Sous le titre « FSSPX : le piège que François tend aux conservateurs« , Candidus, sur le Forum Catholique de Xavier Arnaud, nous propose une intéressante analyse de la stratégie bergoglienne suite au provoquant Motu proprio « Traditionis custodes ».

Elle consisterait à pousser les « conservateurs » de l’Eglise « conciliaire » – Ecclesiadéistes ou autres instituts attachés au « rite extraordinaire » – dans les bras de la FSSPX. L’estocade  leur serait alors portée en accordant de nouveaux évêques aux successeurs de Mgr Marcel Lefebvre.

Rêve ou cauchemar ? A chacun son point de vue…

Article de Candidus

J’ai longtemps pensé que François finirait par régulariser la FSSPX et que s’il ne le faisait pas, c’était simplement parce que la FSSPX ne le voulait pas vraiment, ou avait des exigences démesurées.

Peut-être cette analyse reflétait-elle la réalité au début du pontificat bergoglien, mais en cet été 2021, je vois la situation différemment.

De nombreux commentateurs ont noté l’hostilité que François a toujours ressentie envers les conservateurs wojtyliens-ratzingériens (parmi lesquels j’inclus la mouvance Ecclesia Dei), plus qu’à l’égard des traditionalistes qu’il a toujours épargnés voire favorisés, comme ce fut le cas lorsqu’il était archevêque de Buenos-Aires. Ce sont les conservateurs ses véritables ennemis, son cauchemar, le seul obstacle qui l’empêche de mettre en œuvre son programme martino-kaspérien de réforme de l’Eglise.

Assez tôt durant son pontificat, François a élaboré un plan, humainement génial, pour arriver à ses fins. La pièce maîtresse qu’il utilise dans sa partie d’échec contre les conservateurs, c’est la FSSPX et sa mouvance.

François a besoin de neutraliser la résistance des conservateurs à son programme. Pour se faire, il faut les marginaliser ; à défaut de leur faire quitter l’Église à laquelle ils sont viscéralement attachés, il faut les acculer dans la périphérie et c’est là qu’entre en jeu la FSSPX.

Jusqu’à il y a peu, la FSSPX était dans une périphérie très éloignée de l’Église officielle ; au point que certains considéraient qu’elle se trouvait en dehors du périmètre de l’Eglise, qu’elle était, osons le mot, schismatique.

Et puis François est entré en action ; par étapes il a accordé à la FSSPX : le pouvoir de confesser, de célébrer les mariages, d’ordonner des prêtres sans lettres dimissoriales et sans que ceux-ci ne soient suspens a divinis, et demain, j’en suis convaincu, il leur accordera des évêques.

Quel est le résultat de toutes ces faveurs ? Que cela plaise ou non, le positionnement de la FSSPX sur le spectre ecclésial s’est déplacé vers le centre ; elle demeure en apesanteur canonique, mais il est indéniable qu’on ne peut plus aujourd’hui l’accuser d’être une communauté schismatique. Son statut est atypique, elle reste dans la périphérie institutionnelle, mais sa localisation est beaucoup moins excentrée qu’avant l’actuel pontificat.

Ce que je viens de décrire constitue la première étape du plan bergoglien pour neutraliser les conservateurs. Pour que la seconde étape du plan fonctionne, il faut que la FSSPX demeure sur une crête ; qu’elle continue d’apparaître comme une entité marginale dont les positions et l’argumentation ne peuvent pas menacer la dynamique progressiste bergoglienne, et en même temps, il faut qu’elle conserve une identité catholique, une légitimité qui exclut que ceux qui la fréquentent puissent être suspectés de dissidence formelle. Pourquoi cela ? Pour que tous ceux qui sont allergiques au bergoglianisme puissent trouver refuge dans son giron sans éprouver de scrupules.

En d’autres termes, François veut faire de la FSSPX un abcès de fixation dans lequel seront neutralisés tous ses opposants conservateurs. Le rêve de François est de voir tous ses opposants conservateurs rejoindre la mouvance de la FSSPX. De la sorte leur discours perdra toute pertinence (« ce sont des intégristes ») et François pourra conduire sans véritable opposition sa réforme de l’Église.

Si mon analyse est exacte, voilà à quoi il faut s’attendre dans les mois à venir : François va continuer de provoquer les conservateurs par des initiatives telle que sa lettre au Père Martin, défenseur de la cause gay aux USA, et surtout il fermera les yeux sur la course vers l’abîme du chemin synodal allemand. En même temps, il ne fera rien pour nuire à la FSSPX, voire il lui accordera la seule chose qu’il lui manque pour continuer en toute quiétude le chemin qu’elle suit depuis 50 ans : des évêques.

Ne sous-estimons pas la cohérence de la stratégie bergoglienne. François est une personne logique. Pourquoi croyez-vous qu’il accorde toutes sortes de passe-droits à la FSSPX, tout en maltraitant les communautés ED, et en annonçant l’éradication de leur raison d’être, le VOM ? Où est la logique dans tout cela ? Mon explication permet de concilier ces deux stratégies apparemment contradictoires.

Où tout cela va-t-il nous conduire ? En dehors de toutes considérations surnaturelles, il faut reconnaître que le pari de François est risqué. Son succès dépend du positionnement de la FSSPX sur le spectre ecclésial : trop à la périphérie, la FSSPX n’attirera pas les conservateurs ; trop parée de légitimité ecclésiale, elle pourrait acquérir une force et une audibilité qui menaceraient l’édifice bergoglien d’une manière beaucoup plus efficace que la rhétorique inhibée des conservateurs.

Candidus

Source : Forum Catholique (FC) du 4 août 2021

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