Frédéric Mortier est professeur d’économie depuis 27 ans dans un lycée privé catholique d’Angers. Pendant deux ans, il a aussi œuvré en tant que directeur d’un établissement à caractère social de la Fondation d’Auteuil auprès d’enfants en difficulté. Il est également depuis 2008 le maire de Longué-Jumelles, commune rurale d’environ 7.000 habitants, et président de communauté de communes.
Avec un tel profil, jamais ce père de famille n’aurait imaginé se retrouver dans le tourbillon qui l’a conduit deux fois en garde à vue puis au tribunal, subissant une suspension de son traitement d’enseignant depuis deux ans.
Quel crime horrible aurait donc commis cet homme, vous demandez-vous probablement. Il a tout simplement eu le malheur de se permettre une simple boutade en classe.
Cette incroyable et tragique histoire débute le 1er décembre 2021. Frédéric Mortier donne cours à une classe d’ASS-A composée de 24 filles et 1 garçon que cette filière professionnelle forme aux métiers de l’accompagnement et des soins et services à la personne. Frédéric Mortier débute son cours par un rappel historique : le droit, tel qu’il a été pensé dans nos Etats modernes, est intimement lié au christianisme. Il appuie sur le rôle important joué par l’enseignement catholique dans la transmission des valeurs occidentales et souligne que les religieux étaient très nombreux, il y a quelques décennies encore, à être en charge de l’instruction. Et il tente de faire comprendre qu’il y a cinquante ans à peine, la grande majorité des élèves assumait une culture catholique, à l’image de la société française. Rappelons que Frédéric Mortier tient ces propos dans un lycée privé catholique. Mais ces simples constats d’une grande banalité créent un brouhaha dans la classe et entraînent des remarques défiantes d’élèves. Le seul garçon de la classe, musulman, est pressé par plusieurs filles de réagir. Croyant détendre l’atmosphère par une boutade, Frédéric Mortier lâche à l’élève : « Ah mince, c’est un problème, il va falloir que tu deviennes catholique ».
Aussitôt, tout s’envenime. L’élève prend un air menaçant, se lève, force le passage et quitte la classe sans que Frédéric Mortier parvienne à le retenir. Le lendemain, 2 décembre, cet élève et ses parents portent plainte contre l’enseignant. Le surlendemain, 3 décembre, c’est l’enseignant qui porte plainte contre l’élève.
Tout s’enchaîne très vite. Le 9 décembre, Frédéric Mortier est convoqué au commissariat de police et découvre que trois chefs d’accusation l’attendent : provocation publique à la discrimination en raison de la religion, harcèlement d’une personne suivi d’incapacité n’excédant pas 8 jours : propos ou comportements répétés ayant pour objet ou effet une dégradation des conditions de vie altérant la santé et, enfin, dénonciation mensongère à une autorité judiciaire ou administrative ayant entraîné des recherches inutiles. C’est la première garde à vue ! Déféré devant le procureur de la République, sous bonne escorte policière, Frédéric Mortier, honnête père de famille sans histoires, s’entend dire par une femme vice-procureure : « Vous êtes un homme dangereux, monsieur Mortier ».
Ce témoignage bouleversant est celui d’une descente aux enfers. Pour une boutade sans méchanceté. Dans un pays où la parole d’un enseignant, qui plus est un notable – Frédéric Mortier est le maire de sa commune – , a désormais moins de poids que celle d’un élève. Le directeur diocésain va dire à Frédéric Mortier qu’il ne fallait plus jamais parler d’évangélisation ! Du reste, Frédéric Mortier est suspendu. Les médias vautours entrent en scène, de même que les associations vampires.
Cette expérience douloureuse et inachevée vécue par Frédéric Mortier fait comprendre à quel point le métier d’enseignant consiste aujourd’hui à traverser un champs de mines dans une société atteinte de folie masochiste.
L’honneur d’un enseignant, Frédéric Mortier, éditions Artège, 130 pages, 12,90 euros
A commander en ligne sur le site de l’éditeur
Cet article vous a plu ? MPI est une association à but non lucratif qui offre un service de réinformation gratuit et qui ne subsiste que par la générosité de ses lecteurs. Merci de votre soutien !