Si, à la lecture de ce titre vos yeux ne parpelègent pas et qu’aucun sourire ne passe sur vos lèvres, c’est que vous ne connaissez pas cette fameuse pièce d’Yvan Audouard.

Non, vous n’auriez pas pu oublier Honorine, la plantureuse poissonnière avec son franc parler, ses hanches rondes et ses rascasses qui sentent la vase, ni Pistachié, son mari, éternel chasseur sans prise, ni même l’Ange Boufareu (prononcez-le avec l’accent), le narrateur qui vous conte l’arrivée de la sainte Famille dans l’étable de Bethléem comme si vous y étiez !

Vous penseriez aussi, à Vincent et Mireille, le « pauvre » qui « se languit » de sa belle trop riche pour lui car Roustido -le père de Mireille-, le milliardaire de la région ne veut pas d’une union « rabaissante » pour sa fille.

 

Vous vous souviendriez aussi du ravi, ce grand fada qui porte sur la vie son regard de bonté, d’innocence et d’insouciance et qui raconte à l’aveugle -en direct, s’il vous plait – la scène poignante de la nativité.

Et le Boumian, et le gendarme… J’allais oublier le berger ; « Peuchère », comment peut-on oublier le berger ? Pourtant inoubliable ce penseur, trop triste pour rejoindre les autres car son plus fidèle ami – son chien – est mort ce matin. Qu’irait-il faire à la crèche avec sa peine ? Que pourrait-il amener au divin Niston sinon son chagrin ? 

Et c’est là que l’auteur nous livre le message évangélique : à la crèche, tout le mystère divin s’accomplit : avec la naissance dans les circonstances que l’on sait du Fils de Dieu, du rédempteur de l’humanité, c’est le paradis qui devient accessible à tous les hommes de bonne volonté.

 Alors, dès minuit, dès que vagit le petit Jésus, les miracles abondent :

Les rascasses d’Honorine resplendissent d’une bonne odeur, prêtes à faire une délicieuse bouillabaisse, Pistachié vient de tirer « la » plus belle lièvre qu’aucun confrère n’ait tiré depuis bien des années, Roustido pour sa part, consent tout à coup à donner la main de sa fille à Vincent, le boumian se sent devenir meilleur : il ne veut plus voler et le gendarme ressent un sentiment de compassion qui le surprend étonnamment et le berger ne peut contenir sa joie : son chien est ressuscité.

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Un seul ne veut pas qu’un miracle s’opère sur ses yeux qui ne voient plus depuis si longtemps : c’est l’aveugle qui a compris dans sa sagesse que la plus grande grâce qu’il puisse demander aujourd’hui n’est pas sa vue mais la vie divine que le Niston vient lui procurer… Ses paroles résonnent dans la crèche comme un écho du paradis : « Je sais bien que le monde il est beau, puisque c’est lui qui l’a fait mais je suis sûr que le ciel est encore plus beau puisque c’est là qu’il habite. Non, Bonne Mère, demandez-lui seulement que j’ai pas longtemps à attendre. Faites que j’ouvre les yeux le jour de ma mort. Faîtes que je vois quand ça vaudra vraiment la peine de voir ».

Voilà, vous savez l’essentiel sur cette pastorale jouée au moment de Noël en Provence et dans les régions alentours. Elle relate avec toute la faconde des gens du midi les quelques heures qui ont précédé la naissance de Jésus en ce premier Noël. Mais elle le relate à la méridionale avec ses énormités et ses contradictions que le spectateur (on devrait plutôt dire « le complice ») absorbe sans s’étonner. Elle sent bon la lavande, le pistou et la farigoulette.

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De nombreux spectacles de « pastorales » sont donnés chaque année entre décembre et janvier autant par des troupes professionnels que par des enfants d’écoles ou d’habitants d’un même village. A vous de trouver le plus proche de chez vous… Ou bien, pour les moins chanceux qui n’habitent pas dans le Midi, il y a toujours la solution de trouver le spectacle filmé sur internet.

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