Messe du Lundi Saint – Madeleine et Judas accompagnent le Sauveur souffrant pendant toute la Semaine-Sainte

Station à Saint-Praxède

Le « titulus Praxedis » sur l’Esquilin, apparaît pour la première fois dans une épigraphe de 491, trouvée dans le cimetière d’Hippolyte sur la voie Tiburtine, et qui mentionne un de ses prêtres. Paschal Ier qui en fut titulaire, le reconstruisit depuis les fondations, le déplaçant toutefois quelque peu ; mais, pour rendre plus vénérable le nouvel édifice, il y déposa un grand nombre de corps de martyrs, transportés là des cimetières suburbains désormais tombés en abandon. De même que les mosaïques de l’abside, celles de l’oratoire de Saint-Zenon sont aussi très importantes. Jusqu’en 1699, ce prêtre martyr reposa là, à côté de son frère Valentin. On y vénère aussi une image antique de la sainte Vierge, et une colonne de jaspe sanguin apportée de Jérusalem à Rome en 1223, parce qu’une tradition affirmait que le divin Sauveur, durant sa flagellation, y fut lié. Sous l’autel majeur repose le corps de la sainte titulaire de la basilique, et dans une crypte au-dessous du presbyterium se trouvent deux mille trois cents corps de Martyrs que le pape saint Paschal y déposa après les avoir extraits des Catacombes. De la sorte, cette basilique, en raison de son antiquité, de ses monuments artistiques et des saintes reliques qu’elle conserve, peut être considérée comme l’un des plus insignes sanctuaires de Rome chrétienne.

Jésus se rend encore aujourd’hui à Jérusalem, dès le matin, avec ses disciples. Il était parti à jeun, et le récit sacré nous dit qu’il eut faim sur la route. Il s’approcha d’un figuier ; mais cet arbre n’avait encore que des feuilles. Jésus, voulant nous donner un enseignement, maudit le figuier, qui sécha tout à coup. Il exprimait par ce châtiment le sort de ceux qui n’ont que de bons désirs, et sur lesquels le fruit de la conversion ne se cueille jamais. L’allusion à Jérusalem n’était pas moins frappante. Cette ville était zélée pour l’extérieur du culte divin ; mais son cœur était aveugle et endurci ; bientôt elle allait rejeter et crucifier le Fils du Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. La journée se passa en grande partie dans le Temple, où Jésus eut de longs entretiens avec les princes des prêtres et les anciens du peuple. Il parla avec plus de force que jamais, et déjoua leurs questions insidieuses. On peut voir, principalement en saint Matthieu, Chapitres XXI, XXII et XXIII, le détail des discours du Sauveur, qui deviennent de plus en plus véhéments, et dénoncent aux Juifs avec une énergie toujours croissante le crime de leur infidélité et la terrible vengeance qu’elle doit amener. Enfin Jésus sortit du Temple, et se dirigea vers Béthanie. Arrivé sur la montagne des Oliviers, d’où l’on dominait la ville, il s’assit un moment. Ses disciples profitèrent de cet instant de repos pour lui demander à quelle époque auraient lieu les châtiments qu’il venait de prédire contre le Temple. Alors Jésus, réunissant dans un même tableau prophétique le désastre de Jérusalem et la destruction violente de ce monde à la fin des temps, parce que la première de ces deux calamités est la figure de la seconde, annonça ce qui doit arriver quand la mesure du péché sera comblée. Quant à ce qui est de la ruine de Jérusalem en particulier, il en fixa la date par ces paroles : « En vérité, je vous le dis : Cette génération d’hommes ne passera pas que toutes ces choses ne soient accomplies. » En effet, quarante ans étaient à peine écoulés que l’armée romaine, accourue pour exterminer le peuple déicide, menaçait du haut de la montagne des Oliviers, de cette place même où le Sauveur est assis aujourd’hui, l’ingrate et dédaigneuse Jérusalem. Jésus, après avoir parlé longuement encore sur le jugement divin qui doit réviser un jour tous les jugements des hommes, rentre dans Béthanie, et vient rassurer par sa présence le cœur affligé de sa très sainte mère.

ÉPITRE. Aujourd’hui, c’est Isaïe, ce Prophète si précis et si éloquent sur les épreuves du Messie, qui vient nous révéler les souffrances de notre Rédempteur, et la patience qu’il opposera aux mauvais traitements de ses ennemis. Jésus a accepté sa mission de Victime universelle, et il ne recule devant aucune douleur, devant aucune humiliation. « Il ne détourne point son visage de ceux qui le frappent et le couvrent de crachats. » Quelles réparations ne devons-nous pas à cette souveraine majesté qui, pour nous sauver, s’est livrée à de tels outrages ? Voyez ces Juifs lâches et cruels : ils ne tremblent plus devant leur victime. Auparavant, dans le jardin des Oliviers, un seul mot de sa bouche les a jetés par terre ; mais, depuis, il s’est laissé lier et traîner chez le grand-prêtre. On l’accuse ; des clameurs s’élèvent contre lui ; il répond à peine quelques mots. Jésus de Nazareth, ce docteur, ce thaumaturge, a perdu son prestige ; on peut tout oser contre lui. C’est ainsi que le pécheur se rassure, quand il a entendu gronder la foudre et qu’elle ne l’a pas écrasé. Cependant les saints Anges s’anéantissent devant cette face auguste que ces misérables ont meurtrie et souillée ; prosternons-nous avec eux, et demandons grâce : car nos péchés aussi ont maltraité cet auguste visage. Mais écoutons les dernières paroles de notre Sauveur, et rendons grâces. Il dit : « Celui qui marchait dans les ténèbres et qui n’avait pas la lumière, qu’il espère maintenant. » C’est le Gentil plongé dans le vice et dans l’idolâtrie. Il ignore ce qui se passe en ce moment à Jérusalem ; il ne sait pas que la terre possède un Homme-Dieu, et que cet Homme-Dieu est, à cette heure même, foulé sous les pieds d’un peuple qu’il avait choisi et comblé de faveurs ; mais bientôt la lumière de L’Évangile viendra poursuivre de ses rayons cet infidèle. Il croira, il se soumettra ; il aimera son libérateur jusqu’à lui rendre vie pour vie et sang pour sang. Alors s’accomplira l’oracle de l’indigne pontife qui, prophétisant malgré lui le salut des Gentils par la mort de Jésus, annonçait en ces derniers jours que cette mort allait réunir dans une seule famille les enfants de Dieu qui étaient dispersés sur la surface de la terre. Dans le Graduel, David continue d’appeler contre les bourreaux du Messie les vengeances qu’ont méritées leur ingratitude et leur endurcissement. Le Trait est celui que, depuis le Mercredi des Cendres, l’Église chante à la Messe chaque semaine, les lundi, mercredi et vendredi, pour implorer la miséricorde divine sur les œuvres de la pénitence quadragésimale.

ÉVANGILE. Le récit évangélique se rapporte au Samedi, veille du Dimanche des Rameaux, et il a été inséré dans la Messe d’aujourd’hui parce que, dans l’antiquité, ce Samedi n’avait pas de Station. La sainte Église a voulu porter notre attention sur cet intéressant épisode des derniers jours de notre Rédempteur, parce qu’il nous aide à saisir l’ensemble des circonstances qui se produisaient à ce moment autour de lui. Marie-Madeleine, dont la conversion était, il y a quelques jours, l’objet de notre admiration, est appelée à figurer dans les scènes de la Passion et de la Résurrection de son maître. Type de l’âme purifiée et admise ensuite aux faveurs célestes, il nous importe de la suivre dans les diverses phases que la grâce divine lui fait parcourir. Nous l’avons montrée s’attachant aux pas de son Sauveur et subvenant à ses besoins ; ailleurs le saint Évangile nous la fait voir préférée à Marthe sa sœur, parce qu’elle a choisi la meilleure part ; dans les jours où nous sommes, elle nous intéresse surtout par son tendre attachement à Jésus. Elle sait qu’on le cherche pour le faire mourir ; et l’Esprit Saint, qui la conduit intérieurement à travers les états toujours plus parfaits qui se succèdent en elle, veut qu’aujourd’hui elle accomplisse une action prophétique à l’égard de ce qu’elle redoute le plus. Entre les trois présents des Mages, l’un d’eux était un signe de mort pour le divin Roi que ces hommes fidèles étaient venus saluer du fond de l’Orient : c’était la myrrhe, parfum funéraire qui fut employé si abondamment dans la sépulture du Sauveur. Nous avons vu que Madeleine, au jour de sa pénitence, témoigna de son changement de vie par l’effusion du plus précieux de ses parfums sur les pieds de Jésus. Aujourd’hui, elle a recours encore à cette touchante manifestation de son amour. Son maître divin est à table chez Simon le Lépreux ; Marie, la Mère de douleurs, est avec lui, ainsi que les disciples ; Marthe veille au service ; tout est calme dans cette maison ; mais de tristes pressentiments sont au fond des cœurs. Tout à coup Madeleine paraît, portant dans ses mains un vase rempli d’une huile de nard du plus grand prix. Elle se dirige vers Jésus, et s’attachant à ses pieds, elle les inonde de ce parfum ; et cette fois encore elle les essuie avec ses cheveux. Jésus était étendu sur un de ces lits dont les Orientaux se servaient, lorsqu’ils prenaient leur repas dans les festins ; il était donc facile à Madeleine d’arriver aux pieds de son maître, et de renouveler cette démonstration de respect et de tendresse à laquelle elle s’était livrée autrefois chez le pharisien ; mais en ce jour le récit sacré ne nous dit pas qu’elle ait mêlé ses larmes à son parfum. Deux des Évangélistes, dont saint Jean a voulu compléter la narration trop succincte, nous apprennent qu’elle répandit aussi cette huile de senteur sur la tête du Sauveur. Madeleine sentait-elle en ce moment toute la portée de l’action que l’Esprit divin lui inspirait ? L’Évangile ne le dit pas ; mais Jésus révéla le mystère à ses disciples ; et nous qui recueillons ses paroles, nous apprenons par ce fait que la Passion de notre Rédempteur est, pour ainsi dire, commencée, puisque déjà la main de Madeleine L’embaume pour le tombeau. La suave et pénétrante odeur du parfum avait rempli toute la salle. L’un des disciples, Judas Iscariote, ose protester contre ce qu’il appelle une profusion. La bassesse de cet homme et son avarice l’ont rendu insensible et sans pudeur. La voix de plusieurs des disciples s’unit à la sienne : tant leurs pensées étaient vulgaires encore ! Jésus permit cette indigne réclamation pour plusieurs motifs. Il voulait d’abord annoncer sa mort prochaine à ceux qui l’entouraient, en leur dévoilant le secret exprime par cette effusion d’un parfum sur son corps. Son but ensuite était de glorifier Madeleine, dont l’amour était à la fois si tendre et si ardent ; et c’est alors qu’il annonça que la renommée de cette illustre pénitente s’étendrait par toute la terre, aussi loin que l’Évangile lui-même pénétrerait. Enfin il voulait par avance consoler les âmes pieuses auxquelles son amour inspirerait de faire des largesses à ses autels, et les venger des critiques mesquines dont elles devaient souvent être l’objet. Recueillons ces enseignements divins. Aimons à honorer Jésus dans sa personne comme dans ses pauvres. Honorons Madeleine et mettons-nous à sa suite, lorsque bientôt nous la verrons si assidue au Calvaire et au sépulcre. Enfin préparons-nous à embaumer notre Sauveur, en réunissant pour sa sépulture la myrrhe des Mages, qui figure la pénitence, et le précieux nard de Madeleine, qui représente l’amour généreux et compatissant.

Dans l’Offertoire, le Psalmiste, au nom du Rédempteur, après avoir imploré le secours, demande à Dieu qu’il daigne être fidèle dans l’accomplissement de ses divins décrets pour le salut de l’homme.

La Secrète exprime toute la force divine de nos augustes Mystères. Non seulement ce Sacrifice purifie les âmes, mais il les élève jusqu’à l’union parfaite avec celui qui est leur principe et leur auteur. Après la participation des fidèles au Mystère divin, on entend retentir, dans l’Antienne de la Communion, une malédiction contre les ennemis du Sauveur. C’est ainsi que, dans le gouvernement du monde, Dieu opère au même moment selon la miséricorde et selon la justice. La sainte Église conclut les prières de ce Sacrifice en demandant pour ses enfants la conservation de l’esprit de ferveur qu’ils viennent de puiser à sa source.

Sanctoral

Saint Jonas et saint Barachisius, Martyrs († 327) 

L’an 327 de l’ère chrétienne, vivaient dans un petit village de la Perse deux frères chrétiens nommés Jonas et Barachisius; ils craignaient Dieu et observaient fidèlement Sa loi. Ayant appris que le roi Sapor avait lancé un édit contre la religion du Christ, et que déjà un grand nombre de chrétiens étaient en prison, ils résolurent d’affronter la persécution et d’aller encourager les martyrs. A la vue de plusieurs chrétiens dans les tourments: « Ne craignez rien, leur dirent-ils, combattons, mes frères, pour le nom de Jésus crucifié, et nous obtiendrons, comme nos devanciers, la glorieuse couronne promise aux vaillants soldats de la foi. » Soutenues par ces paroles, les victimes consommèrent sans faiblesse leur sacrifice. Mais il n’en fallait pas davantage pour exciter la colère des ministres du roi. Jonas et Barachisius sont arrêtés et menacés de mort s’ils n’adorent les dieux de la Perse, le soleil, le feu et l’eau. Leur refus est suivi de cruelles tortures. Jonas, attaché à un pieu, est frappé de verges couvertes d’épines jusqu’à ce que ses côtes soient mises à nu; mais il bénit et glorifie le Seigneur. On le traîne alors, une chaîne aux pieds, sur un étang glacé pour y passer la nuit. Pendant ce temps, Barachisius confond à son tour la folie des adorateurs des idoles, et affirme que jamais il n’adorera que Celui qui est le Créateur tout-puissant du soleil, du feu et de l’eau. On lui verse du plomb fondu sur les yeux, dans la bouche, dans le nez et les oreilles, puis on le suspend par un pied dans sa prison. Le lendemain, le combat recommence pour les deux frères. Aux questions railleuses de ses bourreaux, Jonas répond: « Dieu ne m’a jamais donné une nuit plus heureuse ni plus tranquille, » puis il leur parle avec une éloquence et une sagesse qui les ravissent d’étonnement et d’admiration malgré eux, sans toutefois diminuer leur barbarie. Ils coupent par phalanges les doigts des mains et des pieds du saint martyr, et ensuite le jettent dans une chaudière de poix bouillante, après lui avoir ôté la peau de la tête. La poix bouillante l’ayant épargné, ils le placent sous un pressoir à vis et le broient en faisant tourner sur lui cet horrible instrument; et c’est dans ce supplice que Jonas termina son combat victorieux. Quant à son frère Barachisius, il ne fut pas moins admirable. Jeté dans un buisson d’épines aiguës, on ne l’en retira que pour enfoncer dans sa chair des pointes de roseaux et les arracher violemment. Au lieu de se plaindre, la douce victime, à l’exemple du Maître, priait pour ses ennemis. Son corps fut ensuite broyé sous le même pressoir où son frère avait expiré.

Martyrologe

A Héliopolis, près du Liban, saint Cyrille, diacre et martyr. Sous Julien l’Apostat, les païens lui ouvrirent le ventre, en arrachèrent le foie, puis le mangèrent comme des bêtes féroces.

En Perse, les saints moines et martyrs Jonas et Barachise. Ils étaient frères et furent immolés sous Sapor, roi des Perses. Jonas, ayant été pressé sous une vis, eut tous les os brisés, puis il fut scié par le milieu du corps; Barachise fut étouffé avec de la poix brûlante dont on lui avait rempli la bouche.

A Nicomédie, la passion des saints Pasteur, Victorin et de leurs compagnons martyrs.

En Afrique, les saints confesseurs Armogaste homme de qualité, Masculas acteur, et Satur, intendant de la maison du roi. A l’époque de la persécution des Vandales, sous le roi arien Genséric, ils souffrirent d’horribles tourments et divers outrages pour la défense de la vérité, et parvinrent glorieusement au terme de leurs combats.

En la ville d’Asti, saint Second martyr.

Au monastère de Luxeuil, en France, la mise au tombeau de saint Eustase abbé, disciple de saint Colomban. Il fut le père de près de six cents religieux, et se rendit célèbre par la sainteté de sa vie et l’éclat de ses miracles.

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