Il n’y a pas pire ignorant que celui qui croit savoir. L’emblématique professeur de philosophie mondaine Michel Onfray, faisait paraître dans le Point du 10 janvier 2015, les lignes suivantes : « Charlie-Hebdo est, avec Siné-Hebdo ou le Canard Enchaîné, l’honneur de la presse : car un journal satirique n’épargne rien ni personne, et c’est tant mieux. Ce sont des supports libres parce qu’ils vivent de la fidélité de leurs lecteurs. Sans publicité, ils n’ont aucun riche annonceur à ménager, aucun actionnaire à flatter, aucun propriétaire milliardaire à satisfaire. Ils ne roulent pour aucun parti, aucune école, aucune chapelle : au sens étymologique, ils sont libertaires ». Comment peut-on énoncer autant de faussetés en aussi peu de mots ? Car à l’instar de la méga industrie hollywoodienne de l’imaginaire, Charlie Hebdo ne produit pas du simple « divertissement » mais du gros argent et de l’idéologie. Il s’agit tout à la fois d’un établissement strictement commercial et d’un vecteur de virulente propagande contra civilisationnelle. Rien d’incompatible à cela dans un monde où l’on se repaît volontiers de l’image de sa propre déchéance.

La course à l’abîme des lemmings ordinaires

Une situation par conséquent à l’exact inverse de ce qu’en dit l’athéiste Onfray. On voit combien ce beau parleur eût mieux fait de se taire. Est-il simplement ignorant, stupide ou complice ? Mais son cas est archétypique de la tyrannie de l’opinion, la doxa, qui parle sans savoir et surtout sans chercher à savoir. Ce qui flotte dans l’air du temps se cristallise dans les idées et les mots d’ordre qui ont fait se rassembler dimanche 11 janvier à travers l’Hexagonie six millions de lemmings…, vous savez ces hamsters nordiques qui, à un mystérieux signal, se regroupent en masses innombrables pour aller se jeter dans l’abîme !

Terminons en maintenant avec les clichés enfilés comme des perles par le sieur Onfray… et qui nous en disent long sur les intellocrates de notre temps, déspiritualisés à mort et fiers de l’être : « Sur les religions en général, et l’islam en particulier, cette presse dit tout haut avec humour, ironie ou cynisme, ce que beaucoup pensent tout bas. La satire leur permet de dire ce que le politiquement correct de notre époque interdit de faire savoir. En ouvrant les pages du journal, on pouvait se lâcher et rire d’autant plus joyeusement que, sur les questions de religion, dans le restant de la presse, on peut crucifier le chrétien, c’est même plutôt bien porté, mais il faut épargner les rabbins et les imams. À Charlie, la soutane, la kippa et la burka sont également moquées »… Pour ne pas conclure, Onfray étant une valeur sûre : « trois hommes peuvent, avec chacun une kalachnikov et un lot de trois voitures volées, décapiter un journal, mettre la France genoux, montrer notre pays saigné à la planète entière, décimer le génie du dessin satirique français ».

La fine fleur de la presse française...
La fine fleur de la presse française…

Le philosophe bien en cour voudrait donc nous faire croire que l’ordure érigée en bel art par les laborieux gribouilleurs de Charlie s’adressait également aux trois monothéismes… c’est évidemment archi-faux. Si de temps à autre un religieux en papillotes était épinglé, c’est en contrepoint, pour donner le change, nul n’était dupe. Donc M. Onfray pouvait « se lâcher et rire » à gorge déployée au vu de ces caricatures de caricatures quintessence du « génie du dessin satirique français ». C’est là le jugement d’un connaisseur qui donne la mesure de son bon goût… Mais peut encore parler de bon et de mauvais goût à l’heure actuelle ? À une époque où il est devenu de bon ton d’exhiber les recoins les plus obscurs de son anatomie et de considérer comme de l’esprit – un terme obsolète qui a précédé celui d’humour – la scatologie la plus grasse ? Époque d’où les mots de décence, d’amour-propre, de pudeur, de réserve, d’ironie ont totalement été bannis.

Charlie hebdo

Non M. Onfray, on ne riait pas à Charlie également des trois monothéismes. La Catholicité et et l’Islam étaient les cibles privilégiées des traits les plus orduriers… et il ne s’agissait évidemment pas seulement de faire « rire joyeusement ». Une gaieté de bien mauvais aloi dont vous devriez avoir honte… à moins bien que vous ne parliez sans savoir, pour ne rien dire, pour faire le beau consensuel. Non M. Onfray, hélas pour vous, les crayonneurs de Charlie ne disaient ce « que le politiquement correct de notre époque interdit de faire savoir ». Ces gens étaient l’expression incarnée d’une « correction politique » qui ne cesse depuis près de deux siècles d’évincer et de détruire cette cathédrale de la spiritualité qu’est encore le catholicisme – et au-delà toute forme de transcendance transgressant les lois noahides car considérée comme idolâtrie – par tous les moyens à commencer par cette mystification qui s’appelle la « liberté d’expression ». Liberté qui vaut pour les uns mais par pour les autres 1.

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Charlie Hebdo tombait évidemment sous le coup de la loi pour incitation à la haine raciale, pour discrimination eu égard à une appartenance religieuse, et partant pour trouble à l’ordre public. En d’autres circonstances, comme à Nantes le 13 décembre 2013, il en a fallu beaucoup moins pour qu’un autre humoriste ne soit interdit préventivement de représentation, c’est-à-dire avant commission de tout acte délictueux ! La liberté d’expression ce jour-là à fait l’objet d’un arrêt d’urgence et de circonstance du Conseil d’État pour sanctionner de la façon la plus partiale et anticonstitutionnelle. Une chimère juridique et une forfaiture que se sont bien gardés de dénoncé les Charlie et leurs affidés de l’intelligentsia prétendument dissidente façon Onfray.

Panurgisme suraigu

Qui ne connaît l’histoire des moutons de Panurge 2 ? Ce dernier ayant jeté un bélier par-dessus le bordage d’un navire, le troupeau en bêlant se jeta à sa suite. Pour ceux qui ne tombent pas à la mer, la fin est parfaitement connue. Ils finissent à l’abattoir. Ceci vaut aussi et plus encore pour les bipèdes. Nous vous renvoyons à la lecture de Céline « L’École des cadavres » qui suit d’un an « Bagatelles pour un massacre » paru en 1937, des textes prémonitoires toujours d’actualité… ceci sans vouloir « désespérer Billancourt » ! Spécialement nos chers compatriotes qui se sont rassemblés le dimanche 11 janvier 2015… dans la peur et la dignité

Non pour approuver l’humour très particulier des caricaturistes de Charlie Hebdo qui ont été exécutés par des Fous d’Allah – ou supposés tels puisqu’ils ne sont plus là pour confirmer ou démentir – mais pour défendre la liberté d’expression identifiée avec la Liberté adornée d’un grand L. Parce que 99% d’entre les six millions – chiffre estimé, non vérifié – qui défilaient le 11 janvier ne doivent avoir qu’une connaissance très vague, voire nulle, de la production humoristique à vocation commerciale – oui, oui, commerciale : les commanditaires industriels et les sponsors financiers de nos zartistes méprisaient peut-être le peuple mais pas l’artiche 3 ! – des malheureuses victimes de la barbarie. C’est donc en faveur d’une soi-disant liberté d’expression – et à travers elle notre Liberté chérie – menacée par la charia, que des centaines de milliers de braves gens sont allés arpenter le pavé de nos cités … Liberté qui mériterait, si nous avions le loisir, d’être précisément scannée pour voir ce qui se cache sous le velours du mot…

Salut public et liberté chérie

En fait, tous ont répondu à une sorte d’appel au salut public : la République est en danger, serrons les rangs, tous derrière Hollande et sa clique… moins le quart des nationalitaires composant la pays, ceux-ci n’étaient pas conviés… des moutons noirs qui ont vu et dénoncé le danger protéiforme multicausal depuis belle lurette ! Une exclusion des nationaux pour le moins paradoxale lorsqu’on en appelle à l’Union sacrée. Que l’on brandit le méga principe d’Égalité et de « liberté d’opinion » c’est-à-dire le droit permanent et absolu à l’ordure systémique, à l’insulte exclusivement centrée sur la Catholicité et l’Islam, sans recours d’aucune sorte pour la victime puisqu’il s’agit d’humour ! Paradoxal donc que ces pudeurs, ces « cachez ce sein, ce Front, que nous ne saurions voir4 » quand on prend fait et cause pour un magazine tiré des sentines et dont « les couvertures étalent [sans vergogne] la provocation à la haine et à la discrimination » prélude à « des pages choquantes où l’obscénité et la méchanceté rivalisaient pour… quoi, pour qui ? » nous dit l’universitaire catholique de gauche Maria Poumier. Oui, un magazine profondément étranger aux valeurs dites républicaines que prétendent défendre ses protecteurs institutionnels. Mais la contradiction entre le républicanisme affiché et revendiqué et le rejet viscéral, obscène de la droite dite nationale, n’est qu’apparente parce qu’il faut aller plus loin que la surface des incohérences… Car si « depuis longtemps Charlie avait perdu la plupart de ses lecteurs, révulsés par ce côté ignoble déboussolé ». Il devient dès lors urgent de s’interroger sur ce qui motivait souterrainement la place dans le paysage médiatique d’un magazine pratiquant extensivement le terrorisme intellectuel… « Charlie était aux ordres d’une organisation criminelle et subventionnante, souhaitant vivement l’avènement de la guerre civile entre Français ? » !

Car « depuis que le porno est devenu la religion officielle, et le cynisme féroce du marketing le dessous chic des entreprises gouvernementales comme des autres, nul n’avait plus besoin des couvertures de Charlie ». Ce pourquoi il serait ultimement opportun de découvrir si « les assassins étaient des paramilitaires entraînés, qui avaient reçu des ordres. L’ordre de dire qu’ils représentaient une mouvance précise, comme pour se donner une identité, tandis que d’autres étaient prévus pour accomplir d’autres massacres, pour compléter l’effet de série bien orchestrée ; et ils avaient reçu probablement d’autres consignes qui étaient des pièges : aucun complice pour protéger leur fuite, ils ont dû comprendre assez vite qu’ils avaient été proie et non pas prédateurs comme ils le croyaient, que le scénario secret avait besoin d’eux dans le rôle d’assassins jetables, comme cela avait été le cas pour Mohamed Merah, sans plus ».

Quant aux « commanditaires ? Ceux qui veulent la guerre civile en France, pour l’affaiblir ; pour que l’Europe ne soit pas tentée de tourner le dos à l’alliance transatlantique, ou de retrouver du prestige moral avec un minimum de résistance au programme de nettoyage ethnique d’Israël, pour que François Hollande n’ait pas le temps de redresser la barre après le désastre diplomatique laissé par Laurent Fabius. Le scénario ressemble à celui du Maïdan à Kiev, avec ses mystérieux snipers tirant sur la foule pour susciter le « combat de chiens », pour exciter les uns contre les autres, musulmans contre tout le reste, et chacun contre son voisin »… Maria Poumier 8 janvier 2015.

Une guerre programmée de destruction sociétale

Citation : « La presse traditionnelle s’est ruée sur le morceau de viande encore chaud pour nous parler d’attentats islamistes perpétrés au nom du prophète musulman. Des vidéos toutes plus choquantes et racoleuses les unes que les autres ont déferlé sur tous les sites d’information mainstream, créant une ambiance de terreur et de paranoïa. Tentons si vous le voulez bien de prendre de la hauteur et de regarder cet événement à froid… enfin, à tiède » 5.

La liberté de penser est, on l’aura bien compris, uniquement réservée à ceux qui partagent sans réserve les idéo-virus inculqués et acceptés par les masses panurgiques. Puisque médias et politiques nous ont seriné que nous sommes en guerre contre les terroristes islamistes, cela doit être vrai, marchons, marchons, qu’un sang impur abreuve nos sillons… ! Resterait à comprendre que le colossal non-dit qui se cachait aux creux des foules. Le pays s’est en effet cabré, à l’instar des populations allemandes, devant la menace que fait courir à la communauté nationale, et non à la liberté de blasphémer des gens de Charlie, mais bien face aux déferlantes d’invasion migratoire. Bref l’inconscient collectif, traduit en langue vulgaire, est descendu dans les rues non parce qu’il était « Charlie » mais parce que le surmoi caché des foules est convaincu en vérité que « les arabes nous attaquent » ! Resterait à démontrer que le danger premier et prioritaire vient bien de là et non des naufrageurs de l’économie, du parti de l’Étranger aux commandes, des idéocrates propagandistes, fourriers de la guerre et pourrisseurs des mœurs, démolisseurs de la famille et des vraies solidarités sociales. Parce qu’enfin, si les djihadistes pullulaient autant qu’on veut nous le faire croire, pourquoi, avec un très maigre service d’ordre, n’y a-t-il pas eu le moindre incident le dimanche 11 janvier ? C’était pourtant l’occasion ou jamais ! Pas de voiture meurtrière fonçant sur la foule, pas de moudjahid actionnant sa ceinture d’explosif, pas plus qu’il n’y eut de contrôle à la sortie des bouches de métro ! Les autorités semblent avoir été bien sûres d’elles-mêmes en ce jour de tous les dangers potentiels, à croire qu’elles savaient que le risque était inexistant ? Et certes la menace est ailleurs, dans les guerres, civiles ou extérieures, que nous concocte l’hyperclasse apatride et internationaliste afin de nous domestiquer totalement et définitivement. C’est en cours !

Calme plat après la tempête

Bref, personne n’a bougé, les banlieues ne se sont pas soulevées. Au contraire tout le monde a serré les fesses, parce que les plus excités des jeunes savent bien que de tels accidents ne présagent rien de bon. Et pour personne. Les Algériens ont tous en mémoire les années quatre-vingt-dix quand le GIA faisait régner la terreur, la vraie avec des villages entiers égorgés au cours d’une seule nuit. Des monceaux de cadavres à nos portes qui à l’époque laissait indifférent cette Communauté internationale (réduite aux acquêts euratlantistes) qui se lamente maintenant et se griffe le visage… Soyons sérieux un instant, la réalité est peut-être un peu plus compliquée, non ? En tout cas craignons les conséquences de la tuerie de chez Charlie. Les suites risquent d’être beaucoup plus tragiques que le drame lui-même qui n’aura été qu’un détonateur et le précurseur d’événements à venir appelés à s’enchainer de façon implacable. Raison pour laquelle la plupart des chefs de gouvernement présents le 11 avaient fait le déplacement. Non pour les petits fours de l’Élysée et le battage de pavés, mais pour se concerter, négocier plu sou moins, pour comprendre là où ces événements et leurs promoteurs inconnus veulent nous emmener.

Quelques-uns supputent les risques de guerre civile. D’autres d’une guerre tout court. En tout cas des années de plomb nous attendent à l’instar de l’Amérique après le 11 Septembre lorsque les libertés, au nom de la Liberté, ont fondu comme neige au soleil sous l’effet des Patriot Act I et II. Et ce ne sont pas les individus les plus dangereux qui seront le plus en butte à la vigilance administrative, mais bien les gens ordinaires coupables désignés dès lors qu’ils s’écarteront un tant soit peu de la norme imposée. Fin d’une liberté d’expression qui aura été l’apanage exclusif des pornocrates de Charlie hebdo, lesquels pouvaient ou croyaient pouvoir tout se permettre, en toute impunité, en se plaçant aux avant-postes de la grande déconstruction sociétale. Ne perdons cependant pas de vue qu’ils ont été eux également victimes d’un système qui les a encouragés, incités à la débauche intellectuelle et qui finalement les a, directement ou indirectement, sacrifiés pour de noirs desseins… lorsque leur utilité commençait à s’estomper mais que leur disparition pouvait encore servir. De sombres perspectives invisibles ou inaccessibles au commun des mortels, mais transparentes aux initiés.

Notes

(1) Si Charlie œuvre au fond d’une fosse septique, cette tendance est aussi celle de Pierre Bergé actionnaire du Monde. Un milliardaire intouchable qui s’était permis de twitter le 17 mars 2013 : « Vous me direz, si une bombe explose le 24 mars sur les Champs à cause de la Manif pour tous, c’est pas moi qui vais pleurer »(lemonde.fr27mars13). Pour ce propos, le triste sire ne tombe-t-il pas sous le coup de la loi pour apologie de terrorisme avec à la clef sept ans de privation de liberté et 200.000 € d’amende ? Essayez un peu de dire la même chose à propos du 7 décembre. Surtout sachant que le parquet a d’ores et déjà engagé des procédures – à commencer par Dieudonné M’Bala M’Bala – pour des messages similaires diffusés sur les réseaux sociaux en hommage posthume aux tueurs de la rue Nicolas Appert et de la porte de Vincennes.

(2) L’une des figures de proue de François Rabelais, familier du géant Pantagruel. L’épisode est tiré du Quart Livre.

(3) Un ancien de Charlie, Olivier Cyran, réglait ses comptes le 5 Décembre 2013 après la publication dans Le Monde, le 20 novembre précédent, d’une tribune signée Charb et Fabrice Nicolino « Non, Charlie Hebdo n’est pas raciste »… Or, dixit Nicolino, un homme qui connaît son monde : « à Charlie Hebdo, il a toujours été de bon ton de railler les “gros cons” qui aiment le foot et regardent TF1 »… Ceux-là même qui en France défilaient dimanche 11 janvier 2015. Un extrait complémentaire : « Je me souviens de cette pleine page de Caroline Fourest parue le 11 juin 2008. Elle y racontait son amicale rencontre avec le dessinateur néerlandais Gregorius Nekschot, qui s’était attiré quelques ennuis pour avoir représenté ses concitoyens musulmans sous un jour particulièrement drolatique. Qu’on en juge : un imam habillé en Père Noël en train d’enculer une chèvre, avec pour légende : « Il faut savoir partager les traditions »… Racisme fétide ? Allons donc, liberté d’expression ! ».

(4) Molière « Tartuffe ».

(5) quenelplus.com7janv15

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