Le 18 février dernier, le père vénézuélien Arturo Sosa Abascal, le nouveau Supérieur général de la Compagnie de Jésus et grand ami de l’actuel pape François, jésuite et sud-américain lui-aussi, a accordé un entretien au vaticaniste suisse Giuseppe Rusconi pour le blog Rossoporpora .
Cette longue entrevue, qui expose une doctrine nouvelle concernant l’indissolubilité du mariage et les paroles de Jésus sur la question, fait parler d‘elle particulièrement aujourd’hui : un prêtre italien, don Bertacchini, bibliste renommé et archevêque émérite de Lanciano-Ortona, a courageusement pris sa plume et rédigé un « promemoria » contre le pape noir des Jésuites adressé au pape François et dans lequel il réfute les thèses erronées du père Abascal.
Celles-ci s’appuient sur une réinterprétation de la parole de Jésus dans les Évangiles, plus spécialement sur une réfutation des écrits du Nouveau Testament, ainsi que sur le discernement personnel établi arbitrairement comme supérieur à la doctrine. Afin de faire accepter les nouvelles normes révolutionnaires concernant l’accès au sacrement pour les divorcés remariés civilement contenues dans le paragraphe VIII d’Amoris Laetitia, le père Abascal ne se gène pas pour mettre en doute les évangélistes et par voie de conséquence l’enseignement même du Christ rapporté depuis 2000 ans ni à relativiser l’importance de la doctrine par rapport au jugement personnel procédant de la conscience individuelle. Voici ci-dessous les passages marquants de cet entretien concernant l’exhortation sur la famille qui s’inscrit dans la ligne révolutionnaire bergoglienne « de transformation de l’Église en un chantier ouvert, de bouleversement de la signalétique et de démolition les barrières» comme l’écrit justement le journaliste Giuseppe Rusconi en introduction.
« Giuseppe Rusconi : Le Cardinal Gerhard L. Müller, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, a dit au sujet du mariage que « aucun pouvoir dans le ciel et sur la terre, pas un ange, ni le pape, ni un conseil ou une loi des évêques, a le pouvoir de le changer« , que « les paroles de Jésus sont très claires et leur interprétation n’est pas une interprétation académique mais est la Parole de Dieu ». « Fondamentalisme catholique » aussi chez Müller ?
Père Abascal : Tout d’ abord, il serait nécessaire de commencer une vraie réflexion sur ce que Jésus a vraiment dit… A son époque, personne n’avait un magnétophone pour enregistrer ses paroles. On sait que les paroles de Jésus doivent être replacées dans leur contexte, elles sont exprimées dans une langue, dans un environnement spécifique, elles sont adressées à une personne en particulier…
Q. : Mais alors, si nous devons examiner toutes les paroles de Jésus et les replacer dans leur contexte historique, cela signifie qu’elles n’ont pas une valeur absolue…
Père Abascal : Au cours du dernier siècle, il y a eu de nombreuses études dans l’Église qui ont essayé de comprendre exactement ce que Jésus voulait dire… Ce n’est pas du relativisme, mais cela démontre que la parole est relative, l’Évangile est écrit par des hommes, est accepté par l’Église qui, à son tour, est faite d’êtres humains… Donc, il est vrai que personne ne peut changer la Parole de Jésus, mais il est nécessaire de savoir quelle a été cette Parole !
Q. : Alors l’affirmation «Que l’homme ne sépare donc pas ce que Dieu a uni! » (cf, Matthieu 19, 3-6) est discutable ?
Père Abascal : Je m’identifie avec ce que dit le Pape François : on n’émet aucun doute, on soumet au discernement…
Q. : Mais alors on met en doute puisque le discernement est une appréciation, un choix entre différentes options. Il n’est donc plus obligatoire de suivre une interprétation unique …
Père Abascal : Non, l’obligation existe toujours, c’est de suivre les résultats du discernement. Ce n’est pas n’importe quelle appréciation.
Q. : Mais la décision finale est basée sur un jugement par rapport à différentes hypothèses. Il prend en considération également l’hypothèse selon laquelle l’expression «Que l’homme ne sépare donc pas… » n’est pas exactement ce qu’il paraît… En bref, il remet en question la parole de Jésus .
Père Abascal : Non pas la parole de Jésus, mais la parole de Jésus telle que nous l’avons interprétée. Le discernement ne choisit pas entre différentes hypothèses mais il se met à l’écoute du Saint-Esprit qui, comme Jésus l’a promis, nous aide à comprendre les signes de la présence de Dieu dans l’histoire humaine.
(…)
Q. : Cependant il n’est pas facile de traduire le Christ dans la réalité convulsive et contradictoire d’aujourd’hui. Comment discerner ?
Père Abascal : Le discernement nous devons le faire ensemble. (…) Le pape François discerne en suivant saint Ignace, comme toute la Compagnie de Jésus : nous devons chercher et trouver la volonté de Dieu, disait saint Ignace. Ce n’est pas une recherche légère. Le discernement débouche sur une décision : il ne faut pas seulement évaluer, il faut aussi décider.
Q. : Et qui doit décider?
Père Abascal : L’Église a toujours confirmé la priorité de la conscience individuelle.
Q. : Ai-je bien compris : si la conscience, après le discernement dans un cas, me dit que je peux accomplir une certaine action, je peux la faire sans me sentir coupable et avec l’approbation de la communauté… je peux par exemple recevoir la communion même si la norme ne le prévoit pas …
Père Abascal : L’Église s’est développée au cours des siècles, ce n’est pas un morceau de béton. Elle est née, elle a appris, elle a changé… C’est pour cela que l’on fait des conciles œcuméniques, pour essayer de se concentrer sur le développement de la doctrine. Doctrine est une parole que je n’aime pas beaucoup, elle donne l’image de la dureté de la pierre. Au contraire, la réalité humaine est beaucoup plus nuancée, ce n’est jamais noir ou blanc, c’est dans un développement continu.
Q. : Il me semble comprendre que pour vous la pratique du discernement a préséance sur la doctrine .
Père Abascal : Oui, mais la doctrine fait partie du discernement. Un vrai discernement ne peut pas ignorer la doctrine.
Q. : Mais il peut arriver à des conclusions différentes de la doctrine.
Père Abascal : Cela oui, parce que la doctrine ne remplace pas le discernement et ni le Saint-Esprit. »
Question : le pape noir des Jésuites est-il catholique ou protestant ?
Réponse : à lire sa remise en cause du dogme catholique sur la Sainte Écriture, le mariage et l’accès aux sacrements, et après avoir procédé, selon les instructions du père Abascal, à un discernement éclairé par la doctrine et à l’écoute du Saint Esprit, notre conscience individuelle émet un jugement par rapport à ces deux hypothèses et, sur la base de ce jugement, décide que le père Abascal, supérieur général des Jésuites, est protestant donc hérétique… « Et puisque l’Église a toujours confirmé la priorité de la conscience individuelle » nous dit-il, alors nous pouvons en décider ainsi sans nous sentir coupables et avec l’approbation de la communauté… la sienne comprise !
Francesca de Villasmundo
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