(1) Palimpseste : parchemin d’auteurs anciens que les copistes du Moyen Âge ont effacé pour le recouvrir d’un second texte. Sur le plan psychologique cela revient à mettre en place un mécanisme tel que les faits nouvellement mémorisés se substituent à ceux qui leur préexistaient dans la mémoire.
Christian LASSALE
—————————–
« Tout le monde sait de toute façon ce que nous pensons, nos positions. Cela n’a pas changé, tout le monde le sait…. Cela ne signifie absolument pas que j’ai amolli notre discours, par calcul politique, afin de ne pas compromettre la possibilité d’un accord – ce qui n’est pas la bonne expression, plutôt : une reconnaissance canonique –, cela n’est tout simplement pas vrai. Celui qui est attentif et regarde tout ce que j’écris et dis, pourra reconnaître que je ne fais que continuer. Nous sommes toujours les mêmes. »
Cette récente déclaration de Mgr Fellay, dans un entretien du 21 avril dernier, m ‘encourage à me plonger dans ses écrits passés, afin de répondre une bonne fois pour toutes aux grincheux qui ne cessent de répéter que Monseigneur aurait amoindri voire changé sa position face à la Rome conciliaire. Je commence donc mes recherches sur les divers sites officiels de la Fraternité, car je n’aime pas les rumeurs. Et voilà que je tombe sur un document écrit il y a quinze ans, au sujet des prêtres de Mgr de Castro Mayer, du diocèse de Campos, intitulé : Au sujet de Campos : le mot du Supérieur Général – 2 mars 2002.
« La conjonction, à quelques jours près, de la reconnaissance de Campos par Rome, que certains pensent être une reconnaissance de la Tradition, et de la journée d’Assise, qui est à l’extrême opposé de la Tradition présente une telle contradiction qu’elle nous oblige à un regard approfondi ; la démolition systématique de tout ce qui est traditionnel dans l’Eglise depuis le concile Vatican II impose une cohérence logique dans l’œuvre entreprise. Avant de saluer la reconnaissance de Campos comme un retour de Rome à la Tradition, nous sommes obligés de nous demander si cet événement ne peut pas aussi, ne doit pas aussi, être inséré dans la logique post-conciliaire : et précisément la journée d’Assise fournit un argument probant en faveur de cette thèse. Si la Rome post-conciliaire est capable de réunir tant de religions, on peut même dire toutes les religions, pour une cause commune religieuse, comment ne pourrait-elle pas aussi trouver une petite place pour la Tradition ? »
Et là, je me souviens de ce que nous disait Mgr Fellay au Pèlerinage du Puy en avril 2016 : « [Le Pape] maintient que nous sommes catholiques. Il a aussi dit : Vous savez, j’ai pas mal de problèmes avec vous, on me fait des problèmes parce que je suis bon avec vous, mais à ceux-là je dis : écoutez, j’embrasse bien le patriarche Cyrille, je fais du bien aux anglicans, je fais du bien aux protestants, je ne vois pas pourquoi je ne ferais pas du bien à ces catholiques. » Bon, me voilà convaincu : Rome n’a pas changé. On retrouve ce même pluralisme dénoncé par Mgr Fellay en 2002 :
« La ligne des réformes est maintenue comme principe intangible et irréversible… C’est l’entrée dans le pluralisme sous apparence de reconnaissance de la part de Rome, qui est imposé, ce n’est pas le retour de l’Église conciliaire à la Tradition… »
Tout cela n’est guère engageant ! J’essaie de me rassurer en me disant qu’au moins la solution canonique que Rome propose aujourd’hui à la Fraternité est une structure idéale, qui lui est accordée sans contrepartie. Et d’ailleurs, Mgr Fellay m’assure fort heureusement qu’il n’a pas changé, et qu’il « ne fait que continuer ». Je poursuis donc la lecture de mon document relatif à Campos :
« On a beau vanter les avantages acquis par la nouvelle structure canonique, le droit à la messe tridentine, par exemple, un évêque traditionnel, aussi, le fait que sur le papier, rien de substantiel n’aurait été galvaudé : la fragilité de l’Administration d’une part, la stabilité de la ligne réformatrice vaticane d’autre part, sont des arguments suffisants pour prédire la chute de Campos malgré toutes les déclarations de meilleure intention. De plus, il faut bien distinguer un manque à la vertu de foi elle-même, d’un défaut dans la confession publique de la foi qui est nécessaire dans certaines circonstances comme l’a si bien rappelé Mgr de Castro Mayer le jour des sacres. Or une prévarication comme celle d’Assise réclame cette confession publique… que nous n’avons pas entendue venant de Campos. »
C’est tellement vrai… Mgr Fellay, lui, avait réagi fermement à la répétition d’Assise en 2002, dans un communiqué spécial affirmant qu’ « il n’y a pas mieux pour provoquer la colère de Dieu » (21 janvier 2002). Et pour les 25 ans de ce sinistre scandale, réitéré par Benoît XVI en 2011, je recherche… plus longtemps, avant de trouver quelques interventions ici ou là, mais sans communiqué. Et enfin, en 2016 ? Rien, absolument rien sous sa plume. Un commentaire non signé, quelques rappels d’anciens documents (tronqués, s’il vous plaît), un mot adouci du Secrétaire Général, et pour combler la mesure : une vidéo relatant les temps forts de cette réunion scandaleuse, sans aucune mise en garde ou critique !
Mais alors là, je ne comprends plus : Monseigneur est-il bien toujours le même ? N’aurait-il pas changé ? Je continue mes recherches.
Affaire à suivre…
Un prêtre de la Fraternité Saint-Pie X
Cet article vous a plu ? MPI est une association à but non lucratif qui offre un service de réinformation gratuit et qui ne subsiste que par la générosité de ses lecteurs. Merci de votre soutien !