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L’Arménie va-t-elle disparaître ?

L'Arménie va-t-elle disparaître ?, Frédéric Pons, éditions Artège

Frédéric Pons est un grand reporter familier du Caucase. C’est aussi un spécialiste des questions militaires. Il signe chez Artège un véritable cri d’alarme au sujet de l’Arménie, plus vieil Etat chrétien du monde, dont le sort ne semble guère émouvoir nos gouvernants ni les médias officiels.

La « petite » Arménie (moins de 3 millions d’habitants), 111e puissance militaire mondiale, fait face, quasiment seule, à l’Azerbaïdjan (10 millions d’habitants), 64e puissance militaire mondiale, et à la Turquie (82 millions d’habitants), 11e puissance militaire mondiale.

Carrefour historique, culturel et religieux dans le sud de la Transcaucasie, l’Arménie est un point de rencontre entre l’Europe et l’Asie ; un lieu d’échanges mais aussi de confrontation. Parmi ses quatre voisins, deux lui sont résolument hostiles – la Turquie et l’Azerbaïdjan -, tout en étant activement courtisés par l’Occident. Le projet de ces deux pays est inquiétant, d’autant plus qu’il a été exprimé en toute transparence au plus haut niveau : affaiblir encore davantage l’Arménie pour mieux disposer de pans entiers de son territoire, afin de satisfaire leurs intérêts stratégiques, notamment dans les domaines pétrolier et gazier.

Abandonnée de tous

Le soutien des rares amis de l’Arménie est tout aussi inquiétant pour l’avenir de son peuple. Ni les uns ni les autres n’ont été au rendez-vous de l’amitié lorsqu’il le fallait. Son allié naturel, la Russie, a pris ses distances, préoccupée par d’autres dossiers plus urgents, d’autres intérêts vitaux : la poursuite de la guerre en Ukraine, la nécessité de maintenir son partenariat stratégique avec la Turquie, le souci de ménager l’Azerbaïdjan, utile pour continuer à exporter le gaz et le pétrole russes.

L’Iran serait l’autre allié potentiel. Mais cet Etat a bien d’autres préoccupations. Son soutien à l’Arménie se limite à laisser ouverte sa frontière nord, pour apporter un peu d’oxygène à l’économie arménienne – et à la sienne au passage.

Quant à l’Europe, elle est en position délicate vis-à-vis de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan. La guerre en Ukraine et les difficultés d’approvisionnement énergétique qui en sont la conséquence ont changé la donne. En juillet 2023, les Arméniens ont eu une nouvelle mauvaise surprise : l’aide européenne promise pour renforcer ses capacités de défense a été annulée.

Blocus et épuration ethnique et religieuse

Le blocus que l’Azerbaïdjan fait subir depuis décembre 2022 aux 120 000 habitants arméniens du Haut-Karabakh (l’Artsakh, selon la dénomination arménienne), préfigure ce qui pourrait arriver demain à l’Arménien tout entière : l’effacement d’un territoire chrétien héritier d’une très longue histoire, la disparition de ses monuments et patrimoines religieux, et, in fine, l’exode de ses populations.

Ceux qui baissent le regard devant les visées expansionnistes de l’Azerbaïdjan et de son mentor, la Turquie, encouragent cette politique du fait accompli et porteront la responsabilité du résultat.

La fermeture du corridor de Latchine, seule voie d’accès autorisée à l’Artsakh, coupe la population chrétienne de l’enclave du reste de l’Arménie depuis décembre 2022. Déjà démunis, les habitants sont privés de ravitaillement, d’électricité, de médicaments, victimes d’une politique d’épuration ethnique et religieuse menée par l’Azerbaïdjan qui veut les forcer à partir et les remplacer par des colons azéris et kurdes.

Qui s’en soucie ? Il est pourtant urgent de s’en préoccuper avant que l’Arménie ne disparaisse.

L’Arménie va-t-elle disparaître ?, Frédéric Pons, éditions Artège, 228 pages, 18,90 euros

A commander en ligne sur le site de l’éditeur

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