L’Epitre d’aujourd’hui nous décrit la descente du St Esprit pour la 1ère fête de la Pentecôte de l’Eglise. les Apôtres, les disciples et les saintes femmes sont réunis dans le Cénacle, au nombre d’environ 120, attendant dans la prière, la manifestation du St Esprit promis par Jésus avant son Ascension.

1 – Le Saint Esprit s’est manifesté par trois signes ce jour là :

Premièrement sous la forme d’un vent violent.

« Tout à coup il se fit un bruit dans le ciel, comme le bruit d’un vent impétueux, et il remplit toute la maison où ils étaient assis ».

Le vent offre de frappantes analogies avec la façon d’agir de l’Esprit-Saint. L’un et l’autre sont invisibles ; ils agissent en pleine liberté : le vent apparaît à l’improviste et s’en va de même ; l’Esprit Saint choisit son heure et les modalités de son intervention.

Deuxièmement sous la forme de langues de feu.

« Et des langues semblables à du feu, séparées les unes des autres, leur apparurent et se posèrent sur chacun d’eux ».

Le feu possède trois qualités :
– celle de purifier ; c’est ainsi qu’on fait passer le minerai d’or au feu pour le débarrasser de tout ce qui n’est pas de l’or ;
– Celle d’éclairer ;
– celle de réchauffer.

Ce sont les trois qualités qui expliquent l’action spéciale du St Esprit :
– il purifie les âmes de tout ce qui est contraire à Dieu.
– Il éclaire les intelligences en leur faisant comprendre les Stes Ecritures et notamment tout ce que Jésus-Christ nous a enseigné.
– Il réchauffe les cœurs paralysés par le froid de l’égoïsme, Il les dilate et les enflamme de zèle pour les âmes.

Nous avons un bel exemple de cet effet dans le vie de St Philippe de Néri :

« Il priait avec ferveur et persévérance pour recevoir les dons du St Esprit. Le jour de la Pentecôte 1544, il sentit une flamme s’allumer en lui : son cœur était comme en feu, sa poitrine comme une fournaise. Son cœur, envahi par l’amour divin, tressaillit avec tant de force, que sa poitrine s’élargit en rompant 3 côtes, pour donner plus d’espace à ces prodigieux mouvements. Ce n’était là qu’une manifestation sensible des ardeurs de la divine charité, que le St Esprit répandait dans l’âme de St Philippe. Depuis ce moment, il ne respira plus que la charité. Toute la vie de ce saint homme fut sous l’influence du St Esprit qui vivait en lui ».

Troisièmement le parler en langues.

« Aussitôt, ils furent remplis du St Esprit, et ils commencèrent à parler diverses langues, selon que le St Esprit leur donnait de parler ». Les pèlerins juifs, venus de toutes les nations bordant la Méditerranée pour les fêtes de Pâques et de la Pentecôte, ont accouru au bruit du vent jusqu’au Cénacle. St Pierre, probablement depuis la terrasse, leur annonce le salut et tous comprennent son discours. Parmi cette foule, 3 000 personnes furent touchées, se firent baptiser et se joignirent aux disciples. Les Saintes Ecritures disent qu’ils n’avaient qu’un cœur et qu’une âme.

Ce prodige est aussi une prophétie en action ; il annonce que l’Eglise est destinée à se répandre dans toutes les nations. Elle va parler aux nations, divisées par le péché, la langue de la charité qui surmonte toute séparation et toute division.

Le St Esprit accordera aux missionnaires de tous les siècles, soit la facilité d’apprendre les diverses langues des pays qu’ils évangéliseront, soit Il renouvellera, de différentes manières, le prodige du jour de la Pentecôte.

Par exemple, au début du XVème siècle, le dominicain St Vincent Ferrier reçoit la mission de prêcher en Espagne, en France, dans le Nord de l’Italie, dans les Alpes françaises et Suisses. St Vincent terminera son périple par la Bretagne. Il ne parlait que le catalan et le latin ! Le St Esprit lui accorda la grâce d’être compris de ces différents auditoires. Il parlait en catalan, mais tout le monde le comprenait. Ainsi à Vannes et dans les villes de Bretagne, les foules comprenaient ses sermons, alors    qu’il ne parlait pas un seul mot de breton.

Au XVIème siècle, St Louis Bertrand de l’Ordre des prêcheurs, est envoyé évangéliser les indiens des Caraïbes et du Venezuela ; comme il ne connaissait que l’espagnol, il demanda à Dieu la grâce d’être compris des diverses tribus indiennes, le St Esprit le lui accorda avec le don des miracles. Il évangélisa et baptisa des milliers d’indiens.

En 1551, dans la ville d’AMANGUCHI au Japon, le Saint-Esprit donne ses dons à St François Xavier d’une manière un peu différente : le saint prêchait le matin en chinois aux marchands de la Chine venu faire du commerce dans cette ville, et l’après-midi aux japonais, dans leur langue. Il parlait si facilement et si naturellement ces deux langues, qu’à l’entendre, on ne l’aurait pas pris pour un étranger.

Autre prodige :  les païens lui posaient beaucoup de questions sur la religion, il répondait en peu de mots à plusieurs questions et chaque personne entendait la réponse qui lui convenait.

2 – Ces 3 signes par lesquels le St Esprit s’est manifesté le jour de la Pentecôte montre son action : il est l’âme de l’Eglise et le sanctificateur des âmes.

a) Il est d’abord l’âme de l’Eglise.

En ce matin de Pentecôte de l’an 33, cela fait déjà 10 jours que Notre-Seigneur Jésus-Christ est remonté au Ciel après avoir accompli sa mission de Rédempteur. Par son sang il nous a mérité et acquis un trésor surabondant de grâces, il nous a enseigné la doctrine de vérité ; il a institué les sacrements sources de vie, il a constitué l’Eglise, qui est établie authentiquement sur l’unité de son chef visible, l’apôtre Pierre. Que manque-t-il encore ?

A cet organisme qui a tout pour vivre et croître, il faut insuffler l’Esprit de vie. De même que pour créer l’homme, Dieu forma d’abord son corps du limon de la terre, puis il lui donna une âme principe de vie ; de même quand il crée l’Eglise, il répand sur son corps constitué, les 120 personnes du Cénacle, l’Esprit de vie, l’Esprit Saint, qui est l’âme de l’Eglise.

Depuis cet évènement, le St Esprit demeure dans l’Eglise d’une façon permanente, indéfectible. Il va exercer dans son sein une action vivifiante et sanctifiante qui va prolonger, à travers les siècles l’œuvre rédemptrice du Sauveur.

Notre Seigneur Jésus-Christ a tenu sa promesse et il continue du haut du Ciel à envoyer l’Esprit Saint à son Eglise pour lui faire produire, à toutes les époques, des saints qui forment l’Eglise triomphante au Ciel, jusqu’à ce que le dernier élu l’ait rejointe. Alors NSJC pourra la présenter à son Père « pure, immaculée, sans ride ».

Quel réconfort pour nous, chers fidèles, de savoir que l’Esprit Saint, l’Esprit consolateur, l’Esprit de Vérité assistera son Eglise jusqu’au retour de NSJC. Quels que soient les malheurs des temps, la prévarication des hommes revêtus de l’autorité, les portes de l’Enfer ne prévaudront pas contre elle!

Si, dans l’homme composé d’une âme et d’un corps, la maladie du corps peut forcer l’âme à quitter définitivement le corps, même s’il reste encore quelques organes sains – c’est ce départ de l’âme qu’on appelle la mort –  pour l’Eglise, il en va différemment, son âme, qui est le St Esprit, est indéfectible et vivifiante. Elle peut toujours vivifier les parties du corps encore saines, même si l’ensemble est atteint par un cancer généralisé. La puissance purificatrice, vivifiante du Saint Esprit peut faire encore plus. L’âme de l’Eglise peut guérir le cancer dont son corps est atteint. Pour cela il suffit que les parties malades, reconnaissent qu’elles sont malades, qu’elles regrettent leurs péchés, alors le St Esprit pourra de nouveau agir, les obstacles étant  enlevés. Il fera alors des prodiges et la face de la terre sera renouvelée.

Nous venons de voir que Jésus-Christ, tête du corps mystique qui est l’Eglise, lui envoie du Ciel continuellement l’Esprit Saint qui est l’âme de l’Eglise pour lui faire continuer sa mission rédemptrice.

Or l’Eglise est formée de tous les baptisés, donc Jésus-Christ continue d’envoyer le St Esprit à chacun de ses membres pour les conformer à lui-même et Il continuera jusqu’à la fin du monde.

b) La sanctification des âmes est l’ Œuvre du St Esprit.

Avant de poursuivre, rappelons-nous que toutes les œuvres extérieures à Dieu, telles que la création et la sanctification des âmes, sont communes aux trois personnes divines, mais en raison de l’affinité qui existe entre les œuvres extérieures et le caractère propre de chaque personne, ces œuvres sont attribuées plutôt à telle personne qu’à telle autre. Ainsi l’œuvre de sanctification, qui est une œuvre d’amour est attribué particulièrement au St Esprit qui est l’amour substantiel du Père et du Fils. Mais ce sont les trois personnes qui agissent ensemble pour la sanctification des âmes.

On peut dire que le Père nous a créé, que le Fils nous a racheté, et que le St Esprit nous sanctifie. « Il donne, dit Léon XIII dans l’Encyclique sur le St Esprit « Divinum illud », une impulsion forte et suave et met, pour ainsi dire, la dernière main à l’œuvre très élevée de notre prédestination éternelle ».

Illustrons cette action du Saint Esprit et des deux autres Personnes dans la sanctification de notre âme par le fait suivant, qui s’est passé à Paris quand il y régnait encore l’esprit de foi :

 « deux frères menaient des vies fort différentes, l’un était pieux et l’autre vivait dans le désordre du péché. Le premier priait avec larmes pour la conversion de son frère. Sa persévérance fut récompensée. Une grave maladie vint d’abord visiter le pécheur et le mis à deux doigts de la mort. Mais cet avertissement ne suffit pas à le convertir, au contraire, il semblait s’endurcir davantage. Dieu employa alors des moyens extraordinaires :

dans un ravissement, le malade vit un vieillard vénérable qui le regardait d’un air sévère et lui dit : « Je suis le Père éternel qui t’a créé, je t’ai donné mon Fils unique pour te sauver mais puisque tu t’obstines à vouloir te perdre, sache que tu seras un enfant de perdition ! »

Cette vision le jeta dans une sorte de désespoir. Pendant ce temps son frère continuait à prier ardemment. La nuit suivante le malade eut un nouveau ravissement ; cette fois le Fils de Dieu lui apparut portant sa Croix et lui montrant ses plaies saignantes :

« Voilà, lui dit-il, le sang que j’ai répandu pour la rémission de tes péchés ; et toi au lieu d’en profiter pour ton salut, tu le fais servir à sceller ta propre réprobation ! » Le malade consterné flottait dans le désespoir et l’espérance. Son frère l’encouragea à invoquer le Saint Esprit.

Le pécheur obéit avec humilité et à peine eut-il imploré l’Esprit consolateur, que ses ténèbres se dissipèrent, l’espérance lui revint, le repentir pénétra son cœur. Il demanda un prêtre et confessa ses péchés avec larmes, reçu avec piété le viatique et l’extrême onction. Alors, il eut une troisième vision : Un personnage d’une majesté divine lui apparut, vêtu de blanc et tenant en sa main une colombe. Regardant le malade avec bonté et amour, il lui dit : « Je suis le Saint Esprit, qui procède du Père et du Fils. Je viens vous annoncer que vos péchés vous sont remis et que le Ciel vous est ouvert ». Le malade au comble de la joie se répandit en louanges et en actions de grâces.

Trois jours après, il expira dans la douce assurance de son salut, laissant son frère inondé de consolations ».

L’œuvre de notre sanctification a commencé au baptême, quand la grâce, qui nous a fait enfants de Dieu, a été répandue dans nos cœurs par l’Esprit-Saint qui nous a été donné, dit St Paul. Depuis ce moment l’Esprit Saint est dit ‘habiter en nous’ non d’une manière qui lui soit personnelle à l’exclusion du Père et du Fils, mais parce qu’il procède par amour et qu’il est celui qui unit le Père et le Fils. Toute la trinité est donc présente dans l’âme en état de grâce, d’une manière vraie et réelle, et nous pouvons la connaître et l’aimer. Ce 1er don fait au baptême doit croître, avec la réception fructueuse des sacrements, et chaque fois que nous faisons des actes de charité généreux.

Pour que l’action du Saint Esprit dans nos âmes soit stable et féconde, il faut quand même des conditions ! il faut tout d’abord une humble prière, il faut ensuite une généreuse docilité. Si l’action du St Esprit est compatible avec nos faiblesses de surprises, et elles parfois sont nombreuses, elle ne l’est pas avec nos résistances voulues, froidement admises.

En effet, le St Esprit respecte souverainement notre liberté et ne violente point notre volonté. Il faut donc se disposer à ses inspirations, à ses invitations. Comment nous arrivent-elles ? par divers moyens :

soit par une bonne lecture, une prédication, de bonnes pensées survenues pendant la visite au St Sacrement ou pendant l’oraison, etc. Lorsque ses invitations se produisent, il faut accepter l’idée qu’elles nous présentent et obéir promptement.

Un ‘non’ délibéré, même en de petites choses, contrarie l’opération de l’Esprit Saint en nous, son action se fait moins forte, plus rare. L’âme reste dans la médiocrité.

Si ces résistances volontaires, délibérées, deviennent fréquentes, habituelles, l’Esprit-Saint se tait, l’âme est livrée à elle-même, sans guide. Imaginez un vacancier inexpérimenté qui s’aventure en haute  montagne sans guide, il est à peu près sûr de ne pas revenir ! Il en est de même pour  l’âme qui est sans guide, sans soutien intérieur dans la voie du salut, elle est en grand danger. Elle est près de devenir la proie du prince des ténèbres.

Si au contraire nous nous laissons guider par le St Esprit, notre âme agit avec facilité, elle se dilate et court dans les voies de Dieu.

Elle produit alors les fruits du St Esprit, énumérés par St Paul, qui sont comme une récompense anticipée de notre fidélité : l’âme reçoit en elle, la joie, la paix, la patience, la douceur, la modestie, la chasteté.

Demandons à l’épouse du St Esprit, la Très Sainte Vierge Marie, cette docilité, afin que nous puissions parvenir heureusement au port du salut et que nous puissions louer éternellement la Trinité bienheureuse.

Avrillé,  Dimanche 19 mai 2024, dimanche de la Pentecôte

Le sermon audio :

Fabien Laurent

Autres sermons des Dominicains d’Avrillé :
– Jeudi 9 mai 2024 : En la fête de l’Ascension de Notre-Seigneur
– Dimanche 12 mai  2024 : Sainte Jeanne d’Arc et la Croix de Jésus
– Dimanche 30 juin 2024 : Morts au péché et vivants pour Dieu

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