on reparle de schisme à l’intérieur de l’Église, tant par rapport aux canons traditionnels de l’Église catholique qu’aux nouveautés conciliaires. Comme si la vocation de cette « secte conciliaire » ainsi que l’appelle Mgr Tissier de Mallerais, est de se diviser en multiples rejetons, à l’instar de la secte protestante.
L’action de Jorge Maria Bergoglio pour mener à bien sa révolution de désagrégation de l’esprit et des mœurs catholiques est, – par chance nous dirions presque -, si brutale, radicale et médiatisée qu’elle choque plus d’un fidèle et soulève une juste résistance, même si tardive, chez des ecclésiastiques, tel Mgr Schneider, effarés par ce progressisme absolu. La victoire, si ce n’est pratique, tout au moins intellectuelle et spirituelle, ne sera cependant porteuse de fruits durables que quand ces princes de l’Église résistants rejetteront comme la véritable cause des maux actuels le concile Vatican II, ses pompes et ses œuvres et sa contre-façon d’Église.
Francesca de Villasmundo
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