Dieudonné a du talent. Comme comédien c’est certain, mais comme chef d’entreprise également. Et ce chef d’entreprise a une grande expérience en marketing. Dieudonné a décidé de taper le système au porte-monnaie, il va donc lancer l’offensive contre les assureurs et les banquiers, grands escrocs selon lui devant l’éternel.
L’ananassurance est le doux nom donné à la nouvelle compagnie d’assurances dieudonnesque, car, dit le comique, l’assurance est une activité très lucrative. Là s’arrête le comique, et j’ose parier que l’ananassurance ne verra jamais le jour comme compagnie indépendante, ou que, du moins, elle ne durera que quelques mois. Pour la simple et bonne raison que si l’assurance fut un temps une activité très rentable, ces temps sont révolus, car l’assurance est un secteur étouffé entre une concurrence de plus en plus rude et une législation de plus en plus stricte.
Auto et habitation : ce sont sur ces segments que Dieudonné croit pouvoir gagner de l’argent. Pourtant, quelques chiffres objectifs lui montreront vite que son activité de comique est bien plus rentable.
Un indice est très révélateur : c’est le ratio combiné. Ce ratio correspond aux sinistres payés par l’assurance auxquels on ajoute les frais de gestion (le personnel notamment), le tout comparé au montant des primes encaissées. Or, ces dernières années, ce ratio variait entre 96 et 98. Ce qui veut dire que quand une compagnie encaisse 100 € de prime, elle paye environ 20 € de charge de gestion et 76 € de sinistre, soit un gain de 4 € ! La rentabilité au niveau exploitation dans cet exemple est donc de 4% seulement.
Et ce n’est pas tout : il faut savoir que si ce ratio combiné reste malgré tout positif, c’est grâce à l’assurance des professionnels, car le ratio combiné relatif à l’assurance non vie des particuliers s’avère régulièrement négatif au niveau national. Par exemple, en 2012, le ratio combiné des assurances habitation fut de 101, ce qui veut dire que les compagnies, pour chaque prime encaissée de 100 €, ont perdu 1 €. Elles ont donc globalement perdu de l’argent cette année là sur les assurances maisons. Et c’est la même chose pour la branche automobile dont le ratio combiné est repassé légèrement en dessous de 100 depuis 2013 seulement.
Aujourd’hui les compagnie d’assurances licencient, le nombre de salariés chez Groupama, par exemple, est passé de 24000 à 17000, soit une diminution de près de 30 % de l’effectif ! De grandes manœuvres sont en cours pour regrouper certaines compagnies dont les tailles ne sont plus assez importantes pour pouvoir survivre dans ce marché trop concurrentiel. Les bénéfices des compagnies sont aujourd’hui très faibles, et leurs gains essentiels proviennent de leurs investissements financiers.
Dieudonné s’apercevra vite que le théâtre de la Main d’Or ou les tournées dans les Zénith sont bien plus rentables proportionnellement.
Reste le deuxième hochet de Dieudonné : celui de la banque. Notre artiste semble ignorer la différence entre les banques de dépôt et les banques d’investissement. Car si certains gagnent beaucoup d’argent sur une spéculation fictive et inacceptable via les banques d’investissements, ce n’est pas avec les comptes bien souvent à découvert du français particulier de base que Dieudonné parviendra à gagner de l’argent.
Les paris sont ouverts !
Xavier Celtillos
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