Le réalisateur Peter Berg s’est appuyé sur le livre de Marcus Luttrel, le survivant de l’opération « Red Wing ». C’est une manière de donner un cachet d’authenticité à son film. Il n’a rien inventé. C’est un projet qui lui tenait à cœur depuis longtemps. Quand on regarde ce film, il faut bien avoir en tête que ce film a pour but de rendre hommage aux membres de l’opération. Pour l’occasion, Peter Berg a travaillé pour un salaire minimal et de nombreux membres de l’équipe ont également réduit leurs salaires. Mieux, la production a décidé de proposer à de véritables vétérans de l’armée de participer au film en tant que figurants et même pour certains avoir des lignes de dialogue. De plus, les acteurs du film ont passé de nombreux moments avec les familles des personnages qu’ils allaient incarner. De même, ils se sont entraînés avec de véritables Seals. Tous les ingrédients sont donc là pour en faire un film-hommage. Le film s’ouvre sur des images d’archive d’entraînement de Seals et se termine par le défilement des photos des membres parfois avec leurs familles, de quoi rajouter à l’intensité et à l’émotion du film.
Profitez de la première heure du film qui est plutôt tranquille et qui nous permet d’admirer de magnifiques paysages qui sont pour une fois verts tout en étant montagneux. On plonge dans le quotidien d’une base militaire américaine. Cela nous permet surtout de faire connaissance avec les personnages, leur caractère, leur famille. Il règne une vraie camaraderie. Le film se veut sobre car pas de grands discours ou des phrases qui demandent réflexion, simplement des conversations banales. La vraie crise de conscience se joue quand les quatre Seals ont capturé des bergers afghans. Vivants, ils risquent de compromettre l’opération ; morts, c’est le tapage et scandale médiatique assurés avec risque de prison. Les règles d’engagement sont claires. On ne tue pas de civils. La décision repose sur les épaules du chef de commando. Mais par la suite, malgré la situation, aucun homme ne lui reprochera son choix. La camaraderie, l’instinct de survie vont l’emporter. C’est alors que le film prend un tour violent et puissant. Comme on pouvait s’en douter, un des bergers va avertir les talibans qui ne tardent pas à débusquer les Américains, sans liaison radio. Ici Berg ne nous épargne aucun détail. C’est le reproche qu’on pourrait lui faire. En se voulant le plus proche de la réalité, le réalisateur abonde dans le sang, les blessures parfois à la limite du soutenable. Ce n’est pas pour rien que le film est interdit au moins de douze ans. C’est sans doute pour mieux montrer l’abnégation de ces hommes surentraînés mais était-ce vraiment nécessaire ? Il faut reconnaître cependant qu’il sait rendre l’intensité du moment avec ces instants de silence où l’on entend plus que la respiration du soldat ou ces ralentis quand le Seal vient de vider le dernier chargeur de son pistolet. Berg tente aussi de donner un côté humain à ces hommes qu’on voudrait infaillible mais dont la panique peut s’emparer.
Ce film aborde aussi d’un certain côté la position des Afghans qui se retrouvent pris entre les Américains et les Talibans. Il ne faut pas y voir un parti pris américain même si Berg semble oublier que les Américains sont des forces occupantes mais il n’entre pas dans le débat. Cependant une scène, au début du film, nous rappelle qu’il n’y a pas de pitié pour ceux qui « collaborent » avec les Américains. Les Talibans sont représenté barbus et comme des gens impitoyables qui exhibent en trophée les têtes de leurs ennemis. Mais là où le film devient intéressant, c’est quand au nom d’une coutume ancestrale une tribune afghane recueille Marcus Luttrel et va le défendre contre les talibans qui viennent le chercher. Comme quoi dans ce pays « arriéré », il y a du bon ! Le dialogue entre le soldat et l’enfant afghan donne un côté rafraichissant dans le film et c’est bien un des seuls. Il y a une certaine complicité qui s’installe alors que l’un comme l’autre ne se comprennent pas. C’est par ce biais-là qu’en quelque sorte Berg ne peut être accusé de manichéisme même si encore une fois, il dira qu’il s’en tient à l’histoire. Ce passage n’est que plus poignant car le début du film nous a montré le sort que réservent les Talibans à ceux qui aident les Américains. Si l’arrivée des Américains sauve dans un premier temps le village, rien ne dit pas la suite si les Talibans sont revenus en expédition punitive. Cependant, le film aura eu le mérite de nous montrer les deux côtés de l’Afghanistan : la violence d’un côté, l’hospitalité de l’autre.
Présenté par certains comme étant dans la lignée de la Chute du Faucon Noir, Du sang et des larmes en a les similitudes même si les dialogues sont moins riches. Intense, violent, brutal, il s’adresse aux amateurs de films de guerre. Certains pourront dire : encore un film à la gloire des Américains impérialistes. Ce sont sans doute les mêmes qui ont applaudi l’intervention française en Lybie ou qui réclament la chute d’Assad. Ce film n’est pas un chef d’œuvre du cinéma de guerre mais il a le mérite de mettre en avant la camaraderie et la solidarité de frères d’armes avec ce côté patriotique dont les Américains ont le secret.
Dans les salles de cinéma depuis le 1er janvier
Cet article vous a plu ? MPI est une association à but non lucratif qui offre un service de réinformation gratuit et qui ne subsiste que par la générosité de ses lecteurs. Merci de votre soutien !