Réaction à la « cancel culture » américaine (la culture de l’effacement) promue par les minorités et qui ravage les universités et la société civile : des professeurs, des intellectuels, des journalistes qui ont perdu leur emploi en raison de la pression exercée par le mouvement ‘woke’ (mouvement du réveil), souvent via twitter, ou qui ont démissionné afin de ne pas subir davantage ces pressions ou parce qu’ils combattent pour que la « culture de l’annulation » n’annihile pas la dissidence, la liberté d’expression, le dialogue se sont regroupés et ont donné naissance à l’université d’Austin.
« La naissance de l’Université d’Austin, relate Il foglio italien, a été annoncée dans le « baby-media » Common Sense de Bari Weiss, avec un article au ton triomphant de Pano Kanelos, qui quitte la présidence du St. John’s College d’Annapolis, pour prendre celle de cette nouvelle université : en fin de journée, alors que tous les membres fondateurs célébraient et expliquaient le choix de vivre ensemble dans cette maison, neuf cents futurs étudiants avaient écrit pour obtenir des informations sur le programme d’études (les cours commenceront l’été prochain). »
Pano Kanelos, l’ancien recteur du St. John’s College, a expliqué que cette université sera « farouchement indépendante » et alternative, dont le but fondamental est « la recherche intrépide de la vérité » « la vertu la plus importante » :
« Nous ne pouvons attendre que les universités guérissent d’elles-mêmes. C’est pourquoi nous en ouvrons une nouvelle. »
Le postulat est clair : les autres universités ne poursuivent plus la vérité, et donc l’université d’Austin est née de la conscience d’un échec, le système ne pouvant plus être changé de l’intérieur. Il faut donc essayer de le faire avec une nouvelle entité, qui concurrencera les temples du politiquement correct de l’éducation américaine.
Les membres fondateurs de l’université d’Austin, de Bari Weiss à l’historien Niall Ferguson, du cofondateur de Palantir (société spécialisée dans la collecte et l’analyse de données) Joe Lonsdale à l’intellectuel Steven Pinker, sont des ennemis déclarés de « l’illibéralisme de gauche » et du « chantage exercé par la pureté ‘wokeness’ ». La ‘wokeness’ est l’ultime évolution du politiquement correct selon laquelle il faut rester « éveillé » contre toutes formes de préjugés et donc viser à actualiser les grandes œuvres du passé ou à décapiter les statues de personnages historiques importuns.
Bari Weiss, une des figures importantes du mouvement à la racine de la création de l’université d’Austin, est la journaliste qui a démissionné du New York Times, se plaignant que Twitter était devenu le rédacteur en chef du journal. Weiss a apporté une réponse à la crise des grands journaux traditionnels. Et il a créé Common Sense, un bulletin d’information et un podcast qui racontent également des histoires qui ne correspondent pas à la narration traditionnelle. Le professeur Niall Ferguson, à son tour, a critiqué l’autoflagellation de l’Occident comme Steven Pinker a durement critiqué la « théorie critique de la race » selon laquelle si vous êtes blanc, vous êtes un suprémaciste né.
« Je ne suis pas favorable, a expliqué Pinker dans une interview, à une quelconque idéologie qui dit que tous les Blancs sont racistes et le seront toujours, et que la société est un conflit constant entre différents groupes raciaux. C’est le contraire de l’idée égalitaire progressiste que je défends : les gens devraient être jugés sur leurs mérites et leurs qualités individuelles, nous devrions ignorer la race autant que possible. (…) Cette approche a été rejetée par les partisans de la théorie critique de la race. Ils soutiennent qu’on ne peut pas échapper à sa race et que les gens ne peuvent pas surmonter leurs pulsions racistes. Je pense que cette idée est fausse, que le racisme diminue, c’est ce que disent toutes les données. Nous devons nous efforcer de progresser sans juger les gens sur la couleur de leur peau ».
L’ouverture de cette université est considérée comme « un tournant important, explique Tempi.it, dans la résistance à la vague ‘’woke’’ qui domine la ‘’guerre des cultures’’ en Amérique, et ce n’est pas seulement réactionnaire et conservateur. Tout d’ abord, parce que bon nombre des fondateurs de l’Université d’Austin ne sont pas conservateurs, mais viennent du monde progressiste. Ils ont simplement réalisé que quelque chose n’allait pas. Beaucoup d’entre eux ont subi des répercussions sur le lieu de travail parce qu’ils ne sont pas pleinement alignés sur le dogme politiquement correct concernant la race, le genre et le féminisme ».
Les fondateurs veulent créer un espace où il est possible de penser différemment les uns des autres et du courant dominant, tout en vivant ensemble. L’enthousiasme monte en flèche, tout comme le sentiment d’urgence : on ne peut pas rester ici pour se plaindre tout le temps, dit Weiss, c’est une proposition concrète, une alternative, qui retrouve le sens de l’éducation et aussi de la confrontation, parce que l’université aura un campus, ce sera un lieu pour se rencontrer, discuter, retrouver l’envie de se parler, contre l’autocensure qui s’est généralisée dans de nombreux milieux scolaires et professionnels. L’Amérique se réveillerait-elle enfin de certains de ses démons par trop politiquement corrects ?
Francesca de Villasmundo
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