L’adoption d’un projet de résolution portant sur le massacre de Srebrenica, présenté par le Royaume-Uni lors de la session du Conseil de sécurité des Nations unies du 8 juillet, fut finalement avortée suite au veto de la Fédération de Russie. Aussi, les commémorations de cette tragédie s’étant déroulées il y a plus d’une semaine, il est désormais plus opportun de tirer les enseignements des événements qui ont précédé et entouré cet échec cuisant des Occidentaux dans leur volonté de salir, une nouvelle fois, l’honneur du peuple serbe.

Le projet de résolution : un texte partial et déséquilibré révélant des intentions malhonnêtes

Dès l’annonce de sa préparation par les officiels britanniques, ce projet de résolution, qui visait officiellement à commémorer le « génocide » de Srebrenica ainsi que les victimes des guerres yougoslaves et à encourager la réconciliation des nations concernées par ces événements tragiques, a déclenché une véritable polémique aussi bien en Serbie qu’en République serbe de Bosnie-Herzégovine. En effet, le texte, soutenu dès le départ par les États-Unis, la France, l’Allemagne et les Pays-Bas, était loin de faire l’unanimité, que ce soit au sein de la classe politique ou au sein de la population serbe et bosno-serbe. Deux raisons principales expliquaient ces réticences et posaient le doute sur les réelles intentions de la partie britannique : l’emploi du terme « génocide » pour qualifier le massacre de Srebrenica et l’absence de mention explicite des victimes serbes ayant péri durant les mois précédant cet événement.

Tout d’abord, le choix d’employer le terme de « génocide » n’était pas anodin car cette qualification juridique du massacre de Srebrenica, bien qu’elle fut entérinée par des jugements du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY, en 2004) et de la Cour internationale de Justice (CIJ, en 2007), ne fait pas consensus aussi bien parmi les juristes qu’au sein de la société civile, non seulement en Serbie et en Republika Srpska mais également à l’étranger. Ainsi, selon certains experts et observateurs avertis, se basant sur la version des faits retenue par les Bosniaques, la justice internationale et les pays occidentaux[1][2], les événements de Srebrenica, tout horribles qu’ils soient, ne constituent pas un génocide mais plutôt un crime de guerre comme il en existe des dizaines d’exemple dans chaque conflit armé. C’est d’ailleurs là la position officielle des gouvernements serbe et bosno-serbe qui considèrent le massacre de Srebrenica comme un crime de guerre grave et non pas un « génocide », au grand dam des autorités et de la population bosniaques.

Ensuite, le fait de ne pas mentionner explicitement les victimes serbes n’était encore une fois pas innocent et entrait en contradiction directe avec les intentions affichées par les Britanniques de rendre hommage à toutes les victimes. En effet, les événements de Srebrenica ont été précédés par des massacres de populations – hommes, femmes et enfants – par des troupes de l’armée bosniaque, commandées par Naser Orić, dans les villages serbes entourant cette enclave bosniaque. Il est ainsi question de plusieurs centaines de victimes serbes dont les bourreaux n’ont jamais été jugés ni par la justice internationale, hormis le susmentionné Naser Orić qui fut acquitté en appel par le TPIY en 2008, ni par la justice bosnienne[3]. Sans remettre en question la commémoration légitime des victimes bosniaques, les autorités serbes et bosno-serbes ne pouvaient accepter que les victimes serbes soient éludées de la sorte.

Ainsi, au vu de ces éléments, le projet de résolution dans sa version définitive[4] apparaissait avant tout comme un moyen d’imposer au monde entier, via l’organisation internationale la plus importante, le story-telling retenu par les Occidentaux et la justice internationale. Compte tenu du contexte particulièrement sensible dans lequel ce projet est apparu – à la veille du 20ème anniversaire du massacre – et des conséquences potentiellement néfastes pour la stabilité d’une région où les questions mémorielles restent un sujet de discorde entre les peuples, on peut s’interroger légitimement sur les motifs réels du Royaume-Uni et, par extension, des pays occidentaux. D’autant plus que les relations entre Belgrade et Sarajevo étaient en phase d’amélioration depuis l’entrée en fonction du Premier ministre Aleksandar Vučić. D’ailleurs, les premières conséquences de ce texte polémique ont fait surface quelques jours après l’annonce de la préparation de ce projet de résolution avec le report d’une visite officielle à Sarajevo du président serbe, Tomislav Nikolić, en raison de l’opposition du membre bosniaque de la présidence de Bosnie-Herzégovine[5], Bakir Izetbegović[6].

Motifs politiques, poursuite de la diabolisation des Serbes et hypocrisie occidentale

Ainsi, il est difficile pour tout observateur averti des Balkans de ne pas voir dans ce projet de résolution une manœuvre politique visant à mettre en difficulté la classe dirigeante de Serbie et de Republika Srpska. En effet, ces dernières sont perçues pour diverses raisons comme des acteurs problématiques dans la région des Balkans de l’Ouest car encore trop retorses au diktat occidental.

Le gouvernement serbe se trouve en effet sous pression occidentale dans de nombreux dossiers dont certains retardent l’ouverture des premiers chapitres des négociations d’adhésion à l’Union européenne : normalisation forcée des relations avec le Kosovo indépendant, réconciliation artificielle avec l’Albanie malgré les humiliations récentes subies par la Serbie de la part du Premier ministre albanais Edi Rama, distension contrainte des liens fraternels avec la Republika Srpska au profit des autorités fédérales de Bosnie-Herzégovine, alignement incomplet sur la politique étrangère de l’UE, notamment en matière de sanctions contre la Russie, refus d’intégrer l’OTAN… Aussi, la tragédie de Srebrenica fut-elle utilisée par les capitales occidentales, au premier rang desquelles Londres, Washington et Berlin, pour accentuer cette pression mais aussi rappeler une nouvelle fois à Belgrade qu’en tant que seul et unique perdant des guerres yougoslaves, une inféodation intégrale était attendue de sa part, d’autant plus dans la perspective d’une adhésion de la Serbie à l’Union européenne.

Quant à la Republika Srpska, son manque d’enthousiasme vis-à-vis de la perspective européenne de la Bosnie-Herzégovine, son opposition farouche à une adhésion à l’OTAN, ses velléités irrédentistes ainsi que sa proximité avec la Serbie et la Russie, autant de positions défendues énergiquement par son président Milorad Dodik, justifiaient aux yeux des Occidentaux un rappel à l’ordre. En effet, plus encore que dans le cas de la Serbie, la question du massacre de Srebrenica est un sujet particulièrement sensible en Republika Srpska et il est évident que cette résolution, si elle avait été votée par le Conseil de sécurité, aurait placé cette entité dans une position difficile au sein de la Bosnie-Herzégovine. A noter également que l’affaiblissement du leadership politique de Republika Srpska est nécessaire aux Occidentaux, du point de vue géopolitique, dans la perspective d’une évolution de la Bosnie-Herzégovine vers un État unitaire[7] où les Bosniaques, majoritaires et très favorables à leurs parrains occidentaux, joueraient les premiers rôles.

Au-delà de ces motifs politiques et géopolitiques contemporains, on peut également interpréter ce projet de résolution comme la poursuite du travail de désinformation débuté par les Occidentaux au début des années 90 visant à diaboliser les Serbes[8] et à en faire les uniques responsables des guerres qui ont déchiré les pays yougoslaves durant cette terrible décennie, leur ôtant par là même le statut de victimes dont les autres nations jouissent encore aujourd’hui sans entrave. Rappelons que cette stratégie de diabolisation du peuple serbe avait pour but de légitimer, auprès des opinions publiques et des instances internationales, le soutien apporté par les pays occidentaux aux nations séparatistes dont les revendications furent instrumentalisées afin de provoquer l’éclatement de la Yougoslavie pour des raisons diverses (principalement politiques, économiques et géostratégiques)[9]. Aussi, avec la tragédie de Srebrenica, présentée par l’Occident comme le summum de la barbarie des Serbes, ces derniers avaient acquis une nouvelle caractéristique, après celle d’agresseurs et de nettoyeurs ethniques, celle de peuple génocidaire. Ainsi, comme nous l’avons évoqué plus haut, le projet de résolution britannique de par son contenu perpétuait clairement cette narration des événements développée par les dirigeants occidentaux et distillée dans le monde entier par leurs médias. Surtout, ce texte permettait à l’Occident de minimiser une nouvelle fois son rôle dans cette tragédie qui, comme on le sait aujourd’hui, a été rendue possible à cause de la passivité des organisations internationales, en particulier l’ONU, et des pays occidentaux. Les derniers éléments découverts récemment[10] démontrent même que les Occidentaux ont sacrifié sciemment l’enclave musulmane afin de hâter la fin de la guerre de Bosnie.[11]

Enfin, il est assez ironique que les pays occidentaux aient été les promoteurs d’un texte visant à imposer aux Serbes une repentance perpétuelle alors qu’ils ont été eux-mêmes incapables, jusqu’ici, de reconnaître officiellement les crimes qu’ils ont commis contre des civils serbes et monténégrins durant la guerre illégale de l’OTAN contre la Yougoslavie. Il faut également rappeler que le type d’humiliation que subit actuellement la Serbie n’a jamais été exercé sur les autres nations belligérantes dont les troupes armées ont elles aussi été coupables d’atrocités et de crimes graves durant les guerres yougoslaves. Ainsi, les Croates, à propos de l’opération de nettoyage ethnique Oluja[12], ou les Bosniaques, en ce qui concerne notamment les massacres de populations serbes autour de Srebrenica, n’ont jamais été sujets à la pluie d’anathèmes qui fut infligée aux Serbes.[13] Le principe du double standard, souvent utilisé par les Occidentaux dans les conflits auxquels ils sont mêlés, s’exprime ici de manière éclatante.

La stratégie serbe : longues tergiversations et bataille diplomatique tardive

Dès la réception de la première version de ce projet de résolution, la réaction du gouvernement serbe fut de critiquer ouvertement le contenu de celle-ci pour les raisons évoquées plus haut. Cela dit, alors que certains membres du gouvernement comme le ministre des Affaires étrangères Ivica Dačić et le ministre du Travail Aleksandar Vulin se déclaraient clairement opposés à ce texte, le Premier ministre Vučić se montrait plus indécis et attendit la fin du mois de juin pour convoquer un Conseil des ministres consacré à ce projet de résolution.[14] La décision collégiale fut finalement de s’opposer à l’adoption de ce texte par le Conseil de sécurité de l’ONU.

Néanmoins, alors que le président de Republika Srpska, Milorad Dodik, avait indiqué dès le départ qu’il demanderait à la Russie d’utiliser son droit de veto lors de la présentation de la résolution britannique au Conseil de sécurité, le gouvernement serbe décida de privilégier la voie diplomatique[15]. Semblant ne pas vouloir s’opposer frontalement à Londres, les diplomates serbes ont tenté d’influer sur la partie britannique qui, comme nous l’avons évoqué, a remanié son texte plusieurs fois sans pour autant satisfaire Belgrade. Aussi, face à l’échec probable de la diplomatie serbe, à quelques jours de la session du Conseil de sécurité, le Président serbe Tomislav Nikolić, qui s’attache depuis quelques mois à afficher des positions divergentes de son Premier ministre et qui n’a pas hésité à prendre des initiatives parfois gênantes pour ce dernier[16], s’est lancé dans une véritable campagne de lobbying auprès des pays membres de cet organe, écrivant personnellement à chacun des chefs d’États pour qu’il rejette le texte. Dans une lettre destinée à son homologue russe, le Président Nikolić demanda même clairement que la Russie oppose son veto à la résolution britannique.

Le veto russe : entre volonté d’équité et intérêts géopolitiques

La position russe sur le projet de résolution britannique fut dès le départ assez critique et ce en raison du caractère partial et politique de celui-ci. Comme l’ont déclaré les diplomates russes, ce projet, s’il avait été adopté, n’aurait fait qu’attiser les tensions interethniques dans la région. Aussi, dans la lignée de la diplomatie russe à défendre le droit international, il était inacceptable pour Moscou que le terme de « génocide » soit utilisé à tort et à travers, d’autant plus aux dépens de ses alliés serbes et bosno-serbes qui représentent un atout majeur dans une région des Balkans dont le processus euro-atlantisation est quasiment complet. La délégation russe auprès du Conseil de sécurité de l’ONU décida donc de présenter un contre-projet de résolution plus équilibré, commémorant toutes les victimes des guerres yougoslaves, sans distinction de nationalité, ce qui n’empêcha pas la délégation britannique de maintenir son propre texte. Au final, seul le projet du Royaume-Uni fut soumis au vote et fut rejeté suite au veto russe[17].

Le veto de la Russie fut donc motivé par trois facteurs d’importance inégale. Tout d’abord, la défense de l’impartialité et l’intégrité de l’ONU ainsi que la volonté de contribuer à l’apaisement des tensions interethniques dans la région[18]. Ensuite, le renforcement de ses relations avec la Serbie et la République serbe de Bosnie dans la perspective plus large de défendre ses intérêts dans les Balkans, Moscou pouvant rappeler à cette occasion qu’elle représente leur seul et unique allié de poids sur la scène internationale. Enfin, la poursuite de la lutte géopolitique qui l’oppose aux pays occidentaux avec la possibilité de leur infliger une défaite diplomatique, certes symbolique, mais qui permet à Moscou de s’afficher en tant que pourfendeur de l’hypocrisie et du cynisme des Occidentaux sur la scène internationale.

Pour une fin de l’ingérence occidentale

Pour conclure, il est important de rappeler que les questions mémorielles relatives aux événements des années 90 – les dites guerres yougoslaves – restent d’actualité et sont opportunément utilisées par les diverses forces politiques locales mais aussi, on l’a vu avec le projet de résolution britannique, par les puissances occidentales. Si le Tribunal pénal international pour l’Ex-Yougoslavie a pu, dans une certaine mesure, juger et condamner certains criminels de guerre impliqués dans ces conflits, le caractère inachevé de son travail n’a pas permis l’apaisement des populations concernées, loin s’en faut. Surtout, la partialité du TPIY, dont les exemples sont assez nombreux[19], n’a fait que renforcer le sentiment légitime d’injustice, toujours très présent au sein des Serbes notamment, voire un certain esprit de revanche ce qui représente l’une des causes de la fragilité de la stabilité de la région.

Dès lors, il est primordial que les pays occidentaux ne s’immiscent plus à l’avenir dans ce débat mémoriel et laissent la liberté aux populations locales de faire leur travail de mémoire, malgré leurs interprétations divergentes des événements des années 90, et ce, afin qu’elles parviennent à cohabiter à nouveau voire à se réconcilier définitivement. D’autant que le projet de résolution britannique, qui appelait également les États à condamner judiciairement toute négation du « génocide » de Srebrenica à l’instar des lois mémorielles visant à imposer une certaine vision de l’Histoire, n’aurait participer en rien à l’apaisement des tensions interethniques toujours présentes dans cette région, surtout en période de difficultés économiques. Au contraire, mais c’était peut-être là justement le but de la démarche… Car une nouvelle déstabilisation de la région serait dans l’intérêt bien compris de l’Occident dans le contexte actuel de lutte géopolitique avec la Russie, aggravé par la crise ukrainienne et qui se matérialise dans les Balkans sur de nombreux plans (politique, énergétique, militaire, économique, commercial, culturel…), avec en filigrane la volonté occidentale de diviser les nations balkaniques pour mieux régner.

Ainsi, bien que le but affiché était de contribuer à la réconciliation des nations bosniaque et serbe, il apparaît clairement que dans le monde occidental, à l’instar de la société décrite par George Orwell dans son roman d’anticipation 1984, les mots employés revêtent en fait une signification totalement inverse. Ainsi, au célèbre triptyque « war is peace, freedom is slavery, ignorance is strength », on pourra désormais ajouter  »tension is reconciliation ».

Épilogue : le Parlement européen sauve l’honneur… du Royaume-Uni et le Premier ministre serbe échappe à un lynchage à Srebrenica

Le Parlement européen a voté au lendemain de l’échec du projet de résolution britannique sa propre résolution sur la commémoration de Srebrenica dont le contenu persiste dans la diabolisation du peuple serbe puisque ces événements tragiques y sont décrits comme « le crime de guerre le plus considérable commis en Europe depuis la fin de la seconde guerre mondiale »[20]. Ce texte fut proposé initialement, ironie du sort, par un député croate. Une ironie d’autant plus piquante que la Croatie se prépare à célébrer en grandes pompes au début du mois d’août le vingtième anniversaire de l’opération Oluja qui représente incontestablement, quant à elle, le plus important nettoyage ethnique des années 90. Inutile d’attendre une condamnation quelconque de cette célébration par le Parlement européen puisque cette institution sera en vacances parlementaires jusqu’en septembre.

La résolution du Parlement européen n’aura pas apaisé les tensions provoquées par l’échec du projet de résolution britannique puisque les commémorations du 11 juillet seront marquées par l’expulsion à coup de pierres[21] du Premier ministre serbe[22], sous le regard des autres délégations étrangères venues y assister. Nouvelle ironie de l’Histoire : étaient présents à cette même cérémonie l’ancien président américain Bill Clinton et celle qui fut son ambassadrice auprès des Nations Unies à l’époque du massacre, Madeleine Albright. Pour les connaisseurs des guerres yougoslaves, ce détail ne manquera pas de sel. Pour les néophytes, nous ne pouvons que leur conseiller de s’intéresser à cette période de l’histoire européenne qui permet de mieux comprendre certaines pratiques et manipulations encore utilisées aujourd’hui par les Occidentaux.

Chilpéric Laventure

[1]A savoir, l’exécution systématique de 8.000 Bosniaques, uniquement des hommes et des adolescents en âge de porter les armes, par les troupes bosno-serbes après que celles-ci ont investi la ville de Srebrenica et pris le soin au préalable de faire évacuer les femmes, les enfants, les vieillards et les hommes inaptes au combat.

[2]Il existe une autre version des faits, plus vraisemblable, faisant état notamment d’un nombre de victimes moins important ainsi que de circonstances de disparition différentes pour une partie d’entre elles (morts durant les combats, survivants non pris en compte dans les statistiques de la Croix-Rouge). Voir: http://www.mondialisation.ca/analyse-des-v-nements-de-srebrenica/1833

[3]La justice bosnienne aura d’ailleurs l’occasion de corriger cette injustice puisque Naser Orić, arrêté en Suisse au cours de mois de juin sur la base d’un mandat d’arrêt émis par la justice serbe, a finalement été extradé en Bosnie-Herzégovine où il devra répondre des accusations qui pèsent contre lui. Cela dit, de nombreux observateurs en Serbie et en Republika Srpska ont déjà émis des doutes sur la possibilité d’un procès impartial contre celui qui est considéré comme un héros par la majorité de la population bosniaque.

[4]Le texte fut remanié à quatre reprises mais les différentes modifications, considérées comme « cosmétiques » par les gouvernements serbe et bosno-serbe, ne le rendirent pas acceptable à leurs yeux, la diplomatie britannique restant inflexible sur la présence du terme « génocide ».

[5]La présidence de Bosnie-Herzégovine fonctionne selon un système de triumvirat, composé d’un Bosniaque, d’un Croate et d’un Serbe, exerçant collégialement la fonction de chef de l’État.

[6]Outre l’opposition de Belgrade au projet de résolution britannique, le dirigeant bosniaque avait également évoqué l’arrestation de Naser Orić et la demande d’extradition des autorités serbes pour justifier sa décision.

[7]Ce projet est également défendu par le principal parti bosniaque, le SDA, qui préconise la mise en place d’une Bosnie-Herzégovine composée de cinq régions « multiethniques » mais qui s’apparente plus à une réorganisation du pays en faveur des Bosniaques.

[8]Pour plus d’informations à ce sujet, nous vous conseillons de lire l’excellent ouvrage de Thomas Wauquier, Les Boucs émisserbes, paru cette année aux éditions FRAction.

[9]Il existe quelques ouvrages de qualité en langue française traitant présicément de ce sujet parmi lesquels ceux d’Alexis Troude, Balkans : un éclatement programmé, paru en 2012 aux éditions Xenia et Géopolitique de la Serbie, paru en 2006 aux éditions Ellipses.

[10]http://www.letemps.ch/Page/Uuid/e9f77308-2672-11e5-9a9f-be4265bf5f16/Les_Occidentaux_ont_sacrifi%C3%A9_Srebrenica

[11]Plus affligeant encore, certains témoins ont rapporté les propos du leader bosniaque Alija Izetbegovic (le père de Bakir) au sujet d’une conversation téléphonique avec Bill Clinton quelques mois avant le massacre. Alors qu’il réclamait pour une énième fois une intervention militaire des États-Unis dans le conflit bosnien, notamment via l’OTAN, le président américain lui aurait indiqué que celle-ci serait possible uniquement dans le cas où les Bosno-Serbes perpétraient le massacre d’au moins 5.000 Bosniaques.

[12]200.000 Serbes de Krajina expulsés et 2.000 tués par l’armée croate, en août 1995, et ce, avec l’approbation et l’aide technique et logistique des États-Unis.

[13]Seuls les Kosovars ont récemment connu un traitement similaire, mais dans une moindre mesure, avec l’injonction de la part des Occidentaux de créer un Tribunal spécial pour juger les crimes commis sur le territoire kosovar par des membres de l’Armée de libération du Kosovo après 2000, et ce, sur la base du Rapport Marty.

[14]Ces longues tergiversations furent d’ailleurs reprochées au gouvernement par les partis de l’opposition démocrate.

[15]A ce propos, les partis nationalistes, dont aucun n’est actuellement représenté à l’Assemblée nationale serbe, ont déploré le manque de détermination du Premier ministre ainsi que sa réticence à faire appel à la Russie.

[16]On peut évoquer notamment sa participation aux commémorations de la fin de la Seconde guerre mondiale à Moscou, aux côtés de Vladimir Poutine, alors que les pays occidentaux avaient choisi de boycotter cet événement. Le Premier ministre serbe s’était quant à lui empressé d’accepter une invitation du vice-Président américain Joe Biden qui apparaissait comme une réponse des Américains à la sollicitation russe. Outre un nouvel exemple du jeu d’équilibre de la Serbie entre Est et Ouest, on pouvait également voir dans cette épisode un nouveau signe d’une tendance du pouvoir serbe à la bicéphalie.

[17]A noter que quatre États choisirent de s’abstenir – la Chine, l’Angola, le Nigeria et le Venezuela – tandis que les dix autres pays restants – dont les États-Unis, la France et le Royaume-Uni – soutinrent le texte.

[18]A ce propos, au contraire des Occidentaux, la Russie s’est toujours engagée pour que tous les crimes perpétrés durant la guerre de Bosnie soient jugés, de manière impartiale, sans distinction de nationalité ou de religion.

[19]On pense aux acquittements plus que contestables du Croate Ante Gotovina, du Bosniaque Naser Orić et du Kosovar Ramush Haradinaj.

[20]Voir le texte de la résolution : http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P8-TA-2015-0276+0+DOC+XML+V0//FR&language=FR

[21]D’après les premiers éléments de l’enquête, le laxisme des forces de sécurité bosniennes, en sous-effectif ce jour-là, a rendu possible cet incident. Aussi, de sérieux soupçons pointent le rôle de certains Bosniaques au sein des autorités fédérales, notamment Bakir Izetbegović. Cela dit, le gouvernement serbe ne semble pas leur en avoir tenu rigueur puisque les membres de la présidence de Bosnie-Herzégovine ont été invités à Belgrade quelques jours après cet incident. Aleksandar Vučić a justifié ce geste d’apaisement par la volonté de la Serbie de contribuer à la stabilité de la région.

[22]A ce propos, il faut également noter que les ambassades occidentales, tout comme les partis de l’opposition démocrate et les ONG locales (dont un bon nombre est financé par des organisations européennes et surtout américaines (USAID, NED, IRI, Open Society Foundations…)), avaient conseillé avec insistance au Premier ministre serbe de participer aux commémorations du massacre, et ce, malgré le climat évident de haute tension dans lequel celles-ci allaient se dérouler. Aussi, bien qu’Aleksandar Vučić ne se trouve plus à une humiliation près (les derniers mois ont en effet été riches en exemples de soumission aux Occidentaux de la part du Premier ministre serbe qui doit, il faut le rappeler, faire oublier son lourd passé – ancien membre du Parti radical serbe de Vojislav Šešelj, formation réputée d’extrême droite (selon la grille de lecture occidentale), il fut notamment ministre de l’Information sous le régime de Milošević de 1998 à 2000), gageons qu’il aura compris les risques de suivre aveuglément les conseils de ses « amis » occidentaux comme il aime souvent à le dire.

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