Parmi les idées un peu à la mode dans certains milieux dits de « droite », il y a le « national-libéralisme ». On peut trouver ce label sur les réseaux sociaux et sur différents sites internet. Un des grands promoteurs du machin « national-libéral » est le donquichottesque Henry de Lesquen.
Sur une note badine, j’observe que le site éponyme est http://lesquen2017.com/ (avec le suffixe américain .com) et non pas http://lesquen2017.fr (avec le préfixe .fr). En outre, cela ne manque pas de piquant que le sieur Henry de Lesquen soit un haut fonctionnaire retraité. Question libéralisme et entreprenariat privé, il conseille et réfléchit, mais il ne pratique pas. Naïvement, je croyais que c’étaient les socialistes qui faisaient joujou avec l’argent des autres.
Plus sérieusement, le label « national-libéral » est en soi une espèce d’oxymore et d’attelage lexical manifestement incohérent. Pourquoi pas le national-sansfrontiérisme ou le libéral-collectivisme ? Il est évident dans le monde actuel que le libéralisme réel, à savoir ce qu’on appelle l’ultralibéralisme mondialisé, est le pire ennemi des nations.
Mais il y a plus. En dehors de toute considération personnelle ou théorique, dans la sélection des douze (!) bons apôtres (?) représentant le soi-disant « national-libéralisme », on trouve des dirigeants qui n’ont visiblement rien en commun. Il ne manque que la carpe et le lapin, la carotte, le plancton et le cristal de roche. Jugez plutôt :
On trouve des dirigeants souverainistes, soucieux du bien-être de leur peuple et dans une large mesure anti-américains et hostiles à la soumission à la gouvernance ultralibérale mondialisée. Parmi eux, je placerais volontiers : Vladimir Poutine, Viktor Orban et, autrefois, Charles de Gaulle.
A l’inverse, Ronald Reagan et Margaret Thatcher avaient surtout en commun leur anti-communisme et leur politique économique, qui a largement consisté à liquider l’héritage social-démocrate, à déréglementer, à privatiser ou détruire les services publics et une bonne partie des fonctions régaliennes de l’Etat, y compris l’armée ou les prisons. Et, avec un peu de recul, le succès économique de l’ère Reagan est un trompe-l’oeil, puisqu’il a beaucoup reposé sur de la croissance perfusée par le crédit et l’endettement, dont on voit aujourd’hui les conséquences avec les tera-milliards de dettes des USA. Leur anti-communisme est victorieux mais la crise actuelle est la conséquence quasi linéaire de leur politique économique.
Concrètement, les trois dirigeants souverainistes : Vladimir Poutine, Viktor Orban et Charles de Gaulle sont clairement l’antithèse politique et économique de Ronald Reagan et Margaret Thatcher.
On est également médusé de voir Benjamin Netanyahu figurer dans ce bric-à-brac « national-libéral ». Un dirigeant, qui promeut la suprématie de la « race » juive (si tant est qu’elle existe), qui chasse, opprime et génocide à petit feu ce qui reste du peuple palestinien, serait « national-libéral ». L’apartheid judéo-palestinien, qui existe de facto et presque de jure, serait donc compatible avec le « national-libéralisme ». Et le « national-libéralisme » des Palestiniens, à quoi pourrait-il ressembler ? On aimerait savoir.
Tout aussi effarante est la présence du sultan néo-ottoman Recep Erdogan sur la photo de groupe, sous prétexte qu’il « défendrait la grandeur de sa civilisation. » C’est ce qu’on m’a répondu en privé. Les Arméniens encore vivants apprécieront. Ou pas. Cet apprenti dictateur, en bonne voie de devenir un dictateur confirmé, qui n’hésite pas à entrainer et aider la barbarie islamiste, emprisonner des journalistes, bombarder les Kurdes, etc., serait « national-libéral ».
Ce label est plus qu’incohérent. Avec Recep Erdogan, là, on sombre dans la démence ou le charlatanisme. Chacun se fera son opinion.
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