« L’enfant sonna un coup de clochette. Le prêtre se releva et prit dans ses mains le calice que les rayons du soleil faisaient briller de tout son or ; lentement, d’un geste que l’âge rendait difficile, il éleva le vase sacré contenant le sang du Christ, prix du rachat des hommes. » Le rachat, le rachat de sa faute, thème central de cet ouvrage, accommodé, relevé, épicé à toutes les senteurs de la Provence chrétienne et d’Alger la musulmane. Vécu, jusque dans la mort, le martyre accepté, le fouet, la peur et le sang, par les grands et les petits, les forts et les faibles, les hommes libres et les prisonniers… Des pages qui font frissonner, de belles amours qui font pleurer.
Augustin a vingt ans et l’appel de la mer a été trop fort. Un soir, Il ouvre doucement la porte et surpris par sa mère il écoute les dernières consignes qui ne le quitteront plus « Tu sais mon fils, si tu dois affronter la vie loin de la maison, tu devras apprendre à ne jamais fuir ton devoir ni chercher à l’éviter ni même à te contenter de la facilité. Si tu fais toujours les choses du mieux que tu peux, alors Dieu t’aidera… » Ces mots étaient tatoués dans son coeur, sur son front.
Augustin navigue, enfin, enrôlé sur un bateau de pêche, il se tient à l’avant. La mer devenait alors l’unique ligne infinie dessinant la frontière des possibles. Il pouvait aller dans toutes les directions. Il suffisait de le vouloir et de tourner la barre. Il est libre se dit-il. La liberté à l’état sauvage et inviolée entière et profonde. Mais loin, là-bas, se profilent des voiles ; elles ont une silhouette étrange, inhabituelle. Le sang de l’équipage se glace : les Barbaresques sur leurs Chebecs, embarcations des écumeurs des mers.
La mer ne resta pas bleue, elle vira au rouge, mer pourpre. L’équipage prisonnier est maltraité, fouetté, exposé au marché d’esclaves, vendu ou tué… Augustin perd pied, il n’est plus qu’un chien de païen enchaîné. Pourquoi Dieu l’a-t-il abandonné ? Ses compatriotes qui le chahutaient sur sa foi avaient-ils raison ? Cette nouvelle condition d’esclave va ébranler sa foi. Il faut survivre coute que coute… Abandons, trahison, vols et mensonges, la prison, la mort. Il va survivre mais à quel prix ? Tous autour de lui se débrouillent pour rester en vie, laissant tuer le voisin pour ne pas mourir, dénonçant l’innocent pour ne pas être vendu ou fouetté…
Face aux événements les plus inattendus, sous les bombes françaises de l’amiral Duquesne qui avait reçu l’ordre du roi de châtier les Barbaresques, il est témoin des jeux politiques les plus explosifs et des retournements les plus tordus. Un oasis de paix gouté auprès de la famille d’Hichem lui avait redonné vaillance, courage et espérance. Il en avait parlé avec fougue de son Dieu, du baptême porte du ciel. Le dieu des musulmans n’était qu’un imposteur. Il avait lui le vrai Dieu, de quoi aurait-il peur ? Mais une angoisse terrible l’étreignait à la pensée de ses lâchetés, trahisons, mensonges… Se racheter ? mais comment ?
« Et le vieux prêtre soupira d’un souffle éreinté par le poids des années passées à servir son Sauveur… Il allait contempler son Créateur. Oh certes il savait qu’il avait mal agi et de nombreuses fois. Toute sa vie après sa conversion il avait servi son nouveau maître sans relâche… »
Roman historique, roman d’aventures ; roman profond de conversion et de témoignage de foi, Mer pourpre, un titre qui sent la poudre à canon et le sang, la sauvagerie et la miséricorde aussi ! Il y aurait pu avoir un sous-titre : le rachat.
Un style alerte, des situations bien écrites basées sur des recherches historiques, un vocabulaire « de la mer et des batailles , une intrigue bien menée tenant le lecteur en haleine jusqu’à la dernière page font de ce roman un bon roman. Des mots qui claquent et faseillent sur les flots agités, des mots qui frappent et décapitent plus vite que les cimeterres.
Des pages magnifiques, pages de Provence, pages d’océan et tempêtes, pages de guerre, de souffre, de feu et de conquêtes sur mer pourpre ; pages de trahison et violence sur fond d’azur en Alger la blanche. Pages d’espérance, de conversion, de repentir, de dévouement et de martyre. Pages de pardon et de retour en Terre de Provence…
Mer pourpre de Louis du Fayet de La Tour, éditions Le lys et le lin, 246 p, 20 €
Un livre tout public à partir de 15/16 ans.
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