Officiellement, des « bombes anti-bunker »
Les forces aériennes israéliennes larguent par dizaines des « bombes anti-bunker » sur le Liban. Ces bombes sont conçues pour exploser après avoir pénétré profondément dans le sol.
Les explosions décalées, qui font trembler les murs à des kilomètres à la ronde, produisent également d’importantes colonnes de fumée, signe de la puissance des explosifs utilisés.
Il existe plusieurs types de «bunker busters», comme on appelle ces armes dans le jargon militaire, mais l’armée israélienne n’a pas officiellement dévoilé le type de munitions utilisées. Cependant, plusieurs indices laissent penser que les bombes utilisées par l’aviation israélienne contiennent une petite charge radioactive : de l’uranium appauvri.
Alors que de sérieuses inquiétudes apparaissent ces derniers jours sur une possible radioactivité issue de ces bombardements israéliens, le professeur Raif Reda, président de l’Association libanaise de médecine sociale, a appelé à « prélever des échantillons sur les sites de bombardements et à envoyer des rapports aux Nations Unies afin que le monde puisse témoigner de l’histoire sanglante et criminelle de l’ennemi sioniste », selon des déclarations rapportées par l’Agence nationale libanaise de l’information (NNA).
Comme le souligne le New York Times, une vidéo diffusée par l’armée israélienne montrant le décollage de l’escadrille pour le raid du 27 septembre confirme que ces appareils étaient chacun équipés de six missiles « BLU-109 ». Ces munitions de fabrication américaine pèsent chacune un peu moins d’une tonne, selon l’article, et sont équipées d’un kit « JDAM » (joint direct attack munitions), un système de guidage de précision fixé aux projectiles.
Un rapport de l’Institut naval américain indique que le type d’explosif le plus courant à l’intérieur de ces missiles sont des bombes classées « GBU-31 ». Ces munitions guidées sont connues pour leur capacité à pénétrer des structures en béton ou en acier fortement renforcées grâce à une enveloppe en uranium appauvri (UA), utilisé pour sa haute densité, qui renforce la résistance des bombes à l’impact au sol.
L’utilisation de ce type d’armement particulier à Beyrouth est d’autant plus plausible que l’armée israélienne avait déjà utilisé des bombes à uranium en 2023 lors de frappes dans la bande de Gaza. Un rapport soumis à la Commission des droits de l’homme de l’ONU a documenté le largage de bombes GBU-31, GBU-32 et GBU-39 lors d’au moins six frappes aériennes distinctes de l’armée de l’air israélienne sur des immeubles résidentiels, une école, des camps de réfugiés et un marché entre le 9 octobre et le 2 décembre 2023.
En mai, l’administration Biden a annoncé la suspension d’une livraison de ces bombes de près d’une tonne à Israël en raison de « préoccupations concernant la sécurité des civils à Gaza ».
Effets pathogènes et mortels
Bien que l’uranium appauvri ne soit pas aussi radioactif que son homologue enrichi utilisé dans les armes nucléaires, il reste légèrement radioactif et peut libérer des particules dangereuses lors de l’impact, contaminant les populations et les sols exposés à ces faibles niveaux de radiation.
«Lorsque l’uranium est inhalé ou ingéré par l’intermédiaire des aliments et des boissons, ses effets pathogènes et mortels se manifestent pleinement. Une fois dans l’organisme, il est absorbé par le sang, qui le transporte vers les organes (…) et peut provoquer des problèmes respiratoires et des risques rénaux. Il peut également atteindre un enfant à naître par le placenta», selon un rapport de l’International Physicians for the Prevention of Nuclear War (IPPNW).
Les caractéristiques de l’uranium appauvri et ses conséquences sur la santé humaine et l’environnement sont plus amplement documentées dans un rapport publié par la Commission européenne en 2010.
Ce type de bombes avait également été utilisé lors de l’invasion américaine de l’Irak, ce qui avait entraîné une augmentation massive des taux de cancer en Irak après les guerres américaines contre ce pays. La chercheuse Souad al-Azzawi, professeur agrégé de génie de l’environnement à l’Université canadienne de Dubaï et ancienne directrice du programme de doctorat en génie de l’environnement à l’Université de Bagdad, cite des études montrant que les cas de leucémie chez les enfants ont augmenté de 60 % entre 1990 et 1997 et que les malformations congénitales ont triplé entre 1990 et 1998 à Bassorah, en Irak.
L’Organisation mondiale de la santé a publié un rapport en 2003 intitulé « Impact potentiel du conflit sur la santé en Irak », qui suggérait que l’uranium appauvri pourrait être lié à des rapports faisant état d’une augmentation des cancers, des malformations congénitales, des problèmes de santé reproductive et des maladies rénales dans la population irakienne depuis 2003.
Le Projet de recherche et d’information sur le Moyen-Orient (MERIP) a rapporté que l’uranium appauvri pourrait être l’une des causes d’une augmentation massive des malformations congénitales chez les enfants à Fallouja, que les forces américaines ont lourdement bombardée lors des combats avec les insurgés en avril et novembre 2004.
Le MERIP a noté que la page Facebook des malformations congénitales de l’hôpital de Fallouja, où le personnel médical répertoriait les cas, a révélé de nombreuses anomalies congénitales différentes. Les bébés de Falloujah naissent régulièrement avec une hydrocéphalie, des fentes palatines, des tumeurs, des têtes allongées, des membres envahis par la végétation, des membres courts et des oreilles, un nez et une colonne vertébrale malformés.
Bombes au phosphore blanc
Comme le révélait L’Orient-Le Jour en octobre 2023, l’armée israélienne a déjà été reconnue coupable à plusieurs reprises d’avoir utilisé au Sud-Liban des bombes contenant du phosphore blanc, ce qui est interdit contre des civils ou des biens civils par le droit international.
Léo Kersauzie
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