Le procès de béatification de l’abbé Guérin est ouvert depuis 2013, il est actuellement reconnu comme « serviteur de Dieu ».

Michel Guérin est né à Laval, le 8 juin 1801 baptisé le jour même en l’église Saint-Vénérand, dans une famille foncièrement chrétienne où les dons de la grâce étaient plus appréciés que les faveurs de la fortune. Très tôt Michel sent l’appel de Dieu, mais la mort de son père, tisserand, laisse une situation financière précaire, il ne put suivre la voie toute simple et directe qui semblait tracée. Il connait très jeune les tribulations de la pauvreté. Ayant vendu la maison paternelle pour payer ses études au séminaire, la mère de Michel Guérin eut la joie, plus tard de mourir à Pontmain dans les bras de son cher fils.

Michel Guérin avait un caractère vif et enjoué, une bonté naturelle, une discrétion toute simple et une grande dévotion à la Vierge Marie à qui il confie son désir de devenir prêtre et ses difficultés « Je veux être prêtre mais je n’ai que ma bonne volonté à vous offrir’’. A son ordination, Mgr Bouvier, évêque du Mans, fut frappé par la piété extraordinaire du jeune ordonné et son humilité. L’abbé Guérin « voulait la paroisse la plus pauvre du diocèse ». Il fut nommé à Saint-Ellier « où l’on jouait aux cartes jusque dans l’église », petit hameau proche de Pontmain. Puis touché au cœur par la détresse morale de habitants de Pontmain alors privés de sacrements — depuis une dizaine d’années, Pontmain n’avait plus de prêtre desservant —, l’abbé Guérin obtient de Mgr Bouvier l’autorisation de s’y installer pour s’occuper des âmes, de l’église, du village, Il était un pasteur et avait trouvé un troupeau.

Sa vie est une prière ininterrompue. Et il exhorte ses ouailles à prier sans cesse. Cette piété communicative du pasteur fut récompensée par une transformation complète au point de vue religieux de tout le village. A l’indifférence succéda l’émulation pour la vertu. Les familles rivalisaient de bonne volonté. Pontmain devint un village qui prie ! L’abbé n’eut jamais recourt au vain prestige de l’éloquence humaine pour attirer son auditoire, il possédait le don de ramener les cœurs à Dieu. Sa parole ne manquait pas de la grâce qui touche, de la force qui persuade. Véritable apôtre, homme de foi, il était plein d’une ardeur qui entraîne. Catéchisme pour enfants, pour adultes, veillées de prières, chapelet, processions – il avait offert à toutes les familles du village une petite statue de la Vierge pour encourager la dévotion mariale-, il était à l’ouvrage sans relâche.

Le diable rugissait à proximité, la vie de l’homme sur la terre est bien une lutte continuelle. Le pieux abbé Guérin a expérimenté les assauts de l’enfer ; connu les amertumes des épreuves. Mais toujours ses pensées s’élevaient vers Notre-Dame et de ses lèvres jaillissait une invocation à la Bonne Mère. Le digne prêtre n’échappa pas non plus au venin de la calomnie. Il fut soupçonné, accusé, diffamé. Plus douloureuse que toutes les autres cette épreuve le frappa en plein cœur. Là encore, avec un abandon tout filial, il se jeta aux pieds de la Vierge Marie. Et nulle entrave n’arrêta les élans de son zèle.

Plus sensible aux malheurs de la France et de l’Eglise qu’à ses tribulations, l’abbé Guérin suivait anxieusement les événements politique et religieux. Apparitions à La Salette pour avertir des châtiments qui menacent la France, Révolution de 1848, Guerre de Crimée, Pie IX exilé, désastre de Sadowa, l’expédition du Mexique, la guerre de 1870 avec la Commune… C’est à l’église que le village accourait pour avoir des nouvelles et toucher le Ciel par la récitation des litanies, cantiques, chapelets, pour tous les malheureux fauchés par la mitraille.

Un 17 janvier 1871, « Monsieur le curé, les enfants voient la Sainte Vierge » crient les femmes essoufflées. Mais lui ne voit rien, il fait prier, chanter, trois heures durant. Puis le récit de ce merveilleux événement est consigné dans le registre des chroniques paroissiales par l’abbé. Messages, gestes de la Vierge, sa robe et les étoiles, les bougies qui s’allument… Le bruit se répand aux alentours. Le branle est donné, les curés arrivent, les pèlerinages s’organisent, prières publiques. Les chemins qui mènent à Pontmain s’animent, conversions, miracles. Plusieurs enquêtes sont menées avec une lenteur exaspérante, rien ne fut ménagé pour faire toute la lumière. Et le 2 février 1872 Mgr Wicart reconnaissait les apparitions et autorisait dans son diocèse le culte de la Vierge sous le vocable Notre-Dame d’espérance de Pontmain. Mais une grande épreuve allait encore toucher le bon abbé,  épreuve qu’il accueillit encore une fois avec humilité et patience.

Le 29 mai 1842, l’abbé est faible, alité. C’est la fin.  Au moment de rendre son âme à Dieu, au premier coup de l’Angélus « l’abbé Guérin souriait, tendu dans un geste d’accueil vers une présence invisible »…

Anne Bernet, postulatrice de sa cause nous livre ici une biographie magistrale du « petit curé de Pontmain ». Avec sa rigueur d’historienne l’auteur nous plonge dans cette fin de siècle tourmenté, tant pour la France que pour l’Eglise. Des pages d’histoire belles et sanglantes. Ses qualités d’écriture,  de rigueur et de passion font de cette biographie un monument incontournable pour connaitre les événements de Pontmain mais aussi leur histoire dans la grande Histoire de France. C’est toujours un événement à suivre ! Le message d’hier est pour demain.

La simplicité et la grâce – Michel Guérin, le petit curé de Pontmain, 150ème anniversaire de l’apparition, de Anne Bernet, Editions Artège, 640 pages, 26€

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