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Guerre en Ukraine et gaz russe : les choix absurdes de l’Union Européenne

Le blog Numidia-Liberum livre une analyse très intéressante concernant les choix absurdes des gouvernements de l’Union Européenne de se (ou plutôt nous, puisque c’est nous qui payerons en définitive la facture) priver du gaz russe sans avoir de véritable alternative.

La FR (Fédération de Russie) a exigé le paiement en roubles. La réponse des États de l’UE est de refuser cette demande. La FR a indiqué qu’elle mettra fin à l’approvisionnement en gaz pour non-paiement. L’UE suggère qu’elle cherchera un approvisionnement en GNL (ndlr : gaz naturel liquéfié) de substitution. La position de l’UE représente un élément absurde de la guerre hybride. Ce billet expose quelques-uns des problèmes que les Euronouilles de Bruxelles ne semblent pas appréhender.

Selon l’AIE, l’UE a consommé 155 milliards de mètres cubes de GNL en 2021. De cet approvisionnement, 45 % provenaient de la Russie ( https://www.iea.org/news/how-europe-can-cut-natural-gas-imports-from-russia-significantly-within-a-year).

La part des importations venant de la FR en 2021 de l’UE était de 69,75 milliards de mètres cubes de GNL par an ou 5,8 milliards de mètres cubes par mois. Si l’UE cherche à remplacer le gaz russe, il s’agit de la quantité mensuelle approximative requise.

Les plus grands méthaniers sont de la classe QMAX. Ceux-ci peuvent transporter 266.000 mètres cubes de GNL ( https://en.wikipedia.org/wiki/Q-Max ).

Un simple calcul montre que le transport mensuel de 5,8 milliards de mètres cubes de GNL par des navires d’une capacité de 266.000 mètres cubes de GNL nécessite un total de 21.852 expéditions par mois, soit environ 705 expéditions par jour.

Ce volume de transport saturera les ports de déchargement de GNL existants dans l’UE. Ces ports sont déjà dédiés au traitement d’autres importations de GNL. Le temps de déchargement d’une cargaison de GNL est d’environ une journée.
Cela implique la nécessité de construire 705 nouveaux ports de déchargement de GNL, car immédiatement après l’arrivée le jour-1 de 705 navires, il y aura l’arrivée le jour-2 de 705 autres navires, et le même trafic de navires pour le jour-3 et tous les jours suivants.
Le transit de Houston à Rotterdam prend 18 jours à l’aller et 18 jours à vide au retour. Avec une journée consacrée au chargement et une journée supplémentaire au déchargement, chaque navire passera 28 jours en voyage. Ces chiffres ne tiennent pas compte des temps d’arrêt des navires pour les intervalles de maintenance requis.

Le transport du volume mensuel requis de GNL nécessitera donc 705 QMAX x 31 jours ou une flotte QMAX totale de 21.855 navires. Étant donné que les chantiers disponibles sont entièrement réservés pour d’autres commandes, il n’est pas évident de déterminer quand la construction complète de la flotte requise aura lieu. Or, il faut environ deux ans pour construire une plate-forme de forage offshore (MODU). La complexité d’un QMAX peut être légèrement inférieure à celle d’un MODU, mais même si la construction ne devait nécessiter qu’un an, le temps requis pour l’achèvement de la flotte serait de 5.463 ans si 4 chantiers étaient impliqués dans la construction.
A l’heure actuelle, le seul chantier compétent dans la construction de ces navires se trouve en Corée du Sud ; les trois autres chantiers requis devraient être modernisés ou construits.
Les méthaniers ont besoin d’un acier spécial pour résoudre les problèmes de contraintes thermiques. Cet acier a une forte teneur en nickel ; or la Russie est un important fournisseur mondial de nickel.

La Russie a exporté pour quelque 3,02 milliards de dollars de nickel et de produits en nickel en 2020, ce qui en fait le premier pays exportateur de nickel. Elle est suivie de près par le Canada, qui a exporté pour quelque 2,77 milliards de dollars américains de métal de base. Le nickel est principalement utilisé dans la production d’acier inoxydable.

Étant donné que l’UE a exprimé son intention d’éliminer complètement le besoin de GNL russe d’ici 2030, le temps nécessaire pour récupérer l’investissement dans les navires et les infrastructures de GNL connexes est extrêmement limité. D’ici 8 ans, l’UE cherche à remplacer entièrement le volume total de GNL russe.

En 2020, la production de gaz naturel aux États-Unis était d’environ 10 % supérieure à la consommation totale de gaz naturel aux États-Unis. Le volume de gaz produit excédentaire par rapport à la demande américaine s’élève à 2,5 milliards de mètres cubes de gaz naturel par jour. Cet excédent est déjà acheté sous contrat par les pays suivants :

LES 10 PRINCIPALES DESTINATIONS D’EXPORTATION de GNL américain:

Corée du Sud 453 483

Chine 449 667

Japon 354 948

Brésil 307 714

Espagne 215 062

Inde 196 218

Royaume-Uni 195 046

Turquie 188 849

Pays-Bas 174 339

France 170 780

Afin de convaincre les Euronouilles, les États-Unis se disent prêts à retirer l’approvisionnement de certains des pays susmentionnés pour les punir de ne pas se conformer aux exigences américaines et pour récompenser les États vassaux européens. En regardant la liste, quels pays seront punis ?

Toute marchandise s’oriente vers le prix le plus élevé. Le prix de pic est fixé par l’acheteur marginal. On s’attend donc à ce que la tentative de l’UE de remplacer le GNL russe soit impossible à réaliser à court terme sans un impact extrême sur les prix. Ces impacts sur les prix n’affecteront pas seulement les consommateurs de l’UE, ils auront un impact sur tous les consommateurs, y compris ceux des États-Unis.

Selon les données compilées par l’agence Bloomberg, 1.043 méthaniers ont exporté du GNL à partir des États-Unis en 2021, dont près de la moitié à destination des pays asiatiques, et un tiers vers les pays européens.

Et selon l’Administration fédérale d’information sur l’énergie (EIA), la tendance devrait se poursuivre, au regard des projets en cours qui devraient encore ajouter de nouvelles capacités en 2022 comme le terminal de Venture Global Calcasieu Pass, à Cameron Parish en Louisiane d’une capacité annuelle de 10 millions de tonnes. Ce sont en effet des milliards de dollars qui ont été investis dans la filière et les infrastructures depuis une quinzaine d’années pour transformer le gaz en liquide par refroidissement et le charger sur des méthaniers pour l’acheminer à travers le monde. Aujourd’hui, les deux principaux terminaux méthaniers aux Etats-Unis pour l’exportation sont celui de Sabine Pass, au Texas, au bord du golfe du Mexique, géré par la société Cheniere et celui de Freeport LNG sur l’île de Quintana au Texas.

Les États-Unis veulent faire payer les Européens les investissements colossaux dans le gaz de schiste américain. La guerre en Ukraine est un excellent prétexte pour essayer de tuer les exportations de gaz russe tout en rackettant les Européens.

Sources https://wp.me/p7g3IJ-1LG, La tribune

Liste des principaux pays exportateurs de gaz naturel dans le monde (Ej (exajoule) = 10 joules)

La Russie avec 7,91 Ej.
Le Qatar avec 4,72 Ej.
La Norvège avec 3,91 Ej.
L’Australie avec 3,72 Ej.
Les États-Unis avec 2,74 Ej.
Le Turkménistan avec 1,90 Ej.
Le Canada avec 1,67 Ej.
L’Algérie avec 1,45 Ej.

Les principaux exportateurs de gaz naturel dans le monde sont aussi les principaux producteurs de gaz naturel. Toutefois, l’ordre du classement diffère puisque les Etats-Unis est le 1er producteur mondial. Il consomme toutefois une grande majorité du gaz produit.

La France ne produisant pas (ou très peu) de gaz naturel, elle doit importer la quasi totalité du gaz naturel qu’elle consomme. Pour ce faire, la France s’approvisionne auprès de différents pays :

Norvège (41% en 2021 selon Gazprom),
Russie (17%),
Algérie (10%),
Nigéria (9%), etc.

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