De la férie : messe du mardi de la première semaine de Carême
Mardi de la première semaine du Carême
A Rome, la Station est dans l’Église de Sainte-Anastasie, la même où l’on célébrait, dans l’antiquité, la Messe de l’Aurore, le jour de Noël. C’est sous la protection de cette sainte Martyre, immolée le jour même de la naissance du Sauveur, que nos vœux sont aujourd’hui présentés au Père des miséricordes. Le Prophète nous annonce de la part du Seigneur que si notre retour est sincère, la miséricorde descendra sur nous. En vain l’homme cherchera-t-il à mesurer la distance infinie qui sépare la souveraine sainteté de Dieu de l’état de souillure où est l’âme du pécheur ; rien de tout cela n’empêchera la réconciliation de la créature avec son Créateur. La toute-puissante bonté de Dieu créera un cœur pur dans l’homme repentant, et « la grâce surabondera où le péché avait abondé ». La parole du pardon descendra du ciel, comme une pluie bienfaisante sur une terre stérile et desséchée, et cette terre donnera une abondante moisson. Que le pécheur néanmoins écoute la prophétie tout entière. L’homme est-il maître d’accepter ou de refuser cette parole qui vient d’en haut ? Peut-il la laisser tomber aujourd’hui, dans la pensée que peut-être il la recueillera plus tard, à la fin de sa vie ? Non ; Dieu nous dit par son Prophète : « Cherchez le Seigneur, pendant qu’on peut le trouver : invoquez-le pendant qu’il est proche. » Nous ne pouvons donc pas toujours à volonté trouver le Seigneur ; il n’est donc pas toujours aussi proche de nous. Prenons garde, il a ses moments ; l’heure des miséricordes a sonné ; celle des justices la suivra. « Encore quarante jours, et Ninive sera détruite », criait Jonas dans les rues de cette superbe cité. Ninive ne laissa point passer les quarante jours sans revenir au Seigneur, sans l’apaiser dans le jeûne, sous la cendre et le cilice : et Dieu pardonna à Ninive. Entrons dans les sentiments de cette ville coupable et repentante ; ne défions pas la justice divine en refusant la pénitence, ou en l’accomplissant d’une manière imparfaite. Le Carême que nous célébrons est peut-être le dernier que la bonté divine nous préparait ; s’il ne nous convertissait pas, qui sait si le Seigneur reviendrait ? Méditons ces paroles de l’Apôtre qui se rapportent à celles d’Isaïe : « La terre qui se pénètre de la pluie dont elle est arrosée, et qui produit la verdure qu’en attend le cultivateur, est une terre bénie de Dieu ; celle qui ne produit que des ronces et des épines est réprouvée ; la malédiction est près d’elle, « et sa fin sera d’être dévorée par le feu. »
Notre pieuse Quarantaine est à peine à son début, et avant qu’elle soit terminée nous aurons assisté au supplice du Juste. Voici déjà ses implacables ennemis qui se dressent devant lui. En vain, leurs yeux viennent d’être témoins de ses prodiges : l’envie et l’orgueil qui dessèchent leur cœur n’ont rien voulu comprendre. Ces infidèles gardiens de la maison de Dieu sont demeures muets quand tout à l’heure ils ont vu Jésus faire acte d’autorité dans le temple ; un étonnement mêlé de terreur les a saisis. Ils n’ont pas même réclamé quand il a appelé le temple sa maison : tant ils éprouvaient l’ascendant de sa vertu, tant ils redoutaient son pouvoir surhumain. Maintenant, ils ont repris leur audace : la voix des enfants qui crient encore Hosannah frappe leur oreille, et ils s’indignent. Ils osent se plaindre de cet innocent hommage rendu au fils de David qui passe en faisant le bien. Ces docteurs de la Loi, aveuglés par la passion, ne savent même plus reconnaître les prophéties, ni en découvrir l’accomplissement. C’est l’application de l’oracle d’Isaïe que nous venons de lire. Pour n’avoir pas cherché le Seigneur quand il était près d’eux, ils ne peuvent plus le reconnaître, lors même qu’ils lui parlent. Les enfants le sentent et le bénissent ; les sages d’Israël ne voient en lui qu’un ennemi de Dieu, un blasphémateur. Nous, du moins, profitons de la visite de Jésus, afin qu’il ne nous quitte pas, comme il quitta ces faux sages. Il se relira d’auprès d’eux, et, laissant la ville, il retourna à Béthanie qui était proche de Jérusalem. C’est là qu’habitait Lazare, avec ses deux sœurs Marthe et Marie-Madeleine ; là aussi qu’était retirée Marie, Mère de Jésus, dans l’attente du terrible événement qui bientôt devait s’accomplir. Saint Jérôme remarque que le mot Béthanie signifie Maison d’obéissance : ce qui nous apprend que le Sauveur s’éloigne des cœurs rebelles à sa grâce, et qu’il aime à se reposer dans les cœurs obéissants. Acceptons la leçon tout entière, et dans ces jours de salut, montrons, par notre obéissance à l’Église et par notre soumission au guide de notre conscience, que nous avons enfin reconnu qu’il n’y a pour nous de salut que dans l’humiliation de l’orgueil et dans la simplicité du cœur.
Sanctoral
Bienheureux Jérémie de Valachie, Frère mineur capucin
Né en Roumanie le 29 juin 1556, il rêve de se rendre en Italie, car pour lui, c’est là que se trouve les meilleurs chrétiens1. Ses parents le laissent partir quand il a 19 ans. Lors du carême 1578. Il fait la rencontre des frères mineurs capucins et décide de postuler pour rejoindre l’ordre mais sa demande est rejetée à deux reprises par le ministre provincial, c’est seulement à sa troisième demande qu’il est accepté3. Le 8 mai 1579, il est admis au noviciat des frères capucins de Naples où il reçoit le nom de Jérémie. Après avoir émis ses vœux religieux un an plus tard, il est nommé dans un certain nombre de couvents de la province. En 1585, Jérémie est affecté à l’infirmerie du monastère de Sant’Eframo Nuovo de Naples où il passe le reste de sa vie. Là, il s’occupe des frères malades de la communauté, ainsi que des pauvres et des malades de la ville. Il semble né pour cette tâche et un nombre croissant de personnes font appel à son extraordinaire compassion. Quand il n’est pas auprès des pauvres, il est dans les cellules et les chambres des malades, il soigne les lépreux, pour qui il confectionne une préparation à base de plantes pour couvrir la puanteur de leur chair en décomposition. Il s’occupe aussi des aliénés. Il collecte de la nourriture et des vêtements, et personne ne sait ce qu’il mange, car sa ration de pain et de légumes nourrit toujours quelqu’un d’autre. Il accompagne tout cela de longues prières, particulièrement le Pater noster et le Salve Regina. Des guérisons miraculeuses commencent à être associées à ses soins et à ses prières. Le 14 août 1608, il confie à un frère avoir eu une vision de la sainte Vierge. Il contracte une pleuropneumonie et en meurt le 5 mars 1625. Le 14 octobre 1947, il est déclaré serviteur de Dieu par le pape Pie XII, reconnu vénérable par Jean XXIII le 18 décembre 1959.
Saint Romain († 460) et saint Lupicin († 480), Abbés de Condat
Saint Romain et saint Lupicin naquirent d’une honnête famille, vers la fin du IVème siècle, dans le diocèse actuel de Belley ; ce dont donc deux saints français. La jeunesse de Romain demeura pure de toute corruption du siècle. Après s’être mis quelques temps sous la conduite d’un saint abbé, qui lui fit étudier sérieusement la vie cénobitique, il se retira, âgé de trente-cinq ans, à Condat, dans les forêts du Jura, où il mena la vie des anciens anachorètes, au milieu des bêtes féroces, et oublié du monde, qu’il avait oublié le premier. Mais ce n’était là, dans les desseins de Dieu, qu’une préparation : la vocation de Romain, c’était de fonder des monastères où l’on verrait fleurir toutes les merveilles de sainteté accomplies depuis plus de deux siècles dans les déserts d’Orient. Le premier de ses disciples fut son frère Lupicin. Dieu avait donné aux deux frères des caractères fort différents ; autant Romain était doux et indulgent, autant Lupicin était ferme et rigide, et on eût pu l’accuser d’excès, s’il n’avait encore été plus dur pour lui que pour les autres. Chez les deux Saints, ces divergences étaient toujours, chose étonnante, accompagnées d’une parfaite union. Si Lupicin avait paru dépasser la mesure, Romain était là pour tout concilier ; s’il était besoin d’un coup d’énergie, Romain avait recours à Lupicin, dont le bras de fer brisait tout obstacle. Une année que les récoltes avaient été très abondantes, les religieux se relâchèrent de leur abstinence et ne se rendirent point aux douces observations de Romain. Le saint abbé confia l’affaire à son frère, qui ne fit servir à la communauté, pendant un certain temps, que de la bouillie d’orge sans apprêt. Douze moines quittèrent le monastère, les autres retrouvèrent leur ferveur. Romain pleura ses douze religieux et se plaignit à son frère ; il versa tant de larmes et fit tant de prières, que les douze fugitifs revinrent et menèrent une vie austère et pleine d’édification. Un des plus anciens religieux lui reprocha un jour de recevoir trop facilement tous les sujets qui se présentaient, au risque de n’avoir plus de place pour accueillir les sujets d’élite : « Mon frère, lui dit le Saint, Dieu seul discerne le fond des cœurs, confions-nous en Lui. Accueillons toutes ces brebis que nous envoie le divin Pasteur, et, par notre zèle, conduisons-les avec nous aux portes du Paradis. »
Martyrologe
A Rome, l’anniversaire des saints martyrs Macaire, Rufin, Just et Théophile.
A Alexandrie, la passion des saints Céréale, Pupule, Caïus et Sérapion.
En la même ville, la commémoraison des saints prêtres, diacres et d’un grand nombre d’autres qui, au temps de l’empereur Valérien, alors que sévissait une terrible peste, se dévouèrent au service des malades et affrontèrent volontiers la mort. La piété des fidèles introduisit la coutume de les honorer comme des martyrs.
A Rome, saint Hilaire, pape et confesseur.
Dans le Lyonnais, sur les montagnes du Jura, la mise au tombeau de saint Romain abbé. Le premier à mener dans ce désert la vie érémitique, il se rendit célèbre par ses vertus et ses miracles sans nombre, et devint dans la suite le père d’un grand nombre de moines.
A Pavie, la translation du corps de saint Augustin évêque, confesseur et docteur de l’église. Il fut apporté de l’île de Sardaigne par les soins de Luitprand, roi des Lombards.
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