Tribune libre
La franco-marocaine Najat Belkacem, certifiée Young Leader USA, a été chargée de « réagir face aux théories du complot ». Je voudrais dire à quel point je trouve la démarche absurde et vouée à l’échec de façon certaine.
La philosophie grecque a la réputation d’être difficile. Pour faire simple, quelle est la différence entre Aristote et Platon ? A mon sens, l’approche d’Aristote consiste à prendre ce qu’on voit pour ce qu’on voit, alors que l’approche de Platon consiste à prendre ce qu’on voit pour le révélateur d’autre chose, pré-existant et sous-jacent aux apparences, éventuellement quelque chose de transcendant. Il faut noter que les deux approches ne sont pas par nature incompatibles. Par exemple, on peut comparer l’ortograf kreyol, « fonetik », avec l’orthographe française, « étymologico-grammaticale ». Dans le premier cas, Aristote et dans le deuxième, Platon.
Fondamentalement, l’orthographe française est d’inspiration Platonicienne, raison pour laquelle elle contient quantité de lettres « muettes », mais non dépourvues de logique. Les deux orthographes sont légitimes, elles ne donnent pas de la langue la même apparence visuelle ni les mêmes informations grammaticales ou étymologiques.
En toute logique démocratique, l’ORTFitude PRAVDAtesque des médias officiels est censée alimenter les braves citoyens en informations fiables et pertinentes. Le plus simple pour tout le monde serait de penser que ce qu’on voit, dit ou entend est vrai. Autrement dit, le plus simple est de suivre Aristote : ce que je vois est ce que je vois et c’est vrai. Et, bien sûr, le plus simple pour les gouvernants est que les braves citoyens croient ce qui leur est dit et montré. Ce serait la situation idéalement simple. Pour être efficace, la parole politique doit être Aristotélicienne.
Venons-en aux « théories du complot ». Le complotisme est fondamentalement d’inspiration Platonicienne. Il repose sur deux points : (1) il existe autre chose que ce que dit et montre l’ORTFitude PRAVDAtesque, et (2) ce que ne dit pas et ne montre pas l’ORTFitude PRAVDAtesque est plus fiable et plus pertinent que ce qu’elle dit et montre.
Autrement dit, le complotisme est une disposition d’esprit, consistant à réfléchir, à remettre en question l’information officielle et à penser qu’en dehors de l’ORTFitude PRAVDAtesque, il existe une information meilleure. Le complotisme repose sur la défiance vis-à-vis des apparences officielles et sur un jugement de valeur négatif de celles-ci. On ne pourra jamais empêcher les gens de réfléchir ni d’évaluer. Le complotisme est foncièrement la rencontre de l’intelligence et de la défiance.
La franco-marocaine Najat Belkacem, en charge de la Rééducation-Déséducation anti-nationale, est donc mandatée pour rabattre les braves élèves vers la PRAVDA officielle de l’ORTFitude. Croyez ce qu’on vous dit officiellement, boudiou de boudiou !
La méthode suivie me semble vouée à l’échec. Parler *officiellement* de « théories du complot » revient à saper le principe même sur lequel doit reposer une parole politique efficace : ce que je dis est vrai, croyez-moi et tout ira pour le mieux.
En parlant *officiellement* de « théories du complot » et « manipulation », le Système se jette dans un bourbier inextricable. Il génère lui-même de la défiance en empêchant les gens d’être naïfs. Il fait lui-même l’aveu de sa perte de crédibilité. Si les complots existent et si la manipulation existe, pourquoi faudrait-il croire que le Système est sincère ?
La seule méthode efficace consisterait à fournir aux braves citoyens des informations de qualité, utiles, véridiques et pertinentes. Le vrai problème, ce n’est pas le complotisme, c’est la défiance et la vertigineuse perte de crédibilité de l’ORTFitude PRAVDAtesque des médias officiels.
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