Ce même jour, le quotidien catholique conservateur italien La Nuova Bussola quotidiana publiait un article en rapport avec cette déclaration. L’axe d’analyse porte sur la sécularisation de la papauté par François.
Ainsi LNBQ écrit :
« Il s’agit de réduire le pontificat à l’humanité de ceux qui l’incarnent à un moment donné. Réduction inévitable après le « virage anthropologique ». La dentelle de grand-mère doit également être retirée de la papauté. Sa récente communication sur sa démission s’inscrit également dans ce projet. Au journal espagnol ABC François a déclaré : « J’ai déjà signé ma démission. Tarcisio Bertone était le secrétaire d’État. Je les ai signés et lui ai dit : en cas d’obstacle pour des raisons médicales ou que sais-je, voici ma démission. Vous les avez déjà. Je ne sais pas à qui le cardinal Bertone l’a donné’, mais je la lui ai donnée quand il était secrétaire d’État ».
La sécularisation de la papauté ici se déroule tout d’abord à travers le contexte de communication et sa forme d’exposition
La sécularisation de la papauté ici se déroule tout d’abord à travers le contexte de communication et sa forme d’exposition. L’utilisation du mot « démissionne » est frappante car elle est généralement utilisée pour un président d’un conseil d’administration, un ministre d’un gouvernement en difficulté, un commissaire technique d’une équipe de football, un employé qui a trouvé un autre emploi. Le même mot sonne très mal à propos du pape. En tant que père ou mère, mari ou femme, vous ne démissionnez pas. En tant que poète, musicien ou éducateur, vous ne démissionnez pas. En tant qu’hommes, vous ne démissionnez pas. Pour sœur Cristina, qui a quitté le voile pour monter sur scène, personne dans les journaux n’a utilisé le mot démission. La presse avait cependant parlé de démissions lorsque Di Pietro avait enlevé sa toge pour aller à la vie politique. Si le pape parle de sa démission, les gens finissent par le placer au même niveau que Draghi après le vote de défiance envers le Parlement. Dire qu’il a signé sa démission a donc un fort sens sécularisant.
François place sa démission comme une chose évidente, un passage désormais considéré comme routine
Ensuite, il y a la négligence non aléatoire de l’annonce, quelques mots jetés là comme une chose de peu d’importance. Ce qui est lancé rapidement dans les mailles du filet apparait à l’œil de ceux qui lisent comme de peu d’importance. Cela devient un détail secondaire. Dans sa déclaration, François a placé sa démission comme une chose évidente, un passage désormais considéré comme routine. Démissionner peut devenir une habitude, une chose escomptée, et il sera plutôt surprenant que, comme [saint] Jean-Paul II ou Léon XIII, les papes restent à leur place jusqu’à la fin. La banalisation délibérée de l’information est également claire pour la mention du cardinal Bertone : « Je ne sais pas à qui le cardinal Bertone l’a donné’ … ». Comme quand on dit à la maison : « mais oui, c’est quelque part.…, avez-vous essayé sous le lit … ? ». Cela signifie que cette chose a peu d’importance. Et puis les raisons : « en cas d’obstacle pour des raisons médicales ou que sais-je… ». Une telle déclaration ressemble à de nombreuses déclarations anticipées de traitement pour le stade final de la vie, avec toutes leurs ambiguïtés connues, encore aggravées par un vide « … ou que sais-je … ».
La renonciation du pape, comme on le sait, est prévue par le droit canonique. Ce n’est donc pas le problème. La voie factuelle avait été ouverte par Benoît XVI sous les formes que nous connaissons, avec des voies à explorer et pour des raisons qui restent mystérieuses. Ce qui est certain, c’est qu’avec cette déclaration, François, passant par cette porte, a réduit à très peu de chose la « démission » du pape. Une expression aussi banale et banalisante présente la papauté comme la profession d’un emploi intérimaire, comme une embauche avec un contrat à durée déterminée, un service fonctionnel qui, pour une forme quelconque de handicap opérationnel de l’employé, nécessite sa démission. »
Cette sécularisation de la papauté remonte cependant plus loin que les actions de l’actuel détenteur du trône pétrinien, dès le concile Vatican II, en rupture avec la Tradition et fondateur d’une nouvelle forme d’Eglise protestantisée, l’Eglise conciliaire envahie par l’esprit séculier, c’est-à-dire ‘l’esprit du monde’.
Il n’empêche que cette analyse de LNBQ est intéressante car elle montre clairement comment El papa argentin a continué ce processus de sécularisation débuté dans les années 70, le terme de « démission » qu’il emploie en étant un exemple concret.
Francesca de Villasmundo
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