C’est au nom de l’Égalité que la « théorie du genre » s’impose dans nos écoles avec l’ambition proclamée de « briser les stéréotypes », c’est-à-dire la différenciation sexuelle. La société civile s’en est alarmée et elle s’est mobilisée, en plaçant le débat sur le plan de la défense des valeurs morales.
Or, il ne s’agit pas seulement de politique ou de morale mais d’anthropologie.
Notre anthropologie, complexe, s’est élaborée dans trois cultures : la grecque, la latine et la sémite. Une grande partie de la culture antique a été sauvée par le filtre de la première synthèse judéo-chrétienne, effort de rigueur et de conciliation des Pères de l’Eglise, grecs et latins, orientaux et occidentaux.
Or, l’anthropologie grecque est aux antipodes de la pensée qui s’exprime dés les premières lignes de la Genèse. Il est bien tentant de faire l’impasse sur ce texte incommode du commencement qui fournit les principes d’intelligibilité non pas de « qui est l’homme », mais de « ce qu’il est ». Et qui implique une notion décisive : celle de « nature humaine » dont l’un des pics de visibilité est le corps sexué.
La destruction programmée de la différenciation sexuelle est rendue possible parce qu’elle se soutient invisiblement du paradigme « naturaliste », ou darwiniste qui s’est imposé depuis deux siècles et qui affirme que l’homme provient d’une évolution biologique, qu’il est un animal perfectionné.
La Bible ne dit pas cela. Le façonnement d’Adam à partir de la « adamah », (la terre informée), est suffisant pour faire de l’animal, on peut alors programmer. Mais il n’est pas suffisant pour qu’il y ait de l’homme. Pour cela, il faut que l’homme prenne le gouvernement de ses déterminations qui sont « conditions de possibilité » de sa liberté.
La première de ces déterminations, c’est celle de la vie animale.
Comment intégrer dans notre arche intérieure – sans refoulement, ni féroce répression – ces pulsions psychobiologiques à la force extrême? C’est la première alliance. Elle décrit figurativement comment cette vie pulsionnelle, fondement de la personne, figurativement représentée par les couples d’animaux est intégrée, par le patriarche Noé dans le « coffre d’alliance » et réintégrée le temps symbolique d’une gestation. Le système d’images biblique dit ceci que l’homme n’est pas un animal, mais que c’est le monde animal qui est en lui. Dés lors, la première des différenciations, dans la nature humaine, c’est celle entre la vie animale et la vie proprement humaine, déclinée à son tour en vie rationnelle et spirituelle.
Les théories du politique nées de Lumières avaient préparé le terrain. Elles conçoivent l’homme comme un «être collectif ». Elles se sont imposées avec une telle force que nous pensons aujourd’hui la société sur le modèle des sociétés animales. Et nos élites européennes programment avec une férocité inconsciente des hommes-fourmis dans des sociétés esclavagistes où ces « êtres-collectifs » sont taillables et corvéables à merci.
La nature humaine telle que l’anthropologie chrétienne l’a établie n’est pas un collectif : elle est « participée », elle est ce qu’on appelle en philosophie un universel. En bref, ça ne s’ajoute pas. C’est un « donné » qui fonde notre humanité, et par voie de conséquence notre « vivre ensemble.
Si l’homme est potentiellement libre, c’est en tant qu’il n’appartient pas au seul monde de la programmation, en tant qu’il n’est pas déterminé dans son action, en tant qu’il peut gouverner une partie de son être. Même s’il obéit à ses programmes, autrement dit à ses grandes déterminations psychobiologiques.
Et la seconde de ces grandes déterminations biologiques, c’est le corps sexué.
Toutes les sociétés traditionnelles ont perçu la fragilité de cette nature humaine. Au-delà de leur apparente diversité les rituels d’initiation ont tous le même sens : d’une part distinguer le masculin du féminin, d’autre part, opérer la différenciation franche entre le monde de la nature, (celui de la vie pulsionnelle ou animale) et le monde ce la culture, le monde de la ritualité, l’univers codifié et réglé de la société des adultes.
Et toutes les sociétés ont défini des conduites associées plus strictement à l’un ou l’autre sexe. Dans cet effort, elles ont été arbitraires, injustes, rigides et même violentes, en particulier envers les femmes. Et elles le sont encore.
C’est infiniment regrettable. Il faut travailler à réparer, à corriger, et à expliquer aussi. Sans faire, de la destruction de ces déterminations qui sont conditions de notre humanité et de l’exercice de notre liberté, un préalable.
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