Lundi des Rogations
Les trois jours de Rogations avant l’Ascension eurent leur origine en Gaule. Saint Mamert, évêque de Vienne, avait institué ces trois jours consacrés à la pénitence et à des processions de prières, pour obtenir que la ville et les environs fussent délivrés des grandes tribulations qui les désolaient (vers 450 après J.-C.). On imita, bientôt, ces processions de prière dont l’usage s’introduisit finalement dans toute l’Église d’Occident. La cérémonie, des Rogations consiste dans la procession et la messe de Rogations qui suit. Dans la procession, nous avons un dernier reste de l’antique procession de station que, les premiers chrétiens faisaient si volontiers, presque chaque jour, pendant le Carême et dans la semaine de Pâques. Ils se rassemblaient dans une église, appelée église de réunion (ecclesia collecta ; c’est de là que vient le nom de l’oraison dite collecte). De là, ils se rendaient en procession avec l’évêque et le clergé dans une autre église. En chemin, ils chantaient les litanies des saints et le Kyrie eleison. L’autre église s’appelait l’église de station. C’est là qu’on célébrait la sainte messe. Les quatre jours de prières nous ont conservé cet antique et vénérable usage, qui doit nous être cher. En effet, nous ne devons pas seulement prier instamment, mais encore en communauté. A cette prière instante et commune le Christ a promis la force et le succès. A la procession, on chante les antiques litanies des saints, dans lesquelles nous implorons, pour tous nos besoins, l’intercession de toute l’Église triomphante. Les oraisons terminales de ces litanies sont très belles et très édifiantes.
Sanctoral
Saint Venant, Martyr
Venant, de Camérino, avait quinze ans, lorsqu’il fut dénoncé comme chrétien à Antiochus alors gouverneur de la ville pour l’empereur Dèce. Il se présenta lui-même aux portes de la ville à ce magistrat, qui, après l’avoir tenté longuement par des promesses et des menaces, ordonna de le battre de verges et de le charger de chaînes. Un Ange délie miraculeusement ses liens ; il est alors brûlé avec des torches ardentes, puis suspendu, la tête en bas, au-dessus d’un feu allumé sous lui. Sa constance dans les tourments frappe d’admiration le greffier Anastase, et quand il le voit, une seconde fois délié par l’Ange, marcher, vêtu de blanc, au-dessus de la fumée, il croit en Jésus-Christ, et se fait baptiser avec sa famille par le bienheureux Prêtre Porphyre, en compagnie duquel il remporte, peu de temps après, la palme du martyre. Ramené devant le gouverneur, et inutilement sollicité d’abandonner la foi du Christ, Venant est jeté en prison. Le gouverneur envoie un héraut, nommé Attale, qui vient dire à Venant que lui aussi a été chrétien, mais qu’il a renoncé à ce titre, parce qu’il a reconnu la vaine illusion d’une foi en raison de laquelle les Chrétiens se privent des biens présents, dans l’espérance chimérique de biens futurs. Le noble athlète du Christ, qui connaît les ruses de notre perfide ennemi, repousse loin de lui ce ministre du démon. On le ramène donc devant le gouverneur : on lui casse toutes les dents et on lui brise les mâchoires, et, ainsi mutilé on le jette sur un fumier Mais un Ange vient encore le délivrer. On le fait comparaître de nouveau devant le juge, et celui-ci, à la voix de Venant qui parlait toujours tombe de son siège en s’écriant : « Le Dieu de Venant est le vrai Dieu ; renversez les nôtres ». A cette nouvelle, le gouverneur fit aussitôt exposer Venant aux lions ; mais contrairement à leur férocité habituelle, ces animaux se jetèrent à ses pieds. Pendant ce temps, le jeune homme enseignait au peuple la foi du Christ ; aussi fut-il éloigné et remis en prison. Le lendemain. Porphyre ayant raconté au gouverneur une vision qu’il avait eue pendant la nuit, et dans laquelle il avait vu Venant resplendissant de lumière baptiser le peuple, tandis qu’un brouillard épais couvrait le gouverneur, celui-ci, transporté de colère, donna l’ordre de lui trancher immédiatement la tête ; il commanda ensuite de traîner Venant jusqu’au soir par des lieux couverts d’épines et de chardons. On le laissa à demi-mort, mais dès le lendemain matin, il se présentait de nouveau devant le gouverneur, qui le fit aussitôt précipiter du haut d’un rocher. Arraché encore par miracle à cette mort, Venant fut traîné jusqu’à un mille de la ville par les plus rudes sentiers ; là les soldats ayant soif, Venant s’agenouilla sur une pierre qui se trouvait à proximité, dans une dépression du sol ; ayant tracé sur elle le signe de la croix, il en jaillit de l’eau. Il laissa sur cette pierre l’empreinte de ses genoux, ainsi qu’on peut le voir encore dans son église où elle est conservée. Touchés de ce miracle, plusieurs soldats crurent en Jésus-Christ. Le gouverneur leur fit trancher la tête ainsi qu’à Venant, sur les lieux mêmes. Aussitôt il y eut un orage et un tremblement de terre tels que le gouverneur prit la fuite ; mais il ne put se dérober à la justice divine, et il périt peu de jours après l’une mort très honteuse. Pendant ce temps, les Chrétiens ensevelirent à une place d’honneur le Martyr et ses compagnons, et leurs corps ont conservés jusqu’à ce jour, à Camérino, dans l’Église dédiée à Saint Venant.
Saint Félix de Cantalice Capucin († 1587)
Félix vit le jour à Cantalice, bourgade située au pied de l’Apennin. Dès le bas âge, il manifesta de telles marques de prédestination que ses compagnons l’avaient surnommé « le petit Saint ». Ses parents, qui étaient de pauvres laboureurs, l’employèrent de bonne heure à garder les troupeaux. Cette vie allait bien à l’âme méditative de l’enfant: peu enclin aux conversations oiseuses, il recherchait les lieux solitaires, et y répétait souvent le Pater et l’Ave et les quelques formules pieuses qu’on lui avait apprises. Lorsque les autres bergers se livraient au sommeil, lui s’agenouillait devant un arbre sur l’écorce duquel il avait gravé une Croix. À neuf ans, Félix passa au service d’un riche bourgeois qui lui confia d’abord la garde de ses troupeaux, puis le chargea du labourage de ses terres. Le jeune homme aima son nouvel emploi qui lui permettait d’assister tous les jours à la Messe avant de se rendre aux champs. Cet humble travailleur, sans instruction, qui n’avait fréquenté aucune école, avait beaucoup appris du Saint-Esprit. Comme il l’avouait plus tard, il ne connaissait que six lettres: cinq rouges et une blanche. Les cinq rouges étaient les cinq plaies du Sauveur, et la blanche était la Vierge Marie. Dieu lui inspira d’embrasser un genre de vie plus parfait. À un parent qui lui objectait les austérités de la vie religieuse, il répondit: « Je veux être religieux tout de bon ou ne pas m’en mêler ». Il alla frapper à la porte des Capucins. À la vue de ce paysan du Danube, le Père Gardien, voulant l’éprouver, lui dit: « Vous venez sans doute ici pour avoir un habit neuf et y vivre sans rien faire. Ou bien vous croyez que vous allez commander aux religieux comme vous commandiez à vos boeufs. Renoncez à ce projet et n’y pensez plus ». Mais le postulant répondit à ce compliment si humblement et si sensément que le terrible Gardien l’admit sur-le-champ. Devenu profès, le Frère Félix fut fixé au couvent de Rome avec les attributions de quêteur. Il resta quarante ans dans cet humble emploi, allant chaque jour, la besace sur le dos, pieds nus, et récitant son chapelet, quêter la subsistance de ses Frères. Les humiliations, comme les peines corporelles, étaient pour lui ses roses du Paradis; il ne craignait pas de s’appeler lui-même l’âne du couvent des Capucins. « Mais où est-il donc, votre âne? Frère Félix », lui demanda-t-on un jour. — « C’est moi! » répondit l’humble religieux. Dans sa vieillesse, le Cardinal protecteur de l’Ordre lui offrit de le faire décharger de ses fatigantes fonctions. « Monseigneur, répondit Félix, laissez-moi mon office de quêteur: un soldat doit mourir l’épée à la main, un âne sous sa charge, et Frère Félix sous sa besace ». La mortification allait de pair avec son esprit de pauvreté et d’humilité: il se privait même des satisfactions les plus légitimes, telles que de s’approcher du feu l’hiver. « Allons, Frère âne, disait-il à son corps, il faut que tu te réchauffes sans feu; car c’est ainsi que doivent être traitées les bêtes de somme… Loin du feu, Frère âne, loin du feu! C’est devant le feu que saint Pierre renia son Maître. » Après avoir achevé de le purifier par de douloureuses infirmités, patiemment supportées, Dieu rappela à Lui le Frère Félix, le 18 mai 1587.
Martyrologe
A Camerino, saint Venant martyr. Sous l’empereur Dèce et le préfet Antiochus, il eut la tête tranchée, et ainsi, âgé de quinze ans, il consomma son glorieux martyre, avec dix compagnons.
A Ravenne, l’anniversaire de saint Jean Ier, pape et martyr. Mandé par ruse en cette ville par Théodoric, roi arien d’Italie, il fut longtemps tourmenté en prison pour la foi orthodoxe et y termina sa vie. Sa fête se célèbre le 6 des calendes de juin (27 mai), jour où son corps, rapporté à Rome, fut inhumé dans la basilique de saint Pierre, prince des Apôtres.
A Spolète, saint Félix évêque, qui remporta la palme du martyre sous l’empereur Maximien.
A Héraclée, en Egypte, saint Potamion évêque, qui d’abord confessa la foi sous Maximien Galère, puis, sous l’empereur Constance et le préfet arien Philagre, reçut la couronne du martyre. Les Pères de l’église, saint Athanase et épiphane, ont fait l’éloge de ce saint homme.
En Egypte, saint Dioscore lecteur, contre lequel le gouverneur exerça toutes sortes de cruautés, jusqu’à lui arracher les ongles et faire brûler les flancs avec des torches; mais les exécuteurs effrayés par une lumière céleste, tombèrent à terre; Dioscore enfin fut brûlé avec des lames rougies au feu et consomma ainsi son martyre.
A Ancyre (auj. Ankara), en Galatie, saint Théodote martyr, et sept bienheureuses vierges et martyres : Thécuse tante de Théodote, Alexandra, Claudia, Faine, Euphrasie, Matrone et Julitte. Le préfet les livra d’abord à la prostitution, mais Dieu par sa grâce les préserva de tout outrage; elles furent ensuite plongées dans un marais, chacune avec une pierre au cou. Théodote recueillit leurs reliques qu’il ensevelit avec honneur; pour ce motif il fut arrêté, par ordre du préfet: cruellement déchiré et enfin percé d’un coup d’épée, il reçut la couronne du martyre.
A Upsala, en Suède, saint Eric, roi et martyr.
A Rome, saint Félix confesseur, de l’Ordre des Frères Mineurs Capucins, remarquable par sa simplicité évangélique et sa charité. Il a été inscrit au nombre des saints par le souverain pontife Clément XI.
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