Ascension de Notre-Seigneur
Ineffable fête de l’Ascension, de cette fête empreinte d’une si douce mélancolie, mais qui respire en même temps plus qu’aucune autre la joie et le triomphe.

Ascension de Notre Seigneur : « L’Ascension du Christ est notre élévation. »

Le jour s’est levé radieux, la terre qui s’émut à la naissance de l’Emmanuel éprouve un tressaillement inconnu ; l’ineffable succession des mystères de l’Homme-Dieu est sur le point de recevoir son dernier complément. Mais l’allégresse de la terre est montée jusqu’aux cieux ; les hiérarchies angéliques s’apprêtent à recevoir le divin chef qui leur fut promis, et leurs princes sont attentifs aux portes, prêts à les lever quand le signal de l’arrivée du triomphateur va retentir. Les âmes saintes, délivrées des limbes depuis quarante jours, planent sur Jérusalem, attendant l’heureux moment où la voie du ciel, fermée depuis quatre mille ans par le péché, s’ouvrant tout à coup, elles vont s’y précipiter à la suite de leur Rédempteur. L’heure presse, il est temps que notre divin Ressuscité se montre, et qu’il reçoive les adieux de ceux qui l’attendent d’heure en heure, et qu’il doit laisser encore dans cette vallée de larmes. Tout à coup il apparaît au milieu du Cénacle. Le cœur de Marie a tressailli, les disciples et les saintes femmes adorent avec attendrissement celui qui se montre ici-bas pour la dernière fois. Jésus daigne prendre place à table avec eux ; il condescend jusqu’à partager un dernier repas, non plus dans le but de les rendre certains de sa résurrection ; il sait qu’ils n’en doutent plus ; mais, au moment d’aller s’asseoir à la droite du Père, il tient à leur donner cette marque si chère de sa divine familiarité. O repas ineffable, où Marie goûte une dernière fois en ce monde le charme d’être assise aux côtés de son fils, où la sainte Église représentée par les disciples et par les saintes femmes est encore présidée visiblement par son Chef et son Époux ! Qui pourrait exprimer le respect, le recueillement, l’attention des convives, peindre leurs regards fixés avec tant d’amour sur le Maître tant aimé ? Ils aspirent à entendre encore une fois sa parole ; elle leur sera si chère à ce moment du départ ! Enfin Jésus ouvre la bouche ; mais son accent est plus grave que tendre. Il débute en leur rappelant l’incrédulité avec laquelle ils accueillirent la nouvelle de sa résurrection. Au moment de leur confier la plus imposante mission qui ait jamais été transmise à des hommes, il veut les rappeler à l’humilité. Sous peu de jours ils seront les oracles du monde, le monde devra croire sur leur parole, et croire ce qu’il n’a pas vu, ce qu’eux seuls ont vu. C’est la foi qui met les hommes en rapport avec Dieu ; et cette foi, eux-mêmes ne l’ont pas eue tout d’abord : Jésus veut recevoir d’eux une dernière réparation pour leur incrédulité passée, afin que leur apostolat soit établi sur l’humilité. Prenant ensuite le ton d’autorité qui convient à lui seul, il leur dit : « Allez dans le monde entier, prêchez l’Évangile à toute créature. Celui qui croira et sera baptisé, sera sauvé ; mais celui qui ne croira pas sera condamné ». Et cette mission de prêcher l’Évangile au monde entier, comment l’accompliront-ils ? Par quel moyen réussiront-ils à accréditer leur parole ? Jésus le leur indique : « Voici les miracles qui accompagneront ceux qui auront cru : ils chasseront les démons en mon nom ; ils parleront des langues nouvelles ; ils prendront les serpents avec la main ; s’ils boivent quelque breuvage mortel, il ne leur nuira pas ; ils imposeront les mains sur les malades, et les malades seront guéris ». Il veut que le miracle soit le fondement de son Église, comme il l’a choisi pour être l’argument de sa mission divine. La suspension des lois de la nature annonce aux hommes que l’auteur de la nature va parler ; c’est à eux alors d’écouter et de croire humblement. Voilà donc ces hommes inconnus au monde, dépourvus de tout moyen humain, les voilà investis de la mission de conquérir la terre et d’y faire régner Jésus-Christ. Le monde ignore jusqu’à leur existence ; sur son trône impérial, Tibère, qui vit dans la frayeur des conjurations, ne soupçonne en rien cette expédition d’un nouveau genre qui va s’ouvrir, et dont l’empire romain doit être la conquête. Mais à ces guerriers il faut une armure, et une armure de trempe céleste. Jésus leur annonce qu’ils sont au moment de la recevoir. « Demeurez dans la ville, leur dit-il, jusqu’à ce que vous ayez été revêtus de la vertu d’en haut ». Or, quelle est cette armure ? Jésus va le leur expliquer. Il leur rappelle la promesse du Père, « cette promesse, dit-il, que vous avez entendue par ma bouche. Jean a baptisé dans l’eau ; mais vous, sous peu de jours, vous serez baptisés dans le Saint-Esprit ». Mais l’heure de la séparation est venue. Jésus se lève, et l’assistance tout entière se dispose à suivre ses pas. Cent vingt personnes se trouvaient là réunies avec la mère du divin triomphateur que le ciel réclamait. Le Cénacle était situé sur la montagne de Sion, l’une des deux collines que renfermait l’enceinte de Jérusalem. Le cortège traverse une partie de la ville, se dirigeant vers la porte orientale qui ouvre sur la vallée de Josaphat. C’est la dernière fois que Jésus parcourt les rues de la cité réprouvée. Invisible désormais aux yeux de ce peuple qui l’a renié, il s’avance à la tête des siens, comme autrefois la colonne lumineuse qui dirigeait les pas du peuple israélite. Qu’elle est belle et imposante cette marche de Marie, des disciples et des saintes femmes, à la suite de Jésus qui ne doit plus s’arrêter qu’au ciel, à la droite du Père ! La piété du moyen âge la célébrait jadis par une solennelle procession qui précédait la Messe de ce grand jour. Heureux siècles, où les chrétiens aimaient à suivre chacune des traces du Rédempteur, et ne savaient pas se contenter, comme nous, de quelques vagues notions qui ne peuvent enfanter qu’une piété vague comme elles ! On songeait aussi alors aux sentiments qui durent occuper le cœur de Marie durant ces derniers instants qu’elle jouissait de la présence de son fils. On se demandait qui devait l’emporter dans ce cœur maternel, de la tristesse de ne plus voir Jésus, ou du bonheur de sentir qu’il allait entrer enfin dans la gloire qui lui était due. La réponse venait promptement à la pensée de ces véritables chrétiens, et nous aussi, nous nous la ferons à nous-mêmes. Jésus n’avait-il pas dit à ses disciples : « Si vous m’aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je m’en vais à mon Père ? » Or, qui aima plus Jésus que ne l’aima Marie ? Le cœur de la mère était donc dans l’allégresse au moment de cet ineffable adieu. Marie ne pouvait songer à elle-même, quand il s’agissait du triomphe dû à son fils et à son Dieu. Après les scènes du Calvaire, pouvait-elle aspirer à autre chose qu’à voir glorifié enfin celui qu’elle connaissait pour le souverain Seigneur de toutes choses, celui qu’elle avait vu si peu de jours auparavant renié, blasphémé, expirant dans toutes les douleurs. Le cortège sacré a traversé la vallée de Josaphat, il a passé le torrent de Cédron, et il se dirige sur la pente du mont des Oliviers. Quels souvenirs se pressent à la pensée ! Ce torrent, dont le Messie dans ses humiliations avait bu l’eau bourbeuse, est devenu aujourd’hui le chemin de la gloire pour ce même Messie. Ainsi l’avait annoncé David. On laisse sur la gauche le jardin qui fut témoin de la plus terrible des agonies, cette grotte où le calice de toutes les expiations du monde fut présenté à Jésus et accepté par lui. Après avoir franchi un espace que saint Luc mesure d’après celui qu’il était permis aux Juifs de parcourir le jour du Sabbat, on arrive sur le territoire de Béthanie, cet heureux village où Jésus, dans les jours de sa vie mortelle, recherchait l’hospitalité dé Lazare et de ses sœurs. De cet endroit de la montagne des Oliviers on avait la vue de Jérusalem, qui apparaissait superbe avec son temple et ses palais. Cet aspect émeut les disciples. La patrie terrestre fait encore battre le cœur de ces hommes ; un moment ils oublient la malédiction prononcée sur l’ingrate cité de David, et semblent ne plus se souvenir que Jésus vient de les faire citoyens et conquérants du monde entier. Le rêve de la grandeur mondaine de Jérusalem les a séduits tout à coup, et ils osent adresser cette question à leur Maître : « Seigneur, est-ce à ce moment que vous rétablirez le royaume d’Israël ? » Jésus répond avec une sorte de sévérité à cette demande indiscrète : « Il ne vous appartient pas de savoir les temps et les moments que le Père a réservés à son pouvoir. » Ces paroles n’enlevaient pas l’espoir que Jérusalem fût un jour réédifiée par Israël devenu chrétien ; mais ce rétablissement de la cité de David ne devant avoir lieu que vers la fin des temps, il n’était pas à propos que le Sauveur fît connaître le secret divin. La conversion du monde païen, la fondation de l’Église, tels étaient les objets qui devaient préoccuper les disciples. Jésus les ramène tout aussitôt à la mission qu’il leur donnait il y a peu d’instants : « Vous allez recevoir, leur dit-il, la vertu du Saint-Esprit qui descendra sur vous, et vous serez mes témoins dans Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre ». Selon une tradition qui remonte aux premiers siècles du christianisme, il était l’heure de midi, l’heure à laquelle Jésus avait été élevé sur la croix, lorsque, jetant sur l’assistance un regard de tendresse qui dut s’arrêter avec une complaisance filiale sur Marie, il éleva les mains et les bénit tous. A ce moment ses pieds se détachèrent de la terre, et il s’élevait au ciel. Les assistants le suivaient du regard ; mais bientôt il entra dans une nuée qui le déroba à leurs yeux. C’en était fait : la terre avait perdu son Emmanuel. Quarante siècles l’avaient attendu, et il s’était rendu enfin aux soupirs des Patriarches et aux vœux enflammés des Prophètes. Nous l’adorâmes, captif de notre amour, dans les chastes flancs de la Vierge bénie. Bientôt l’heureuse mère nous le présenta sous l’humble toit d’une étable à Bethléhem. Nous le suivîmes en la terre d’Égypte, nous l’accompagnâmes au retour, et nous vînmes nous fixer avec lui à Nazareth. Lorsqu’il partit pour exercer sa mission de trois ans dans sa patrie terrestre, nous nous attachâmes à ses pas, ravis des charmes de sa personne, écoutant ses discours et ses paraboles, assistant à ses prodiges. La malice de ses ennemis étant montée à son comble, et l’heure venue où il devait mettre le sceau à cet amour qui l’avait attiré du ciel en terre par la mort sanglante et ignominieuse de la croix, nous recueillîmes son dernier soupir et nous fûmes inondés de son sang divin. Le troisième jour, il s’échappait de son sépulcre vivant et victorieux, et nous étions là encore pour applaudir à son triomphe sur la mort, par lequel il nous assurait la gloire d’une résurrection semblable à la sienne. Durant les jours qu’il a daigné habiter encore cette terre, notre foi ne l’a pas quitté ; nous eussions voulu le conserver toujours ; et voici qu’à cette heure même il échappe à nos regards, et notre amour n’a pu le retenir ! Plus heureuses que nous, les âmes des justes qu’il avait délivrées des limbes l’ont suivi dans son vol rapide, et elles jouissent pour l’éternité des délices de sa présence. Les disciples tenaient encore les yeux fixés au ciel, lorsque soudain deux Anges vêtus de blanc se présentèrent à eux et leur dirent : « Hommes de Galilée, pourquoi vous arrêtez-vous à regarder au ciel ? Ce Jésus qui vous a quittés pour s’élever au ciel reviendra un jour en la même manière que vous l’avez vu monter ». Ainsi, le Sauveur est remonté, et le juge doit un jour redescendre : toute la destinée de l’Église est comprise entre ces deux termes. Nous vivons donc présentement sous le régime du Sauveur ; car notre Emmanuel nous a dit que « le fils de l’homme n’est pas venu pour juger le monde, mais afin que le monde soit sauvé par lui » ; et c’est dans ce but miséricordieux que les disciples viennent de recevoir la mission d’aller par toute la terre et de convier les hommes au salut, pendant qu’il en est temps encore. Quelle tâche immense Jésus leur a confiée ! Et au moment où il s’agit pour eux de s’y livrer, il les quitte ! Il leur faut descendre seuls cette montagne des Oliviers d’où il est parti pour le ciel. Leur cœur cependant n’est pas triste ; ils ont Marie avec eux, et la générosité de cette mère incomparable se communique à leurs âmes. Ils aiment leur Maître ; leur bonheur est désormais de penser qu’il est entré dans son repos. Les disciples rentrèrent dans Jérusalem, « remplis d’une « vive allégresse », nous dit saint Luc, exprimant par ce seul mot l’un des caractères de cette ineffable fête de l’Ascension, de cette fête empreinte d’une si douce mélancolie, mais qui respire en même temps plus qu’aucune autre la joie et le triomphe. Durant son Octave, nous essayerons d’en pénétrer les mystères et de la montrer dans toute sa magnificence ; aujourd’hui nous nous bornerons à dire que cette solennité est le complément de tous les mystères de notre divin Rédempteur, qu’elle est du nombre de celles qui ont été instituées par les Apôtres eux-mêmes ; enfin qu’elle a rendu sacré pour jamais le jeudi de chaque semaine, jour rendu déjà si auguste par l’institution de la divine Eucharistie. Nous avons parlé de la procession solennelle par laquelle on célébrait, au moyen âge, la marche de Jésus et de ses disciples vers le mont des Oliviers ; nous devons rappeler aussi qu’en ce jour on bénissait solennellement du pain et des fruits nouveaux, en mémoire du dernier repas que le Sauveur avait pris dans le Cénacle. Imitons la piété de ces temps où les chrétiens avaient à cœur de recueillir les moindres traits de la vie de l’Homme-Dieu, et de se les rendre propres, pour ainsi dire, en reproduisant dans leur manière de vivre toutes les circonstances que le saint Évangile leur révélait. Jésus-Christ était véritablement aimé et adoré dans ces temps où les hommes se souvenaient sans cesse qu’il est le souverain Seigneur, comme il est le commun Rédempteur. De nos jours, c’est l’homme qui règne, à ses risques et périls ; Jésus-Christ est refoulé dans l’intime de la vie privée. Et pourtant il a droit à être notre préoccupation de tous les jours et de toutes les heures ! Les Anges dirent aux Apôtres : « En la manière que vous l’avez vu monter, ainsi un jour il descendra. » Puissions-nous l’avoir aimé et servi durant son absence avec assez d’empressement, pour oser soutenir ses regards lorsqu’il apparaîtra tout à coup !

Saint Venant de Camerino, martyr, dix-huit mai
Sous l’empereur Dèce et le préfet Antiochus, il eut la tête tranchée, et ainsi, âgé de quinze ans, il consomma son glorieux martyre, avec dix compagnons.

Sanctoral

Saint Venant, Martyr

Venant, de Camérino, avait quinze ans, lorsqu’il fut dénoncé comme chrétien à Antiochus alors gouverneur de la ville pour l’empereur Dèce. Il se présenta lui-même aux portes de la ville à ce magistrat, qui, après l’avoir tenté longuement par des promesses et des menaces, ordonna de le battre de verges et de le charger de chaînes. Un Ange délie miraculeusement ses liens ; il est alors brûlé avec des torches ardentes, puis suspendu, la tête en bas, au-dessus d’un feu allumé sous lui. Sa constance dans les tourments frappe d’admiration le greffier Anastase, et quand il le voit, une seconde fois délié par l’Ange, marcher, vêtu de blanc, au-dessus de la fumée, il croit en Jésus-Christ, et se fait baptiser avec sa famille par le bienheureux Prêtre Porphyre, en compagnie duquel il remporte, peu de temps après, la palme du martyre. Ramené devant le gouverneur, et inutilement sollicité d’abandonner la foi du Christ, Venant est jeté en prison. Le gouverneur envoie un héraut, nommé Attale, qui vient dire à Venant que lui aussi a été chrétien, mais qu’il a renoncé à ce titre, parce qu’il a reconnu la vaine illusion d’une foi en raison de laquelle les Chrétiens se privent des biens présents, dans l’espérance chimérique de biens futurs. Le noble athlète du Christ, qui connaît les ruses de notre perfide ennemi, repousse loin de lui ce ministre du démon. On le ramène donc devant le gouverneur : on lui casse toutes les dents et on lui brise les mâchoires, et, ainsi mutilé on le jette sur un fumier Mais un Ange vient encore le délivrer. On le fait comparaître de nouveau devant le juge, et celui-ci, à la voix de Venant qui parlait toujours tombe de son siège en s’écriant : « Le Dieu de Venant est le vrai Dieu ; renversez les nôtres ». A cette nouvelle, le gouverneur fit aussitôt exposer Venant aux lions ; mais contrairement à leur férocité habituelle, ces animaux se jetèrent à ses pieds. Pendant ce temps, le jeune homme enseignait au peuple la foi du Christ ; aussi fut-il éloigné et remis en prison. Le lendemain. Porphyre ayant raconté au gouverneur une vision qu’il avait eue pendant la nuit, et dans laquelle il avait vu Venant resplendissant de lumière baptiser le peuple, tandis qu’un brouillard épais couvrait le gouverneur, celui-ci, transporté de colère, donna l’ordre de lui trancher immédiatement la tête ; il commanda ensuite de traîner Venant jusqu’au soir par des lieux couverts d’épines et de chardons. On le laissa à demi-mort, mais dès le lendemain matin, il se présentait de nouveau devant le gouverneur, qui le fit aussitôt précipiter du haut d’un rocher. Arraché encore par miracle à cette mort, Venant fut traîné jusqu’à un mille de la ville par les plus rudes sentiers ; là les soldats ayant soif, Venant s’agenouilla sur une pierre qui se trouvait à proximité, dans une dépression du sol ; ayant tracé sur elle le signe de la croix, il en jaillit de l’eau. Il laissa sur cette pierre l’empreinte de ses genoux, ainsi qu’on peut le voir encore dans son église où elle est conservée. Touchés de ce miracle, plusieurs soldats crurent en Jésus-Christ. Le gouverneur leur fit trancher la tête ainsi qu’à Venant, sur les lieux mêmes. Aussitôt il y eut un orage et un tremblement de terre tels que le gouverneur prit la fuite ; mais il ne put se dérober à la justice divine, et il périt peu de jours après l’une mort très honteuse. Pendant ce temps, les Chrétiens ensevelirent à une place d’honneur le Martyr et ses compagnons, et leurs corps ont conservés jusqu’à ce jour, à Camérino, dans l’Église dédiée à Saint Venant.

Saint Félix de Cantalice, Premier Ordre Capucin, dix-huit mai
Faint Félix confesseur, de l’Ordre des Frères Mineurs Capucins, remarquable par sa simplicité évangélique et sa charité.

Saint Félix de Cantalice, Premier Ordre Capucin († 1587)

Félix vit le jour à Cantalice, bourgade située au pied de l’Apennin. Dès le bas âge, il manifesta de telles marques de prédestination que ses compagnons l’avaient surnommé « le petit Saint ». Ses parents, qui étaient de pauvres laboureurs, l’employèrent de bonne heure à garder les troupeaux. Cette vie allait bien à l’âme méditative de l’enfant: peu enclin aux conversations oiseuses, il recherchait les lieux solitaires, et y répétait souvent le Pater et l’Ave et les quelques formules pieuses qu’on lui avait apprises. Lorsque les autres bergers se livraient au sommeil, lui s’agenouillait devant un arbre sur l’écorce duquel il avait gravé une Croix. À neuf ans, Félix passa au service d’un riche bourgeois qui lui confia d’abord la garde de ses troupeaux, puis le chargea du labourage de ses terres. Le jeune homme aima son nouvel emploi qui lui permettait d’assister tous les jours à la Messe avant de se rendre aux champs. Cet humble travailleur, sans instruction, qui n’avait fréquenté aucune école, avait beaucoup appris du Saint-Esprit. Comme il l’avouait plus tard, il ne connaissait que six lettres: cinq rouges et une blanche. Les cinq rouges étaient les cinq plaies du Sauveur, et la blanche était la Vierge Marie. Dieu lui inspira d’embrasser un genre de vie plus parfait. À un parent qui lui objectait les austérités de la vie religieuse, il répondit: « Je veux être religieux tout de bon ou ne pas m’en mêler ». Il alla frapper à la porte des Capucins. À la vue de ce paysan du Danube, le Père Gardien, voulant l’éprouver, lui dit: « Vous venez sans doute ici pour avoir un habit neuf et y vivre sans rien faire. Ou bien vous croyez que vous allez commander aux religieux comme vous commandiez à vos boeufs. Renoncez à ce projet et n’y pensez plus ». Mais le postulant répondit à ce compliment si humblement et si sensément que le terrible Gardien l’admit sur-le-champ. Devenu profès, le Frère Félix fut fixé au couvent de Rome avec les attributions de quêteur. Il resta quarante ans dans cet humble emploi, allant chaque jour, la besace sur le dos, pieds nus, et récitant son chapelet, quêter la subsistance de ses Frères. Les humiliations, comme les peines corporelles, étaient pour lui ses roses du Paradis; il ne craignait pas de s’appeler lui-même l’âne du couvent des Capucins. « Mais où est-il donc, votre âne? Frère Félix », lui demanda-t-on un jour. — « C’est moi! » répondit l’humble religieux.  Dans sa vieillesse, le Cardinal protecteur de l’Ordre lui offrit de le faire décharger de ses fatigantes fonctions. « Monseigneur, répondit Félix, laissez-moi mon office de quêteur: un soldat doit mourir l’épée à la main, un âne sous sa charge, et Frère Félix sous sa besace ». La mortification allait de pair avec son esprit de pauvreté et d’humilité: il se privait même des satisfactions les plus légitimes, telles que de s’approcher du feu l’hiver. « Allons, Frère âne, disait-il à son corps, il faut que tu te réchauffes sans feu; car c’est ainsi que doivent être traitées les bêtes de somme… Loin du feu, Frère âne, loin du feu! C’est devant le feu que saint Pierre renia son Maître. » Après avoir achevé de le purifier par de douloureuses infirmités, patiemment supportées, Dieu rappela à Lui le Frère Félix, le 18 mai 1587.

Martyrologe 

A Camerino, saint Venant martyr. Sous l’empereur Dèce et le préfet Antiochus, il eut la tête tranchée, et ainsi, âgé de quinze ans, il consomma son glorieux martyre, avec dix compagnons.

A Ravenne, l’anniversaire de saint Jean Ier, pape et martyr. Mandé par ruse en cette ville par Théodoric, roi arien d’Italie, il fut longtemps tourmenté en prison pour la foi orthodoxe et y termina sa vie. Sa fête se célèbre le 6 des calendes de juin (27 mai), jour où son corps, rapporté à Rome, fut inhumé dans la basilique de saint Pierre, prince des Apôtres.

A Spolète, saint Félix évêque, qui remporta la palme du martyre sous l’empereur Maximien.

A Héraclée, en Egypte, saint Potamion évêque, qui d’abord confessa la foi sous Maximien Galère, puis, sous l’empereur Constance et le préfet arien Philagre, reçut la couronne du martyre. Les Pères de l’église, saint Athanase et épiphane, ont fait l’éloge de ce saint homme.

En Egypte, saint Dioscore lecteur, contre lequel le gouverneur exerça toutes sortes de cruautés, jusqu’à lui arracher les ongles et faire brûler les flancs avec des torches; mais les exécuteurs effrayés par une lumière céleste, tombèrent à terre; Dioscore enfin fut brûlé avec des lames rougies au feu et consomma ainsi son martyre.

A Ancyre (auj. Ankara), en Galatie, saint Théodote martyr, et sept bienheureuses vierges et martyres : Thécuse tante de Théodote, Alexandra, Claudia, Faine, Euphrasie, Matrone et Julitte. Le préfet les livra d’abord à la prostitution, mais Dieu par sa grâce les préserva de tout outrage; elles furent ensuite plongées dans un marais, chacune avec une pierre au cou. Théodote recueillit leurs reliques qu’il ensevelit avec honneur; pour ce motif il fut arrêté, par ordre du préfet: cruellement déchiré et enfin percé d’un coup d’épée, il reçut la couronne du martyre.

A Upsala, en Suède, saint Eric, roi et martyr.

A Rome, saint Félix confesseur, de l’Ordre des Frères Mineurs Capucins, remarquable par sa simplicité évangélique et sa charité. Il a été inscrit au nombre des saints par le souverain pontife Clément XI.

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