5ème dimanche après Pâques – Demandez et vous recevrez
Encore quatre jours, et le divin Ressuscité, dont la société nous était si chère et si précieuse, aura disparu de la terre. C’est par cette annonce que ce cinquième dimanche après la joyeuse Pâque semble nous préparer à la séparation. Le dimanche suivant ouvrira la longue série de ceux qui doivent se succéder d’ici qu’il revienne pour juger le monde. A cette pensée, le cœur du chrétien se serre ; car il sait qu’il ne verra son Sauveur qu’après cette vie ; et il s’unit à la tristesse que ressentirent les Apôtres à la dernière Cène, lorsqu’il leur dit cette parole : « Encore un peu de temps, et vous ne me verrez plus». Mais après la résurrection de leur Maître, quelle dut être l’angoisse de ces hommes privilégiés qui comprenaient enfin ce qu’il était, lorsqu’ils s’aperçurent comme nous que l’heureuse quarantaine, si rapidement écoulée, touchait bientôt à sa fin ! Avoir vécu, pour ainsi dire, avec Jésus glorifié, avoir ressenti les effets de sa divine condescendance, de son ineffable familiarité, avoir reçu de sa bouche tous les enseignements qui devaient les mettre en état d’accomplir ses volontés, en fondant sur la terre cette Église qu’il était venu choisir pour son Épouse ; et se trouver tout d’un coup livrés à eux-mêmes, privés de sa présence visible, ne plus voir ses traits, ne plus entendre sa voix, et mener jusqu’au bout leur carrière avec de tels souvenirs : c’est le sort qui attendait les Apôtres et qu’ils avaient à accepter. Nous éprouverons quelque chose de ce qu’ils durent ressentir, si nous nous sommes tenus unis à notre mère la sainte Église. Depuis le jour où elle ouvrit en notre faveur la série des émotions qui la transportent chaque année, lorsqu’elle repasse successivement tant de sublimes anniversaires, à partir de celui de la Naissance de son Emmanuel, jusqu’à celui de sa triomphante Ascension au ciel, n’est-il pas vrai que nous aussi nous avons vécu en société avec son divin Époux, qui est en même temps notre Rédempteur, et qu’au moment de le voir disparaître aux regards de notre foi attentive jusqu’à cette heure à le suivre dans tous ses états, l’émotion que ressentirent les Apôtres vient nous gagner nous-mêmes ? Mais il est sur la terre, à la veille du jour où Jésus doit la quitter pour le ciel, une créature dont nous ne pourrons jamais sonder ni décrire les sentiments ; c’est Marie qui avait retrouvé son fils, et qui voit approcher le moment où il va s’éloigner encore. Jamais cœur ne fut plus soumis aux volontés de son Maître souverain ; mais jamais aussi semblable sacrifice ne fut demandé à une créature. Jésus veut que l’amour de Marie croisse encore, et c’est pour cela qu’il la soumet à l’épreuve de l’absence. Il veut en outre qu’elle coopère à la formation de l’Église, qu’elle ait la main dans ce grand œuvre qui ne devait s’élever qu’avec son concours. C’est en cela que se montre encore l’amour de Jésus pour sa mère ; il désire pour elle le mérite le plus grand, afin de déposer sur sa tête le diadème le plus glorieux, au jour où elle montera au ciel à son tour pour y occuper le trône qui a été préparé pour elle au-dessus de toute la création glorifiée.
Ce n’est plus, il est vrai, un glaive de douleur qui transpercera le cœur de Marie ; c’est le feu d’un amour que nul langage ne saurait décrire qui consumera ce cœur dans une angoisse à la fois poignante et délicieuse, sous l’effort de laquelle elle tombera un jour, comme le fruit mûr que la branche de l’arbre ne soutient plus, parce qu’elle n’a plus rien à lui donner. Mais à ces instants suprêmes où nous sommes, dans les dernières étreintes de ce fils divin qui va la laisser en exil, quel serrement au cœur d’une telle mère qui n’a joui que durant quarante jours du bonheur de le voir glorieux et triomphant, et de recevoir ses divines et filiales caresses ! C’est la dernière épreuve de Marie ; mais en face de cette épreuve elle n’a encore que sa même réponse : « Voici la servante du Seigneur. ; qu’il me soit fait selon votre parole. » Sa vie tout entière est dans le bon plaisir de Dieu, et c’est ainsi qu’elle devient toujours plus grande, plus rapprochée de Dieu. Une sainte âme du XVIIe siècle, favorisée des plus sublimes révélations, nous a appris que le choix fut donné à Marie d’entrer dans le repos de la gloire avec son fils, ou de demeurer encore sur la terre dans les labeurs de l’enfantement de la sainte Église ; mais qu’elle préféra retarder les joies maternelles que lui réservait l’éternité, et servir, aussi longtemps qu’il plairait à la divine Majesté, au grand œuvre qui importait tant à l’honneur de son fils et au bien de la race humaine, dont elle était devenue aussi la mère. Si un tel dévouement éleva la coopératrice de notre salut au plus haut degré de la sainteté, en lui faisant atteindre le point culminant de sa mission, on est en droit de conclure que l’amour de Jésus pour sa mère s’accrut encore, lorsqu’il reçut d’elle une marque si sensible de l’union qu’elle avait aux plus intimes désirs de son cœur sacré. De nouveaux témoignages de sa tendresse furent pour Marie la récompense de cet oubli d’elle-même, et de cette conformité aux desseins qui l’appelaient à être véritablement dès ici-bas la Reine des Apôtres, comme l’appelle l’Église, et la coadjutrice de leurs travaux.
Le Seigneur, durant ces dernières heures, allait multipliant les témoignages de sa bonté envers tous ceux qu’il avait daigné admettre dans sa familiarité. Pour plusieurs d’entre eux la séparation devait être longue. Jean le bien-aimé aurait à attendre plus de cinquante années sa réunion à son Maître divin. Ce ne serait qu’après trente ans que Pierre monterait à son tour sur l’arbre de la croix, pour se réunir à celui qui lui avait confié les clefs du royaume des cieux. Le même intervalle de temps devait être rempli par les soupirs enflammés de Madeleine ; mais aucun d’eux ne murmurait ; car tous sentaient qu’il était juste que le divin Rédempteur du monde, ayant suffisamment établi la foi de sa résurrection, « entrât enfin dans sa gloire ».Jésus avait fait donner ordre à ses disciples par les Anges, le jour même de sa résurrection, de se rendre en Galilée pour y jouir de sa présence. Nous avons vu comment ils obéirent à cet ordre, et en quelle manière le Sauveur se manifesta à sept d’entre eux sur les bords du lac de Génésareth ; ce fut la huitième des manifestations que les Évangiles ont enregistrées. La neuvième eut lieu pareillement dans la Galilée. Jésus aimait cette contrée, au sein de laquelle il avait pris la plupart de ses disciples, où Marie et Joseph avaient habité, et où lui-même avait passé tant d’années dans le travail et l’obscurité. La population, plus simple et plus morale que celle de la Judée, l’attirait davantage. Saint Matthieu nous révèle que la plus solennelle des manifestations de Jésus ressuscité, celle que nous compterons pour la dixième de fait, et pour la neuvième de celles que rapportent les Évangélistes, eut lieu sur une montagne de cette contrée. Selon le sentiment de saint Bonaventure et celui du pieux et savant Denys le Chartreux, cette montagne fut le Thabor, dont le sommet avait déjà été honoré par le mystère de la Transfiguration. Là se trouvèrent réunis, comme nous l’apprenons de saint Paul, plus de cinq cents disciples de Jésus, assemblée formée en grande partie des habitants de la Galilée qui avaient cru en Jésus dans le cours de sa prédication, et qui avaient mérité d’être témoins de ce nouveau triomphe du Nazaréen. Jésus se montra à leurs regards, et leur donna une telle certitude de sa résurrection que l’Apôtre des Gentils, écrivant aux chrétiens de Corinthe, invoque leur témoignage à l’appui de ce mystère fondamental de notre foi. Désormais nous demeurons sans renseignements positifs sur ce qui se passa encore dans la Galilée, quant à ce qui est des manifestations du Sauveur ressuscité ; mais nous savons qu’il intima à ses disciples l’ordre de se rendre à Jérusalem, où il devait bientôt reparaître à leurs yeux une dernière fois, avant de monter aux cieux. Suivons en ces jours la marche des disciples vers la ville coupable. Combien de fois, dans cette même ville, Jésus avait voulu réunir ses fils comme la poule ramasse ses poussins sous ses ailes, et elle ne l’a pas voulu! Il va revenir dans ses murs ; mais elle ne le saura pas. Il ne se montrera pas à elle, il ne se révélera qu’à ses amis, et il partira en silence, pour ne plus revenir qu’au jour où il viendra juger ceux qui n’ont pas connu le temps de sa visite.
Le cinquième dimanche après Pâques, dans l’Église grecque, est appelé le dimanche de l’Aveugle-né, parce qu’on y lit le récit de l’Évangile où est rapportée la guérison de cet aveugle. On l’appelle aussi le dimanche de l’Épisozomène, qui est un des noms par lesquels les Grecs désignent le mystère de l’Ascension, dont la solennité, chez eux comme chez nous, interrompt le cours de cette semaine liturgique.
Sanctoral
Sainte Rita de Cassia, Veuve († 1456)
Marguerite de Cassia, dont le peuple a abrégé le nom en l’appelant Rita, se sentit, toute jeune, attirée vers la virginité; il lui fallut cependant plier devant la volonté de ses parents et s’engager dans le mariage. Son mari, de noble origine, était d’une humeur violente; ce fut pour la sainte jeune femme une occasion continuelle d’angélique patience. Elle eut enfin le bonheur de faire la conquête de cette âme au prix de beaucoup de larmes, de pénitences et de prières. Après la mort de son mari et de ses enfants, Rita eut hâte de se donner toute à Dieu. Elle fut introduite une nuit par trois protecteurs célestes, saint Jean-Baptiste, saint Augustin et saint Nicolas de Tolentino, dans un cloître d’Augustines dont toutes les portes étaient fermées. La supérieure, frappée du miracle, ne fit pas de difficulté d’accepter cette âme d’élite. Dès lors, les jeûnes quotidiens au pain et à l’eau, les flagellations, le cilice, les veilles furent toute la vie de Rita. Elle méditait la Passion du Sauveur, de minuit jusqu’à l’aurore, absorbée dans la douleur la plus profonde. Un jour, une épine se détacha de la couronne du Crucifix devant lequel elle priait et lui fit au front une blessure, qu’elle porta toute sa vie. De sa plaie sortaient des vers qu’elle appelait ses petits anges. Cette infirmité l’obligea de vivre dans une retraite forcée au milieu de son couvent, et elle en profita pour se plonger plus avant dans les saintes veilles, les pénitences et la méditation. Rita fit alors une maladie de quatre ans qui acheva de purifier son âme. A sa demande, Dieu fit fleurir un rosier en plein hiver; elle put respirer le doux parfum de ces roses; elle obtint aussi, hors de saison, des figues d’une remarquable beauté. Jésus-Christ vint enfin Lui-même, avec Sa divine Mère, annoncer à Rita que bientôt la couronne d’épines serait remplacée sur sa tête par la couronne de gloire. A sa mort, la cloche du couvent fut mise en mouvement par la main des anges, et une lumière éclatante se répandit dans sa cellule.
Martyrologe
A Rome, les saints martyrs Faustin, Timothée et Vénuste.
En Afrique, les saints martyrs Caste et émile, qui consommèrent leur martyre par le feu. Saint Cyprien rapporte que, vaincus dans un premier combat, le Seigneur les fit triompher dans un second, afin qu’après avoir cédé à la rigueur des flammes, ils devinssent plus forts que les flammes elles-mêmes.
A Comane, dans le Pont, saint Basilisque martyr. Sous l’empereur Maximien et le préfet Agrippa, on lui mit des chaussures de fer garnies de clous embrasés; puis, après divers autres tourments, il fut décapité, jeté dans la rivière, et parvint ainsi à la gloire du martyre.
En Corse, sainte Julie vierge, qui, par le supplice de la croix, obtint la couronne de gloire.
En Espagne, sainte Quitérie, vierge et martyre.
A Ravenne, saint Marcien, évêque et confesseur.
A Pistoie, en Toscane, le bienheureux Atton évêque, de l’Ordre de Vallombreuse.
Dans l’Auxerrois, le bienheureux abbé Romain, qui servit saint Benoît dans sa grotte de Subiaco. Il vint ensuite en Gaule, y bâtit un monastère, laissa de nombreux disciples imitateurs de sa sainteté et s’endormit dans le Seigneur.
Près d’Aquin, saint Foulques confesseur.
A Auxerre, sainte Hélène vierge.
A Cascia en Ombrie, sainte Rita veuve, moniale de l’Ordre des Ermites de saint Augustin. Dégagée des liens du mariage, elle aima uniquement le Christ, son éternel époux.
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