La CIA aurait affirmé, dans une entrevue « secrète » avec des représentants du Sénat et de la Chambre du Congrès, que la Russie serait intervenue pour aider Donald Trump à gagner l’élection présidentielle américaine. Des personnes en lien avec le gouvernement russe auraient fourni, selon l’agence américaine de renseignement, à WikiLeaks les milliers de courriels embarrassants piratés aux membres du parti démocrate. Ces agents russes, disent les services secrets américains, auraient ainsi cherché à destabiliser la candidate Clinton.
Ces prétendues intrusions russes arrivent dans un contexte tendu avec Moscou que la politique de M.Obama a cherché à destabiliser au Moyen-Orient et dans les pays d’Europe de l’Est, sans trop de succès.
Cette affaire arrive surtout au moment où le gouvernement de M. Obama doit remettre les clés de la Maison Blanche à M. Trump. Ce dernier semble vouloir pacifier les relations entre Moscou et Washington. Cela mécontente peut-être certains lobbys, et leurs relais au sein des services de renseignement américains, qui auraient préféré une aggravation de la tension entre les deux puissances…
Le leader de la majorité au Sénat, Mitch McConnell, a exprimé des doutes quant à la véracité de l’information. L’équipe de transition de Trump a, quant à elle, rejeté les conclusions dans une fracassante déclaration publiée vendredi soir. « Ce sont les mêmes personnes qui ont dit que Saddam Hussein avait des armes de destruction massive… »
Trump a rejeté les conclusions de la communauté de renseignement sur le piratage russe.
« Celui-ci », a-t-il dit, «pourrait venir de la Russie comme de la Chine. Et il pourrait aussi bien venir d’un gars quelconque depuis sa maison du New Jersey. «
Il est vrai que les preuves qu’apportent les services à leurs allégations se font attendre. Les agences de renseignement se sont révélées incapables de prouver que des fonctionnaires du Kremlin «dirigaient» les individus qui ont transmis les emails démocrates à WikiLeaks. Julian Assange, le fondateur de WikiLeaks, a même déclaré dans une interview à la télévision que le gouvernement russe n’est pas la source. Sa déclaration n’a reçu aucun commentaire de la part de la CIA.
Au cours de l’élection, les démocrates ont été frustrés que la communauté de renseignement n’ait pas dit officiellement que l’ingérence russe était destinée à bénéficier au candidat Donald Trump, bien que tout le piratage fut dirigé contre les démocrates.
« Les Russes ne cherchaient pas à semer la discorde dans notre processus démocratique par leur piratage. Ils cherchaient également à fragiliser la candidate Clinton au profit de leur candidat préféré, Donald Trump », a déclaré le représentant. Adam Schiff, un démocrate du comité de renseignement de la Chambre.
Le président Obama a ordonné une « enquête complète » sur ce supposé piratage russe et exige un rapport avant qu’il ne quitte son bureau le 20 janvier prochain. L’enquête sera dirigée par James Clapper, le directeur sortant du renseignement national. Sept sénateurs démocrates ont demandé la semaine dernière à Obama de déclassifier les détails de l’enquête qui permettent à certains fonctionnaires d’affirmer que le Kremlin était derrière l’opération. Mais les agences de renseignement américaines sont devenues prudentes. Certaines disent que le but de Moscou est de saper la confiance dans le système électoral américain mais personne n’affirme plus que le but était d’aider à élire M.Trump.
Un allié de Donald Trump a rejeté la tentative du Parti démocrate, estimant que cela n’était » rien de plus que des raisins aigres du parti démocrate encore bouleversés que Hillary Clinton ait perdu. »
« Je ne considère pas que ce soit une question partisane », a rétorqué le sénateur Angus King, membre du Comité du renseignement du Sénat, qui a signé la lettre. « Nous ne pouvons pas simplement laisser faire. Les russes vont continuer à nuire. »
Lors d’une audience le mois dernier, le directeur du renseignement national, James Clapper, avait de même déclaré qu’il ne voyait aucune raison pour laquelle les russes s’arrêteraient maintenant que Donald Trump a été élu. Les Russes ont une capacité à mener des opérations d’information, ce qu’on appelle la guerre hybride. C’est une pratique ancienne qui remonte à l’ère soviétique et je prévois qu’elle continuera. »
Les sénateurs républicains remettent en question la qualité des preuves accusant la Russie. « Je serai le premier à sortir et à pointer vers la Russie s’il y avait des preuves », a déclaré le représentant Devin Nunes, président du Comité de renseignement de la Chambre et membre de l’équipe de transition Trump. « Il y a beaucoup d’insinuations, c’est tout. »
Au sein de l’administration, les hauts fonctionnaires savent eux qu’une guerre cybernétique avec la Russie pourrait avoir des conséquences incalculables pour la vaste et vulnérable infrastructure numérique américaine.
En organisant une réunion « secrète » avec les chefs de la Chambre et du Sénat, ainsi que les présidents et les membres de rang des comités des la sécurité intérieure, Barack Obama espérait leur faire signer un communiqué bipartisan demandant l’aide fédérale dans la protection de leur vote. Les fonctionnaires des services de renseignement ont qualifié l’affaire « d’ingérence sans précédent d’une puissance étrangère dans le processus électoral». Mais si les dirigeants démocrates ont unanimement convenu de la nécessité de prendre la menace au sérieux, les républicains sont restés sceptiques.
Le camp de Donald Trump, en faisant clairement référence au mensonge des services secrets affirmant que Saddam Hussein avait eu des armes de destruction massive, entraînant l’invasion américaine en Irak, menace de jeter un premier nuage sur les relations entre le président Trump et la CIA.
Les dirigeants de l’agence en exercice sous l’administration Bush ont depuis longtemps été remplacés. Mais les commentaires du camp de Trump « indispose » la communauté du renseignement américain. On peut déjà noter que Donald Trump ne reçoit des briefings de renseignement qu’une fois par semaine, beaucoup moins que certains présidents qui l’ont précédé.
On ne peut s’empêcher d’être inquiet pour M. Trump : la CIA et le complexe militaro-industriel américain sont un état dans l’état. Une puissance dangereuse pour les présidents qui, comme John Fitzerald Kennedy, ont payé de leur vie de l’avoir « indisposé »…
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