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Le projet de loi « immigration de Darmanin prévoit une régularisation massive des clandestins

Gérard Darmanin face à la motion de rejet sur la loi "immigration"
Gérard Darmanin face à la motion de rejet sur la loi « immigration »

Le projet de loi « immigration » a été écarté par une motion de rejet votée par les groupes politiques de gauche, insoumis, socialistes, écologistes et communistes, par Les Républicains (LR) et par le Rassemblement National (RN). Pourtant, les forces de l’opposition sont divisées sur ce projet. Décryptage de ce 30e projet de loi sur l’immigration depuis 1980.

La loi « immigration » est conçue avant tout pour soulager les « métiers en tension »

La loi « immigration » est le projet le plus abouti de régularisation massive de clandestins depuis 25 ans. Marc Vanguard sur Twitter en a fait une synthèse rigoureuse :

« Conçue avant tout pour soulager les « métiers en tension », elle comprend aussi quelques mesures qui durciront légèrement les conditions d’immigration. »

Quatre aspects du projet de loi sont à retenir que Vanguard décrypte sur twitter :

« la régularisation des travailleurs clandestin ; la facilitation de certaines immigrations ; des mesures ‘de fermeté’ ; es ajustements marginaux. »

1er aspect : la régularisation

« Régularisation : la loi « immigration » est en grande partie une loi « régularisation ». Les immigrés illégaux qui résident en France depuis au moins 3 ans et travaillent dans un métier « en tension » obtiendront une carte de séjour d’une durée d’un an (Article 4bis). Cette vague de régularisations, dont personne n’a encore estimé l’ampleur, durerait 2 ans, jusqu’à fin 2026 (date de fin de validité de l’article).

2e aspect : la facilitation de certaines immigrations

« Facilitation de certaines immigrations : le projet de loi entend faciliter l’immigration économique et simplifier la procédure d’asile. 4 mesures emblématiques ci-dessous : une nouvelle carte de séjour est créée pour les pharmaciens et médecins ; une autre carte est créée pour les étrangers justifiant d’un « projet économique innovant » ; le gouvernement est sommé de plancher sur un projet de visas économiques accordés de manière facilitée pour les ressortissants des pays de l’Organisation Internationale de la Francophonie (carte ci-dessous) ; des « espaces France Asile » seront créés pour réunir en un même lieu tous les services liés aux procédures d’asile, et ainsi faciliter la prise en charge des demandes.

3e aspect : des mesures ‘de fermeté’ en trompe-l’œil

« Des mesures ‘de fermeté’. Le groupe Les Républicains au Sénat a largement contribué à insérer quelques mesures réclamées de longue date par la droite, et qui permettront quelques progrès sensibles dans le contrôle de l’immigration : le versement de certaines allocations (prestations familiales, etc.) est conditionné à une durée de séjour régulier d’au moins 5 ans en France ; le délit de séjour illégal est rétabli, et est désormais puni de 3750€ d’amende ; 10 ans de résidence et non plus 5 seront requis pour être éligible à une naturalisation, en ligne avec nos voisins européens (cf ci-dessous). Mais des exceptions demeurent. Ex : avoir fait 2 ans d’études en France ramène le délai à 2 ans et non 10 !

« L’article 1A introduit l’obligation d’un débat parlementaire annuel sur la politique d’immigration. Principale implication : le Parlement déterminera à horizon 3 ans un quota de titres de séjour à accorder par catégorie de titre. Ces débats parlementaires seront intéressants ! L’aide au développement est désormais conditionnée à la lutte contre l’immigration irrégulière. Un moyen de mettre la pression sur les pays accordant trop de peu de « laissez-passer consulaires » pour permettre les expulsions des étrangers sous OQTF. Des visas pourront être refusés aux ressortissants de ces pays peu coopératifs dans la lutte contre l’immigration illégale, en mesure de rétorsion.

« Arrêtons-nous quelques secondes sur l’expulsion des délinquants et criminels étrangers, un volet majeur de la « loi immigration ». Aujourd’hui, un étranger présent depuis 10 ans en France ne peut être expulsé que s’il a été condamné à une peine de prison de 5 ans. Désormais… … un étranger condamné pour des infractions punies de 3 ans d’emprisonnement pourra être expulsé, même s’il est présent depuis 10 ans en France. Encore faut-il arriver à l’expulser, ce qui n’arrive que dans 7% des cas depuis 2020, mais c’est un autre sujet !

« Par ailleurs, de nombreuses exceptions demeurent : mineurs, étrangers ayant résidé « habituellement » en France avant l’âge de 13 ans, étrangers mariés avec un conjoint français depuis au moins 4 ans, etc. (Article 9).

« En fin de compte, Gérald Darmanin prévoit 4000 expulsions annuelles supplémentaires. Ce qui paraît très faible par rapport aux 14 500 expulsions annuelles appliquées sous F. Hollande (vs ~10 000 en 2022) et aux 70 000 étrangers condamnés par la justice chaque année.

4e aspect : des ajustements marginaux

« Des ajustements marginaux. Le projet de « loi immigration » regorge de petites mesures, souvent de bon sens, qui sont tantôt des rustines sur des situations ubuesques, tantôt des mesures symboliques.

« 10 brefs exemples :

« – il sera désormais possible de refuser un titre de séjour à un étranger n’ayant pas respecté une OQTF. Était-ce vraiment impossible jusqu’à présent ?
« – Il sera possible aussi, moyennant une « décision motivée », de refuser une carte de séjour à un étranger s’il a commis certaines infractions. Comme par exemple la traite d’êtres humains avec torture et actes de barbarie (!) ?
« – Jusqu’à présent, les clandestins pouvaient bénéficier d’une remise de 50% sur les titres de transports en commun, sous conditions de ressources (!). Ce ne sera plus le cas.
« – Jusqu’à présent, si un étranger était expulsé plusieurs fois du territoire, il pouvait toucher plusieurs fois une aide financière au retour. Cette aide éventuelle ne pourra désormais être donnée qu’une seule fois (article 14D).
« – Jusqu’à présent, n’importe quel étranger venant d’arriver en France en situation régulière bénéficie d’un droit au logement opposable (loi DALO promulguée sous Chirac). Les étrangers hors UE devront désormais résider 5 ans en France pour en bénéficier.
« – Les officiers de police judiciaire pourront désormais fouiller des véhicules particuliers pour s’assurer qu’ils ne transportent pas de clandestins. Mais uniquement sur des aires d’autoroute ou bien à moins de 20km d’une frontière, et seulement s’il y a un soupçon étayé.
« – Un étranger pouvait acquérir la nationalité 4 ans après mariage avec un conjoint français, ce sera désormais 5 ans. De même, le séjour requis pour faire valoir le droit au regroupement familial est rallongé de… 6 mois (!)
« – Le regroupement familial sera conditionné par une connaissance « élémentaire » de la langue française. Un principe peu révolutionnaire, puisqu’il avait été établi par Brice Hortefeux sous Sarkozy, cf article R311-30-2 (abrogé sous Hollande).
« – De nombreuses modifications sont de l’ordre du cosmétique, exemple ici avec une répétition du mot « et » dans le code du séjour, remplacée par une virgule.


« – L’aide directe ou indirecte, commise en « bande organisée », au séjour irrégulier d’un étranger en France était jusqu’à présent sanctionnée de 10 ans de prison (si, si !). Ce sera désormais 15 ans. »

En conclusion, c’est une loi pour régulariser les clandestins bien plus que pour les arrêter d’envahir la France. Un trompe-l’œil grossier !

Francesca de Villasmundo

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