Gérard Bedel a été rappelé auprès du Créateur le 19 mars 2022. Avant d’être l’écrivain brillant et le conférencier talentueux que l’on connait, Gérard Bedel, professeur de lettres, avait été directeur de lycée catholique à Tourcoing dans le Nord, et avait de façon très pédagogue donné une série de cours de doctrine politique aux jeunes catholiques dans les années 1980. Il fut aussi au cœur de la saine résistance catholique lors de la tentative socialiste d’instaurer un grand service public laïc unifié, jusqu’au retrait en 1984 du projet de loi Savary. Il est l’auteur de plusieurs livres parmi lesquels des biographies du Cardinal Pie, du Général de Sonis ou encore du Maréchal Pétain. ainsi qu’un Précis d’histoire de l’Action française. Ce sont précisément les éditions d’Action Française qui viennent de publier de façon posthume un ouvrage de Gérard Bedel consacré à Jacques Bainville.
Ce livre n’est pas une biographie détaillée de Jacques Bainville (1879-1936). L’auteur a voulu aller à l’essentiel et mettre en valeur les ressorts premiers et profonds de la pensée de l’écrivain. Avant l’historien, Bainville était d’abord un homme de lettres au talent riche et varié. Il fut d’abord un passionné de notre langue dont il analysa les plus beaux exemples et qu’il mania lui-même avec bonheur. La poésie orna la pensée de cet homme qu’on présente comme froid et prosaïque. Si l’historien cache le chroniqueur et le journaliste, ce dernier occulte le conteur. Sa critique littéraire est toujours pondérée, ne mettant jamais son drapeau dans la poche, l’affichant même, mais ne suivant pas l’exemple de cette coutume qui classe les auteurs selon leurs opinions. Bainville est un bourgeois de Paris qui sait voyager comme Montaigne. Et dans le domaine de la finance où il réussit mieux que bien des experts de son temps, il met toujours en avant le bon sens. Quant à sa politique, elle est tirée de l’histoire. Ainsi Bainville, né de parents républicains, devint royaliste avant d’avoir connu Charles Maurras. Ce fut un royaliste de raison. Enfin, cet ouvrage cherche à comprendre le mystère d’une âme discrète et pudique dont le pessimisme semble avoir caché une grande sensibilité. Bainville eut peu d’amis, mais son amitié fut d’une rare qualité comme en témoignèrent Maurras et Daudet.
On reste confondu devant la multiplicité des tâches que Bainville mena à bien : rédacteur de l’Action française quotidienne, de la Liberté et de bien d’autres publications, directeur de la Revue Universelle, il fut l’auteur des Conséquences politiques de la paix, l’historien de Napoléon, le conteur de Jaco et Lori. Et loin de tomber dans le travers des touche-à-tout, il réussit à donner des chefs-d’œuvre dans les domaines les plus variés, politique étrangère, économie politique, finances, histoire, politique intérieure, chronique des livres et du théâtre. Ce sage portait sur le monde un regard de moraliste et d’homme d’Etat.
Jacques Bainville : la sagesse d’un gentilhomme des lettres, Gérard Bedel, éditions d’Action Française, 380 pages, 18 euros
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