Lundi de Pâques – Station à Saint-Pierre – Alors leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent.

Le mystère de la glorieuse Pâque est si vaste et si profond, que nous n’aurons pas trop des sept jours de cette semaine pour le méditer et l’approfondir. Dans la journée d’hier, nous n’avons fait autre chose que contempler notre Rédempteur sortant du tombeau, et se manifestant aux siens jusqu’à six fois, dans sa bonté et dans sa puissance. Nous continuerons à lui rendre les hommages d’adoration, de reconnaissance et d’amour auxquels il a droit pour ce triomphe qui est le nôtre en même temps que le sien ; mais il nous faut aussi pénétrer respectueusement l’ensemble merveilleux de doctrine et de faits dont la Résurrection de notre divin libérateur est le centre glorieux, afin que la lumière céleste nous illumine de plus en plus, et que notre joie croisse toujours.

A LA MESSE.

L’Introït, tiré de l’Exode, s’adresse aux nouveau-nés de l’Église. Il leur rappelle le lait et le miel mystérieux qui leur furent donnes dans la nuit sacrée du Samedi, après qu’ils eurent participé au divin banquet. Ils sont le véritable Israël, introduit dans la véritable Terre promise. Qu’ils louent donc le Seigneur, qui les a choisis du sein de la gentilité pour faire d’eux son peuple de prédilection. A la vue du Christ, son Époux, délivré des liens de la mort, la sainte Église demande à Dieu que nous, les membres de ce divin Chef, nous arrivions à l’heureux affranchissement dont Jésus nous offre le modèle. Trop longtemps asservis par le péché, nous devons comprendre maintenant le prix de cette liberté des enfants de Dieu qui nous a été rendue par la Pâque.

ÉPÎTRE. Saint Pierre adressa ce discours au centurion Corneille, et aux parents et amis de ce gentil, qui les avait rassemblés autour de lui pour recevoir l’Apôtre que Dieu lui envoyait. Il s’agissait de disposer tout cet auditoire à recevoir le Baptême et à devenir les prémices de la gentilité ; car jusque-là l’Évangile n’avait été annoncé qu’aux Juifs. Remarquons que c’est saint Pierre, et non un autre Apôtre, qui nous ouvre aujourd’hui, à nous gentils, les portes de l’Église que le Fils de Dieu a établie sur lui comme sur le roc inébranlable. Voilà pourquoi ce passage du livre des Actes des Apôtres se lit aujourd’hui, dans la Basilique de Saint-Pierre, près de sa glorieuse Confession, et en présence des néophytes qui sont autant de conquêtes de la foi sur les derniers sectateurs de l’idolâtrie païenne Observons ensuite la méthode qu’emploie l’Apôtre pour inculquer à Corneille et aux autres gentils la vérité du christianisme. Il commence par leur parler de Jésus-Christ ; il rappelle les prodiges qui ont accompagné sa mission ; puis ayant raconté sa mort ignominieuse sur la croix, il montre le fait de la Résurrection de l’Homme-Dieu comme la plus haute garantie de la vérité de son divin caractère. Vient ensuite la mission des Apôtres qu’il faut accepter, ainsi que leur témoignage si solennel et si désintéressé, puisqu’il ne leur a valu que des persécutions. Celui-là donc qui confesse le Fils de Dieu revêtu de la chair, passant en ce monde en faisant le bien, opérant toutes sortes de prodiges, mourant sur la croix, ressuscité du tombeau, et confiant aux hommes qu’il a choisis la mission de continuer sur la terre le ministère qu’il y a commencé ; celui qui confesse toute cette doctrine est prêt à recevoir, dans le saint Baptême, la rémission de ses péchés ; tel fut l’heureux sort de Corneille et de ses compagnons ; tel a été celui de nos néophytes. On chante ensuite le Graduel, qui présente l’expression ordinaire de la joie pascale ; le Verset seulement est différent de celui d’hier, et variera chaque jour, jusqu’à Vendredi. Le Verset de l’Alléluia nous retrace l’Ange descendu du ciel pour ouvrir le sépulcre vide, et manifester la sortie victorieuse et spontanée du Rédempteur.

ÉVANGILE. Contemplons ces trois pèlerins qui conversent sur la route d’Emmaüs, et joignons-les par le cœur et par la pensée. Deux d’entre eux sont des hommes fragiles comme nous, qui tremblent devant la tribulation, que la croix a déconcertés, à qui il faut de la gloire et des prospérités, pour qu’ils puissent continuer à croire, « O insensés et cœurs tardifs, » leur dit le troisième voyageur ; « vous ne saviez donc pas qu’il fallait que le Christ souffrît, et qu’il n’entrât dans sa gloire que par cette voie ? » Jusqu’ici, nous avons trop ressemblé à ces deux hommes ; le Juif s’est montré en nous plus que le chrétien ; et c’est pour cela que l’amour des choses terrestres qui nous entraînait nous a rendus insensibles à l’attrait céleste, et par là même exposés au péché. Nous ne pouvons plus désormais penser ainsi. Les splendeurs de la Résurrection de notre Maître nous montrent assez vivement quel est le but de la tribulation, lorsque Dieu nous l’envoie. Quelles que soient nos épreuves, il n’y a pas d’apparence que nous soyons cloués à un gibet, ni crucifiés entre deux scélérats. Le Fils de Dieu a éprouvé ce sort ; et voyez aujourd’hui si les supplices du Vendredi ont arrêté l’essor qu’il devait prendre le Dimanche vers sa royauté immortelle. Sa gloire n’est-elle pas d’autant plus éclatante que son humiliation avait été plus profonde ? Ne tremblons donc plus tant à la vue du sacrifice ; pensons à la félicité éternelle qui le paiera. Jésus, que les deux disciples ne reconnaissaient pas, n’a eu qu’à leur faire entendre sa voix, qu’à déduire devant eux les plans de la sagesse et de la bonté divines, et le jour se faisait à mesure dans leurs esprits. Que dis-je ? Leur cœur s’échauffait et brûlait dans leur poitrine, en l’entendant discourir à propos de la croix qui conduit à la gloire ; et si déjà ils ne l’avaient pas découvert, c’est qu’il retenait leurs yeux, afin qu’ils ne le reconnussent pas. De même en sera-t-il pour nous, si nous laissons, comme eux, parler Jésus. Nous comprendrons alors que « le disciple n’est pas au-dessus du maître » ; et en voyant l’éclat immortel dont ce Maître resplendit aujourd’hui, nous nous sentirons inclinés à dire aussi à notre tour : « Non, les souffrances de ce monde passager n’ont rien de comparable avec la gloire qui doit plus tard se manifester en nous. ». En ces jours où les efforts du chrétien pour sa régénération sont payés par l’honneur de s’asseoir, avec la robe nuptiale, à la table du festin du Christ, nous ne manquerons pas de remarquer que ce fut au moment de la fraction du pain que les yeux des deux disciples s’ouvrirent, et qu’ils reconnurent leur maître. La nourriture céleste, dont toute la vertu procède de la parole du Christ, donne la lumière aux âmes ; et elles voient alors ce qu’elles ne voyaient pas avant de s’en être nourries. Il en sera ainsi de nous, par l’effet merveilleux du divin sacrement de la Pâque ; mais considérons ce que nous dit à ce sujet le pieux auteur de l’Imitation : « Ceux-là connaissent véritablement le Seigneur au moment de la fraction du pain, dont le cœur était ardent lorsque Jésus cheminait avec eux sur la route. ». Livrons-nous donc à notre divin ressuscité ; désormais nous sommes à lui plus que jamais, non plus seulement en vertu de sa mort pour nous, mais à cause de sa résurrection, qui est aussi pour nous. Devenons semblables aux disciples d’Emmaüs, fidèles comme eux, joyeux comme eux, empressés, à leur exemple, de montrer dans nos œuvres cette nouveauté de vie que nous recommande l’Apôtre, et qui seule convient à ceux que le Christ a aimés jusqu’à ne vouloir ressusciter qu’avec eux. La sainte Église a placé en ce jour ce passage de l’Évangile préférablement à tout autre, à raison de la Station qui se tient dans la Basilique de Saint-Pierre. Saint Luc y raconte, en effet, que les deux disciples trouvèrent les Apôtres déjà instruits de la résurrection de leur Maître ; « car, disaient-ils, il a apparu à Simon. » Nous avons parle hier de cette faveur faite au prince des Apôtres, et que l’Église romaine proclame avec tant de raison aujourd’hui.

L’Offertoire est formé d’un passage du saint Évangile relatif aux circonstances de la Résurrection du Christ. Dans la Secrète, l’Église demande en faveur de ses enfants que la nourriture pascale soit pour eux un aliment d’immortalité, qui unisse les membres à leur divin Chef, non seulement pour le temps, mais jusque dans la vie éternelle. Pendant la Communion, l’Église rappelle aux fidèles le souvenir de Pierre, qui fut favorisé de la visite du Sauveur ressuscité. La foi de la Résurrection est la foi de Pierre, et la foi de Pierre est le fondement de l’Église et le lien de l’unité catholique. Dans la Postcommunion, l’Église continue à demander pour tous ses enfants, convives du même festin de l’Agneau, l’esprit de concorde qui doit les unir comme les membres d’une même famille dont la nouvelle Pâque est venue sceller l’inviolable fraternité. Rendons gloire au Fils de Dieu pour l’œuvre qu’il a accomplie dans ce second jour de la création, en séparant les eaux inférieures des eaux supérieures, et en établissant le firmament qui s’étend entre les unes et les autres ; paroles mystérieuses que les Pères ont commentées avec respect, s’attachant au sens spirituel qu’elles présentent de préférence au sens matériel. On y reconnaît la puissance d’un bras divin qui affermit son œuvre, et maintient en équilibre des forces qui demeuraient confondues dans le chaos. La Liturgie Mozarabe nous fournit cette belle prière pour glorifier notre créateur, en ce jour où son œuvre acquiert un nouveau développement.

Sanctoral

Saint Vincent Ferrier, Évêque et Confesseur

Vincent, né à Valence en Espagne, de parents honnêtes, montra dès sa jeunesse la maturité d’un vieillard. Ayant considéré avec l’étendue de son génie la fragilité de ce monde rempli de ténèbres, il reçut à l’âge de dix-huit ans l’habit religieux dans l’Ordre des Frères Prêcheurs. Après avoir émis solennellement ses vœux, il s’appliqua assidûment à l’étude des saintes lettres, et obtint avec la plus grande distinction le grade de docteur en théologie. Ses supérieurs lui ayant bientôt permis de prêcher la parole de Dieu, il commença à confondre la perfidie des Juifs et à réfuter les erreurs des Sarrasins avec tant de force et de succès, qu’il amena à la foi du Christ une grande multitude de ces infidèles, et port plusieurs milliers de Chrétiens à renoncer au péché pour faire pénitence, et aux vice pour embrasser la vertu Vincent avait été choisi de Dieu pour répandre les enseignements du salut chez toutes les nations, quelles que fussent leur race et leur langue ; et, en annonçant l’approche du dernier et redoutable jugement, il frappait de terreur les âmes de tous ses auditeurs, les arrachait aux passions terrestres, et les excitait à l’amour de Dieu. Dans l’exercice de ce ministère apostolique, voici quel fut constamment son genre de vie : chaque jour, de grand matin, il célébrait une Messe chantée ; chaque jour aussi, il adressait un sermon au peuple ; il observait toujours un jeûne inviolable, à moins d’une urgente nécessité ; il ne refusait jamais à personne ses saints et équitables conseils ; jamais il ne mangea de viande ni ne porta de linge ; il apaisa les dissensions des peuples et rétablit la paix entre des royaumes divisés ; enfin, lorsque la tunique sans couture de l’Église fut déchirée par un schisme douloureux, Vincent travailla beaucoup à ramener et à maintenir l’union. Toutes les vertus brillèrent en lui ; marchant dans la simplicité et l’humilité, il reçut avec bonté et il embrassa ses détracteurs et ses persécuteurs. La puissance divine opéra par lui beaucoup de prodiges et de miracles en confirmation de sa vie et de sa prédication. Très souvent, en effet, par l’imposition de ses mains, les malades recouvrèrent la santé ; il chassa des esprits immondes du corps des possédés, rendit l’ouïe aux sourds, la parole aux muets, la vue aux aveugles ; il guérit des lépreux et ressuscita des morts. Enfin, accablé par la vieillesse, et la maladie, cet infatigable héraut de l’Évangile, qui avait parcouru plusieurs pays de l’Europe au grand profit des âmes, acheva le cours de ses prédications et de sa vie à Vannes en Bretagne, l’an du salut mil quatre cent dix-neuf. Calixte III, a inscrit Vincent au nombre des Saints.

Martyrologe

A Vannes, en Bretagne-Armorique, saint Vincent surnommé Ferrier, confesseur, de l’Ordre des Frères Prêcheurs. Puissant en œuvres et en paroles, il convertit au Christ plusieurs milliers d’infidèles.

En Afrique, la passion des saints martyrs qui, durant la persécution du roi arien Genséric, furent massacrés dans une église le jour de Pâques. L’un d’eux, faisant office de lecteur, eut la gorge percée d’une flèche, alors qu’au pupitre, il chantait l’Alleluia.

Le même jour, saint Zénon martyr, qui fut enduit de poix et jeté dans le feu. Frappé d’une lance sur le bûcher, il reçut la couronne du martyre.

Dans l’île de Lesbos, la passion de cinq bienheureuses vierges, qui consommèrent leur martyre par le glaive.

A Thessalonique, sainte Irène vierge. En dépit de l’édit de Dioclétien, elle cacha les Livres Saints; et pour ce motif, elle fut mise en prison, percée d’une flèche, brûlée par ordre du préfet Dulcétius, sous lequel Agape et Chionie ses deux sœurs, avaient elles-mêmes souffert, peu de jours auparavant.

A Palma, dans l’île de Majorque, l’anniversaire de sainte Catherine Thomas vierge, chanoinesse régulière de l’Ordre de saint Augustin. Elle a été inscrite parmi les saintes Vierges par le pape Pie XI.

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