Privée de sommeil et armée seulement d’une kalachnikov, Avshin « Kobane » sait que chaque jour pourrait être son dernier. Mais elle n’a pas peur de se battre sur la ligne de front pour défendre contre l’un des groupes islamistes les plus violents dans le monde, la ville syrienne de Kobané à qui elle emprunte son nom de guerre. « Il n’y a pas de différence entre les hommes et les femmes dans notre société», a déclaré un membre du gouvernement militaire kurde.
«En tant que femme, je dois défendre ma ville natale. Cela ne doit pas être laissé seulement aux hommes. Quand nous sommes sur la ligne de front et que Daech commence à tirer sur nous, nous nous sentons plus courageuses. Nous remercions Dieu d’être ici. Les combattants d’EI (État islamique) sont des monstres, mais nous n’avons pas peur ».
Avshin « Kobane » et ses compagnes de lutte savent qu’elles seront décapitées si elles sont prises par les djihadistes de l’État islamique. Cependant, au cours du week-end, après des mois de combats, leur sacrifice est apparu enfin porter ses fruits. S’exprimant au téléphone elle a déclaré que le moral au sein du groupe de bataille qu’elle commandait, était stimulé après une campagne de frappes aériennes intensives effectuées par la coalition sous commandement américain. Celles-ci les avaient aidées à repousser l’EI à nouveau dans un coin de la ville. « Environ 90 pour cent de la ville est maintenant sous notre contrôle, bien que les combats fassent rage dans un parc industriel à l’Est, et que nous soyons toujours canardés.»
Hier, les forces kurdes YPJ ((Unités féminines de protection) ont repoussé une nouvelle tentative de l’État islamique pour couper le passage de la frontière avec la Turquie ; c’est la seule voie pour les Kurdes pour recevoir des approvisionnements ou pour s’échapper. L’armée américaine a expliqué qu’il y a des signes encourageants. « La ville de Kobane peut encore tomber alors que les djihadistes envoient des renforts. Mais les récents gains vont à l’encontre des prévisions faites il y a deux semaines d’une défaite imminente des Kurdes »
Si le YPJ et son homologue masculin, le GPJ, réussissent à libérer la ville, ce sera un coup psychologique énorme dans une guerre de propagande qui a dépeint les djihadistes comme invincibles dans leur trajectoire à travers la Syrie et l’Irak. Peut-être en partie en reconnaissance de cela, la semaine dernière, la coalition sous commandement américain a intensifié les frappes aériennes sur la ville assiégée : la plupart des 200.000 habitants ont fui vers les camps de réfugiés à la frontière turque. Plus de bombes ont été larguées sur Kobané la semaine dernière que durant toute la campagne aérienne contre l’EI en Syrie et en Irak à ce jour. Plus de 50 frappes aériennes l’avaient touché.
Les femmes kurdes se battent contre l’État islamique depuis plus d’un an dans les villages environnants Kobané et ont gagné une réputation redoutable. Elles inspirent la peur car certains islamistes considèrent que s’ils sont tués par une femme, cette humiliation les privera du paradis d’Allah. Mamoste Viyane, une combattante d’une trentaine d’année, a été transformée en lionne depuis qu’elle a été blessée d’une balle à la tête l’an dernier. Son rôle a été de détourner l’attention des djihadistes loin de ses camarades. Son histoire aurait encouragé beaucoup de jeunes femmes à s’enrôler.
Avshin « Kobane » explique qu’avant que l’Etat Islamique ne menace sa ville natale, elle avait prévu d’aller à l’université, se marier et avoir des enfants. « Tout ce que je veux faire maintenant, c’est sauver mon peuple », dit-elle. Actuellement, elle doit trouver le sommeil dans des bâtiments vides ou dans des trous abandonnés dans le sol. Elle survit sur de maigres rations alors que plus bas dans la ville, les djihadistes attaquent. «Nous les voyons avec des jumelles lorsque nous sommes sur la ligne de front », dit-elle. « Beaucoup d’entre eux ne savent pas comment se battre. Ils n’ont pas de tactiques ou de stratégies. Ils se battent comme des monstres : seulement attaquer et attaquer. Je ne peux pas dire que ma famille n’a pas peur pour moi, mais elle est très fière de moi ».
« Nous nous battons au nom de la communauté internationale. Nous nous attendons à plus d’efforts venant d’Europe et des États-Unis », a déclaré Idriss Nassan, chef adjoint du Comité des affaires étrangères de Kobané.
Les Kurdes d’Irak et la Syrie commencent maintenant à s’unir. « Plus de Kurdes unis et une forte alliance avec l’Occident aura un effet important non seulement dans la défaite de Daech mais aussi dans la construction de la démocratie réelle au Moyen-Orient », a déclaré Nazmi Gur, un chef de file du parti politique kurde turc HDP. « Les Kurdes se réveillent. »
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