« Habemus immortalem »
L’Académie Française a de plus en plus de mal à recruter…
La plupart des écrivains récemment pressentis, ont refusé cet honneur faisant leur la formule attribuée à Georges Bernanos qui n’a jamais cédé aux charmes de la coupole: « Quand je n’aurai plus qu’une paire de fesses pour penser, j’irai l’asseoir à l’Académie. »
Ainsi approchés, Daniel Pennac, Jean Echenoz, Simon Leys, Le Clézio, Patrick Modiano, Milan Kundera, Pascal Quignard ou Tonino Benacquista, pour ne parler que de ceux-là, déclinèrent la proposition qui leur était faite.
La laborieuse triple élection blanche du successeur de Pierre Jean Remy, pour l’attribution du fauteuil 40 – qui nous offrit la plus belle série de brochettes de candidats folkloriques jamais vue – est encore dans toutes les mémoires…
Finalement, pour ne pas sombrer dans le ridicule, on était allé chercher une valeur sinon sûre, du moins reconnue, puisque déjà à l’Institut : Xavier Darcos, membre de l’Académie des Sciences Morales et politiques dont il a été le secrétaire perpétuel… L’honneur du Quai Conti était sauf !
Depuis, les Immortels n’arrêtant pas de mourir, on a connu d’autres élections plus ou moins laborieuses et plus ou moins réussies…
Mais après la mort de Jean d’Ormesson, les immortels se sont comptés trente-trois…
Jeudi dernier, dans une discrétion médiatique remarquable, avait lieu la troisième tentative pour trouver un successeur à René Girard (Fauteuil 37).
Une première élection blanche, le 17 novembre 2016, avait vu Daniel Rondeau obtenir 12 voix, sur 28 votants au troisième tour, avec le score rare d’un nombre égal d’opposants ayant déposé un bulletin portant, selon l’usage, une croix, ce qui signifie « non à aucun prix ! ».
Visiblement, la personnalité de Daniel Rondeau clivait…
Les déclarations de candidatures folkloriques se multipliant derechef, une seconde élection blanche le 23 mars 2017 traduisait le refus d’accueillir le dramaturge Valère Novarina qui réunit aussi sur son nom pratiquement autant de suffrages que de croix noires…
On se dirigeait donc tout droit vers l’angoissant scénario déjà vu pour élire le successeur de Pierre Jean Rémy…
Au milieu des candidatures émerge alors une personnalité de poids, pressentie pour éviter une nouvelle élection blanche: Michel Zink, spécialiste de la littérature médiévale, déjà membre de l’Institut, et secrétaire perpétuel de l’Académie des Inscriptions et des Belles Lettres.
Un parcours rassurant qui n’est pas sans rappeler celui de Xavier Darcos à l’Académie des Sciences Morales et Politiques…
C’est là que, Thierry de Montbrial, le 26 octobre, fait acte de candidature !
Rival de PPDA, au cours d’une élection blanche en avril 2012 au fauteuil de Pierre Jean Rémy, il a un palmarès prestigieux : élu à l’Académie des sciences morales et politiques en 1992 au fauteuil de Louis Joxe, il en a été président en 2001, et est membre fondateur de l’Académie des technologies (2000).
Il est également membre d’une dizaine d’académie en Europe !…
L’élection sera donc interne à l’Institut : « Sciences morales et politiques » contre « Inscriptions et Belles Lettres »
26 Votants |
Montbrial |
Zink |
Bulletin Blanc |
Bulletin à croix |
Premier Tour |
12 |
8 |
1 |
4 |
Deuxième Tour |
4 |
15 |
0 |
6 |
Après ce premier tour, Montbrial est donc donné gagnant !
Mais surprise, au second tour la plupart de ses soutiens vont voter… pour son adversaire !
Quel lobby, ou quelle intervention, a conduit à ce spectaculaire retournement ?
Michel Zink n’est élu qu’avec deux voix de majorité (13 + 2), mais avec un score, devenu brillant, de 15 contre 4…
L’institut n’a pas recruté de nouveau membre, et le plus grand perdant dans cette histoire est le tailleur qui ne confectionnera pas un nouvel « habit vert »
Il reste encore six nouveaux immortels à trouver d’ici deux ans…
Si aucun autre ne nous quitte d’ici là, et rien n’est moins sûr…
Le prochain fauteuil à pourvoir, déclaré vacant, est celui d’Alain Decaux…
Claude Timmerman
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