Sanctoral 

XXIII° dimanche après la Pentecôte : « Il prit la jeune fille par la main et elle se leva »

A LA MESSE. L’Introït est tiré de Jérémie comme l’ancienne Épître de ce Dimanche. La demande du pardon revient sans cesse dans la bouche du peuple chrétien, parce que la fragilité de la nature entraîne sans cesse, ici-bas, le juste lui-même. Dieu sait notre misère ; il pardonne sans fin, à la condition de l’humble aveu des fautes et de la confiance dans sa bonté. Tels sont les sentiments qui inspirent à l’Église les termes de la Collecte du jour.

ÉPÎTRE. Le nom de Clément, qui vient d’être prononcé par l’Apôtre, est celui du second successeur de saint Pierre. Assez souvent, le vingt-troisième Dimanche après la Pentecôte ne précède que de fort peu la solennité de ce grand pontife et martyr du premier siècle. Disciple de Paul, attaché depuis à la personne de Pierre, et désigné par le vicaire de l’Homme-Dieu comme le plus digne de monter après lui sur la chaire apostolique, Clément, nous le verrons au 23 novembre, était l’un des saints de cette époque primitive les plus vénérés des fidèles. La mention faite de lui à l’Office du Temps, dans les jours qui précédaient son apparition directe au cycle de la sainte Église, excitait la joie du peuple chrétien et ranimait sa ferveur, à la pensée de l’approche d’un de ses plus illustres protecteurs et amis. Au moment où saint Paul écrivait aux Philippiens, Clément, qui devait longtemps encore survivre aux Apôtres, était bien des hommes dont parle notre Épître, imitateurs de ces illustres modèles, appelés à perpétuer dans le troupeau confié à leurs soins la règle des mœurs, moins encore par la fidélité de l’enseignement que par la force de l’exemple. L’unique Épouse du Verbe divin se reconnaît à l’incommunicable privilège d’avoir en elle, par la sainteté, la vérité toujours vivante et non point seulement lettre morte. L’Esprit-Saint n’a point empoché les livres sacrés des Écritures de passer aux mains des sectes séparées ; mais il a réservé à l’Église le trésor de la tradition qui seule transmet pleinement, d’une génération à l’autre, le Verbe lumière et vie, par la vérité et la sainteté de l’Homme-Dieu toujours présentes en ses membres, toujours tangibles et visibles en l’Église. La sainteté inhérente à l’Église est la tradition à sa plus haute expression, parce qu’elle est la vérité non seulement proférée, mais agissante, comme elle l’était en Jésus-Christ, comme elle l’est en Dieu. C’est là le dépôt que les disciples des Apôtres recevaient la mission de transmettre à leurs successeurs, comme les Apôtres eux-mêmes l’avaient reçu du Verbe descendu en terre. Aussi saint Paul ne se bornait point à confier l’enseignement dogmatique à son disciple Timothée ; il lui disait : « Sois l’exemple des fidèles dans la parole et la conduite. » Il redisait à Tite : « Montre-toi un modèle, en fait de doctrine et d’intégrité de vie. » Il répétait à tous : « Soyez mes imitateurs, comme je le suis de Jésus-Christ. » Il envoyait aux Corinthiens Timothée, pour leur rappeler, pour leur apprendre au besoin, non les dogmes seulement de son Évangile, mais ses voies en Jésus-Christ, sa manière de vivre ; car cette manière de vivre de l’Apôtre était, pour une part, son enseignement même en toutes les Églises ; et il louait les fidèles de Corinthe de ce qu’en effet ils se souvenaient de lui pour l’imiter en toutes choses, gardant ainsi la tradition de Jésus-Christ. Les Thessaloniciens étaient si bien entrés dans cet enseignement tiré de la vie de leur Apôtre, que, devenus ses imitateurs, et par là même ceux de Jésus-Christ, ils étaient, dit saint Paul, la forme de tous les croyants ; cet enseignement muet de la révélation chrétienne, qu’ils donnaient en leurs mœurs, rendait comme inutile la parole même des messagers de l’Évangile. L’Église est un temple admirable qui s’élève à la gloire du Très-Haut par le concours des pierres vivantes appelées à entrer dans ses murs. La construction de ces murailles sacrées sur le plan arrêté par l’Homme-Dieu est l’œuvre de tous. Ce que l’un fait par la parole, l’autre le fait par l’exemple ; mais tous deux construisent, tous deux édifient la cité sainte ; et, comme au temps des Apôtres, l’édification par l’exemple l’emporte sur l’autre en efficacité, quand la parole n’est pas soutenue de l’autorité d’une vie conforme à l’Évangile. Mais de même que l’édification de ceux qui l’entourent est, pour le chrétien, une obligation fondée à la fois sur la charité envers le prochain et sur le zèle de la maison de Dieu, il doit, sous peine de présomption, chercher dans autrui cette même édification pour lui-même. La lecture des bons livres, l’étude de la vie des saints, l’observation, selon l’expression de notre Épître, l’observation respectueuse des bons chrétiens qui vivent à ses côtés, lui seront d’un immense secours pour l’œuvre de sa sanctification personnelle et l’accomplissement des vues de Dieu en lui. Cette fréquentation de pensées avec les élus de la terre et du ciel nous éloignera des mauvais, qui repoussent la croix de Jésus-Christ et ne rêvent que les honteuses satisfactions des sens. Elle placera véritablement notre conversation dans les cieux. Attendant pour un jour qui n’est plus éloigné l’avènement du Seigneur, nous demeurerons fermes en lui, malgré la défection de tant de malheureux entraînés par le courant qui emporte le monde à sa perte. L’angoisse et les souffrances des derniers temps ne feront qu’accroître en nous la sainte espérance ; car elles exciteront toujours plus notre désir du moment solennel où le Seigneur apparaîtra pour achever l’œuvre du salut des siens, en revêtant notre chair même de l’éclat de son divin corps. Soyons unis, comme le demande l’Apôtre, et, pour le reste : « Réjouissez-vous toujours dans le Seigneur », écrit-il à ses chers Philippiens ; « je le dis de nouveau, réjouissez-vous : le Seigneur est proche. »

ÉVANGILE. Quoique le choix de cet Évangile pour aujourd’hui ne remonte pas partout à la plus haute antiquité, il entre bien dans l’économie générale de la sainte Liturgie, et confirme ce que nous avons dit du caractère de cette partie de l’année. Saint Jérôme nous apprend, dans l’Homélie du jour, que l’hémorroïsse guérie par le Sauveur figure la gentilité, tandis que la nation juive est représentée par la fille du prince de la synagogue. Celle-ci ne devait retrouver la vie qu’après le rétablissement de la première ; et tel est précisément le mystère que nous célébrons en ces jours, où, la plénitude des nations avant reconnu le médecin céleste, l’aveuglement dont Israël avait été frappé cesse enfin lui-même. De cette hauteur où nous sommes parvenus, de ce point où le monde, ayant achevé ses destinées, ne va sembler sombrer un instant que pour se dégager des impies et s’épanouir de nouveau, transformé dans la lumière et l’amour : combien mystérieuses et à la fois fortes et suaves nous apparaissent les voies de l’éternelle Sagesse ! Le péché, dès le début, avait rompu l’harmonie du monde, en jetant l’homme hors de sa voie. Si, entre toutes, une famille avait attiré sur elle la miséricorde, la lumière, en se levant sur cette privilégiée, n’avait fait que manifester plus profonde la nuit où végétait le genre humain. Les nations, abandonnées à leur misère épuisante, voyaient les attentions divines aller à Israël, et l’oubli s’appesantir sur elles au contraire. Lors même que les temps où la faute première devait être réparée se trouvèrent accomplis, il sembla que la réprobation des gentils dût être consommée du même coup ; car on vit le salut, venu du ciel en la personne de l’Homme-Dieu, se diriger exclusivement vers les Juifs et les brebis perdues de la maison d’Israël. Cependant la race gratuitement fortunée, dont les pères et les premiers princes avaient si ardemment sollicité l’arrivée du Messie, ne se trouvait plus à la hauteur où l’avaient placée les patriarches et les saints prophètes. Sa religion si belle, fondée sur le désir et l’espérance, n’était plus qu’une attente stérile qui la tenait dans l’impuissance de faire un pas au-devant du Sauveur ; sa loi incomprise, après l’avoir immobilisée , achevait de l’étouffer dans les liens d’un formalisme sectaire. Or, pendant qu’en dépit de ce coupable engourdissement, elle comptait, dans son orgueil jaloux, garder l’apanage exclusif des faveurs d’en haut, la gentilité que son mal, toujours grandissant lui aussi, portait au-devant d’un libérateur, la gentilité reconnaissait en Jésus le Sauveur du monde, et sa confiante initiative lui méritait d’être guérie la première. Le dédain apparent du Seigneur n’avait servi qu’à l’affermir dans l’humilité, dont la puissance pénètre les cieux. Israël devait donc attendre à son tour. Selon qu’il le chantait dans le psaume, l’Éthiopie l’avait prévenu en tendant ses mains vers Dieu la première. Désormais ce fut à lui de retrouver, dans les souffrances d’un long abandon, l’humilité qui avait valu à ses pères les promesses divines et pouvait seule lui en mériter l’accomplissement. Mais aujourd’hui la parole de salut a retenti dans toutes les nations, sauvant tous ceux qui devaient l’être. Jésus, retardé sur sa route, arrive enfin à la maison vers laquelle se dirigeaient ses pas dès l’abord, à cette maison de Juda où dure toujours l’assoupissement de la fille de Sion. Sa toute-puissance compatissante écarte de la pauvre abandonnée la foule confuse des faux docteurs, et ces prophètes de mensonge qui l’avaient endormie aux accents de leurs paroles vaines ; il chasse loin d’elle pour jamais ces insulteurs du Christ, qui prétendaient la garder dans la mort. Prenant la main de la malade, il la rend à la vie dans tout l’éclat de sa première jeunesse ; prouvant bien que sa mort apparente n’était qu’un sommeil, et que l’accumulation des siècles ne pouvait prévaloir contre la parole donnée par Dieu à Abraham son serviteur. Au monde maintenant de se tenir prêt pour la transformation dernière. Car la nouvelle du rétablissement de la fille de Sion met le dernier sceau à l’accomplissement des prophéties. Il ne reste plus aux tombeaux qu’à rendre leurs morts. La vallée de Josaphat se prépare pour le grand rassemblement des nations ; le mont des Oliviers va de nouveau porter l’Homme-Dieu, mais cette fois comme Seigneur et comme juge.

L’acquittement du service que nous devons à Dieu est, de soi, bien au-dessous de la Majesté souveraine ; mais le Sacrifice, qui en fait partie chaque jour, l’ennoblit jusqu’à l’infini et supplée aux mérites qui nous font défaut, ainsi que l’exprime la Secrète de ce Dimanche. Entrés, dans les Mystères sacrés, en participation de la vie divine, demandons au Seigneur que nous ne soyons plus accessibles aux dangers d’ici-bas.

Les Quatre saints Couronnés, Martyrs

Quatre frères : Sévère, Sévérien, Carpophore et Victorin, ayant montré hardiment leur aversion pour le culte des dieux, pendant la persécution de Dioclétien, furent frappés à coups de lanières plombées et perdirent la vie pour le nom de Jésus-Christ. Leurs corps, jetés aux chiens, ayant été laissés intacts par ces bêtes, furent recueillis par les Chrétiens et inhumés dans une sablonnière, sur la voie Lavicane, à trois milles de Rome, près du tombeau des saints Martyrs Claude, Nicostrate, Symphorien, Castor et Simplicius, qui avaient souffert sous le même empereur. Ceux-ci, sculpteurs de grand mérite, s’étaient absolument refusés à tailler des statues d’idoles. Conduits devant l’image du soleil pour l’adorer, ils avaient déclaré qu’ils ne se rendraient jamais coupables de vénérer l’ouvrage de la main des hommes. A cause de cela, on les avait jetés en prison, et comme, après plusieurs jours, on les retrouvait aussi fermes dans leur résolution, on les avait d’abord flagellés avec des scorpions, puis enfermés vivants dans des coffres de plomb, et jetés ainsi dans le Tibre. Il existe à Rome une église dédiée aux quatre saints Couronnés, dont les noms, restés longtemps inconnus, ont été enfin divinement manifestés. C’est dans cette église que furent honorablement ensevelis, avec leurs quatre corps, ceux des cinq autres Martyrs ; et on célèbre leur Fête à tous, le sixième jour des ides de novembre.

Saint Geoffroy ou Godefroy, Évêque d’Amiens

Saint Geoffroy naquit à Moulincourt, au diocèse de Soissons, d’une famille encore plus distinguée par ses vertus et sa charité que par sa haute noblesse. Ses parents secouraient les églises et leur bonté rayonnait sur toutes les misères. Ces bons chrétiens n’étaient plus jeunes lorsqu’un troisième fils leur naquit. Ils consacrèrent leur benjamin à Dieu et le présentèrent à son oncle, évêque de Soissons. Celui-ci donna son propre nom au nouveau-né, Geoffroy, qui signifie: paix de Dieu. Lorsqu’il eut cinq ans, il conduisit l’enfant dans son monastère près de Péronne et se chargea de son éducation. Le nouveau Samuel grandit en âge et en sagesse à l’ombre des autels. A l’âge de vingt-cinq ans, Nathaud, évêque de Noyon, l’ordonna prêtre malgré les humbles protestations de l’élu qui se considérait indigne de ce trop grand honneur. Bientôt un concile le nomma évêque d’Amiens. Désolé et effrayé de l’honneur, Geoffroy s’enfuit secrètement. Découvert au sein de sa retraite, il fut ramené à Amiens et investi de l’autorité épiscopale par l’archevêque de Reims. Le nouveau pasteur revêtit une robe de bure, entra pieds nus dans la cité et tint un langage tout surnaturel à la foule émue et émerveillée. Chaque jour, treize pauvres étaient admis à manger à la table du Saint qui leur lavait lui-même les pieds. Il secourait les veuves et les enfants abandonnés, portait de la nourriture aux lépreux qu’il comblait de soins particuliers. Saint Geoffroy défendait les opprimés, sermonait ceux qui abusaient de leur pouvoir et qui vivaient dans la dépravation. Décidant d’en finir avec les gênantes admonitions de leur évêque, des seigneurs lui envoyèrent du vin empoisonné, mais Dieu avertit intérieurement saint Geoffroy du danger qui le menaçait. Guerre, pillage, débauche régnaient en maîtres dans la ville d’Amiens, navrant le coeur de saint Geoffroy qui se jugeait responsable des péchés de son peuple. Il résolut donc d’aller s’ensevelir à la Grande Chartreuse de Grenoble pour tâcher d’obtenir la conversion de ses ouailles par sa vie de pénitence. Il quitta son diocèse après le concile national des évêques de France tenu à Vienne, pendant lequel il soutint brillamment les droits du souverain pontife. Sur la réclamation des habitants d’Amiens, les évêques réunis en concile à Soissons en 1115 intimèrent à saint Geoffroy l’ordre de réintégrer sa bergerie. Les exhortations, les réprimandes, les invectives, les supplications et les promesses s’avérèrent inutiles pour ramener son peuple dans les sentiers du bien. Le saint pasteur transmit les menaces du Ciel à ses brebis rebelles qui taxèrent ses prédictions de visions chimériques. Hélas ! ces âmes sourdes aux avertissements de Dieu apprécièrent trop tard les discours prophétiques de leur évêque. Avant de rendre son âme à Dieu, saint Geoffroy devait être témoin du désastre qui transforma la cité d’Amiens en un monceau de cendres et de ruines. Peu de temps après ces sinistres événements, il tomba gravement malade. À l’abbaye de St-Crépin, le vénéré pasteur reçut la communion des mains de Lisiard, évêque de Soissons, et rendit son âme à Dieu le 8 novembre 1115.

Martyrologe

A Rome, sur la voie Lavicane, à trois mille de la Ville, la passion des saints martyrs Claude, Nicostrate, Symphorien, Castorius et Simplice. Mis en prison d’abord, ils furent ensuite cruellement déchirés avec des scorpions, mais comme ils demeuraient inébranlables dans leur foi au Christ, Dioclétien ordonna de les précipiter dans le fleuve.

Sur la même voie Lavicane, l’anniversaire des saints Quatre Couronnés, frères : Sévère, Sévérien, Carpophore et Victorin. Sous le même empereur, ils furent si cruellement meurtris avec des cordes garnies de plomb, qu’ils expirèrent sous les coups. Comme on ignorait leurs noms, avant que, bien des années plus tard, ils eussent été révélés par le Seigneur, il fut statué qu’on célébrerait leur anniversaire avec celui des cinq précédents, sous l’appellation des quatre Saints Couronnés, pratique qui s’est conservée dans l’église, même depuis que leurs noms nous ont été révélés.

De plus, à Rome, le pape saint Deusdedit Ier, dont le mérite fut si grand qu’il guérit un lépreux par un baiser.

Au village de Blexen, près du Weser, en Germanie, saint Willehad, premier évêque de Brême. Avec saint Boniface, dont il fut le disciple, il propagea l’évangile dans la Frise et dans la Saxe.

A Soissons, en France, saint Geoffroy, évêque d’Amiens, homme d’une grande sainteté.

A Verdun, en Gaule, saint Maur, évêque et confesseur.

A Tours, en Gaule, saint Clair prêtre, dont l’épitaphe fut composée par saint Paulin.

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