La Fraternité Saint-Pierre chassée du diocèse de Dijon
Le diocèse s’en explique dans un communiqué qui met en avant des questions de fond : l’acceptation sans ambiguïté de la nouvelle messe et du concile Vatican II.
Qu’est-il reproché à la Fraternité Saint-Pierre et qui justifie, pour le diocèse, son départ ? Le refus de concélébrer dans le rite de Paul VI et prétendre s’en tenir exclusivement au rite traditionnel d’une part ; le développement d’un apostolat séparé de celui du diocèse d’autre part.
Quant au premier point, l’on apprend ainsi que dans le cahier des charges précisant les conditions de leur accueil dans le diocèse bourguignon, « il avait été convenu que le prêtre de la Fraternité [Saint-Pierre] devrait aussi célébrer de temps en temps avec les autres prêtres pour qu’il n’y ait pas de séparation étanche entre les deux rites ».
Cette condition a été remplie par un desservant de ladite Fraternité pendant une petite décennie, jusqu’en 2016. « Depuis lors les abbés nommés par la Fraternité se refusent à ce geste de communion sacerdotale et sacramentelle ». Ce qui est perçu par le diocèse comme un « endurcissement ». L’évêque de Dijon ne peut tolérer que l’usage du rite traditionnel soit conçu comme un refus du rite de Paul VI. Il se montre ainsi logique avec la distinction inventée par Benoît XVI entre les deux formes d’un même rite romain, le rite ordinaire et le rite extraordinaire. Dans l’optique du motu proprio Summorum Pontificum, l’un ne peut exclure l’autre.
Quant au second point, le diocèse note que les prêtres de la Fraternité Saint-Pierre ont constitué une « communauté parallèle » dont toute une partie « rejette ce qu’ils appellent ‘l’Église conciliaire’ ». « On aura compris qu’il ne s’agit pas seulement d’une question de rite », mais de l’acceptation ou du refus du Concile Vatican II. Cette attitude double (se présenter comme étant à l’intérieur du diocèse tout en agissant « d’une manière autonome ») n’est pas acceptable pour le diocèse de Dijon. Si en effet aucune grave question de foi n’est en cause, pourquoi briser l’unité de la vie diocésaine ?
C’est donc désormais un prêtre diocésain qui assurera la messe traditionnelle dans l’église où célébraient jusque-là les prêtres de la Fraternité Saint Pierre : le diocèse invite les fidèles pour tous les autres services pastoraux à recourir aux paroisses les plus proches.
L’on peut saluer le refus de la majorité des prêtres de la Fraternité Saint-Pierre de concélébrer la nouvelle messe, mais aussi constater que le diocèse de Dijon se montre logique : si l’on réduit officiellement le combat de la Tradition à une simple question de sensibilité ou de « choix personnel »[1], on voit mal quel argument pourrait lui être opposé.
Cette décision de l’évêque de Dijon manifeste la grande clairvoyance du fondateur de la Fraternité Saint-Pie X Mgr Marcel Lefebvre, prédisant le piège que représentaient ces communautés ecclésiadéistes voulant prospérer sur la condamnation des sacres de 1988 par le motu proprio Ecclesia Dei adflicta : » Il est évident qu’en se mettant dans les mains des autorités actuelles conciliaires, ils admettent implicitement le concile et les réformes qui en sont issues, même s’ils reçoivent des privilèges qui demeurent exceptionnels et provisoires. Leur parole est paralysée par cette acceptation. Les évêques les surveillent. » (Lettre à l’abbé Daniel Couture, 18 mars 1989, dans Bernard Tissier de Mallerais, Marcel Lefebvre, une vie, Clovis, 2002, p. 600.)
La Fraternité Saint-Pierre et les communautés ecclésiadéistes
Suite aux sacres épiscopaux de 1988, Rome a concédé la célébration de l’ancienne liturgie à quelques communautés[2], afin de récupérer les prêtres et les fidèles de la Fraternité Saint-Pie X[3]. Parmi elles, la Fraternité Saint Pierre, fondée le 18 juillet 1988, soit deux semaines après le motu proprio Ecclesia Dei adflicta. Ces communautés ecclésiadéistes[4] bénéficient de l’acte héroïque posé par Mgr Lefebvre le 30 juin 1988. Si le fondateur d’Ecône n’avait pas effectué ces sacres épiscopaux, la Rome conciliaire ne leur aurait jamais accordé la liturgie traditionnelle. En contrepartie de cette concession, elles doivent reconnaître la nouvelle messe comme un rite pleinement légitime et accepter (ou du moins, ne pas critiquer de manière officielle) les documents conciliaires. Un tel silence officiel constitue, en soi, une complicité coupable.
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