Il est loin, le temps de l’Espagne catholique. La Cour suprême espagnole vient d’approuver que le drapeau arc-en-ciel, LGBT soit accroché aux façades des bâtiments publics lors de la célébration de la Gay Pride, prétendant avec culot qu’il ne s’agit pas d’un « symbole de signification partisane » et qu’il ne « prône aucun type de confrontation ». La Haute Cour espagnole modifie ainsi sa doctrine antérieure.
Les magistrats ont conclu qu’il n’y a aucun obstacle à l’affichage du drapeau sur un bâtiment public, affirmant qu’il n’enfreint pas la loi 39/1981 qui réglemente l’utilisation du drapeau de l’Espagne et d’autres drapeaux et bannières et ne viole pas les principes d’objectivité et de neutralité des administrations publiques.
De cette manière, la Haute Cour modifie sa doctrine jurisprudentielle puisque dans un arrêt du 26 mai 2020 de la Troisième Chambre, elle avait jugé qu’accrocher le drapeau LGBT sur un bâtiment public est « une doctrine incompatible avec le cadre constitutionnel et juridique actuel, et en particulier, au devoir d’objectivité et de neutralité des Administrations Publiques ».
La Cour soutient désormais que le drapeau LGBTI « est projeté en faveur de l’égalité entre les personnes, valeur reconnue par la Constitution et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ». Par ailleurs, la Chambre Contentieuse-Administrative rappelle que les articles 14 et 9.2 de la Magna Carta préconisent de vaincre la discrimination fondée sur toute circonstance personnelle et que l’article 21.1 du document européen appelle à l’élimination de toutes les formes de discrimination fondées sur l’orientation sexuelle.
L’organisme judiciaire a statué que la Députation Forale de Valladolid et la Mairie de Saragosse n’avaient pas enfreint la loi lors de la célébration de la Gay Pride de cette année en l’ayant placée dans des édifices publics.
Dans le cas d’Aragon, le drapeau LGBTI a été déployé sur le balcon principal de la mairie de Saragosse. En Castille-et-León, le drapeau arc-en-ciel flottait dans la cour intérieure de la Députation Forale de Valladolid. La Fondation espagnole des avocats chrétiens avait fait appel dans les deux cas et l’affaire, après avoir été examinée par les tribunaux desdites communautés autonomes, a fini sur la table de la Cour suprême.
La Cour suprême a déclaré que le fait de placer temporairement un drapeau LGBTI sur un bâtiment public ne contredit pas l’exigence d’objectivité des administrations publiques, mais s’inscrit dans la ligne des actions visant à promouvoir l’égalité.
Un magistrat s’exprime contre cette décision
Le juge José Luis Requero Ibáñez s’est exprimé pour souligner qu’il n’est pas d’accord avec la décision de la Cour suprême, car selon lui, le mouvement LGBT fait référence à « des acronymes qui rassemblent diverses tendances sexuelles qui soutiennent divers postulats, parmi lesquels ceux de la soi-disant idéologie du genre, qui ne sont pas pacifiques
Il soutient qu’« une chose est la réalisation d’objectifs inspirés, conformément à la loi, par des principes plausibles tels que l’égalité, le respect, l’inclusion et la tolérance » et une autre chose est qu’une entité publique « aille au-delà du respect de ces objectifs légalement fixés et vienne défendre des postulats idéologiques controversés » derrière le symbole qui déclenche le litige.
Appel à la Cour constitutionnelle
L’association des avocats chrétiens a annoncé qu’elle ferait appel de cette décision de la Cour suprême devant la Cour constitutionnelle. Comme le rapporte la fondation, il s’agit de « l’étape préalable et nécessaire » pour porter l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme à Strasbourg.
Le président de l »association des avocats chrétiens, Poland Castellanos, a souligné que « ce changement dans les critères de la Cour suprême est un autre exemple de politisation du système judiciaire ».
Joaquim De Alburquerque
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