Dans le cadre de notre rubrique sur « l’affaire Viganò », nous publions aujourd’hui cette réflexion d’Aldo Maria Valli parue sur son blog Duc in Altum. Le célèbre journaliste italien dans ce texte intitulé Questions canoniques épineuses et petites pensées d’un catholique fondamental, aborde avec un bon sens catholique légèrement taquin, l’épineuse question du ‘pape’ qui peut pousser « à polémiquer inutilement » et faire « perdre de vue l’essentiel » et son soutien à Mgr Viganò.

Munus et ministerium, sede impedita et sede vacante, papa materialiter et papa formaliter « il me semble que tout cela est stérile, peu concluant »

« Depuis quelque temps, parmi les lecteurs qui m’écrivent (merci toujours à tous), les questions de droit canonique prédominent. Ils parlent de munus et ministerium, de sede impedita et sede vacante, de papa materialiter et papa formaliter, ils citent d’éminents savants, ils exposent des thèses et des contre-thèses. Et ils veulent savoir ce que je pense.

J’apprécie vraiment, vraiment. Et je vous félicite pour les analyses. Mais je ne peux pas donner de réponses car je ne suis pas à la hauteur. Et puis, honnêtement, ça ne me passionne pas. Ce n’est pas que je refuse d’aborder ces questions. J’ai beaucoup lu à ce sujet (ce qui n’est pas habituel, car nous, les journalistes, sommes notoirement paresseux et superficiels), mais finalement, il me semble que tout cela est stérile, peu concluant.

Je vais au concret. Disons que je meurs en ce moment même (ce qui est très possible et ce qui ne me dérangerait pas, étant donné que je mourrais en écrivant, c’est-à-dire en cultivant ma passion).

Bien. J’essaie d’imaginer la scène. Voici que l’âme du soussigné, ayant abandonné le vieux corps, se présente devant le bon Dieu. Et comment m’accueille le Juge Suprême ? Me demande-Il ce que je pense de la démission de Benoît XVI ? Veut-Il peut-être savoir où je me situe sur la question du munus et du ministerium ? Me posera-t-Il des questions sur le siège entravé et le sédévacantisme ?

A l’heure de la mort, en présence du bon Dieu, la première question ne sera-t-elle pas : « Alors Aldo Maria, te voilà. Dis-moi, as-tu été un homme bon ? »

Bien sûr, tout est possible (comme le disait Ratzinger quand il ne voulait pas donner de réponse claire), donc il est aussi possible que le bon Dieu, face à une âme arrivée fraîche en sa présence, veuille l’interroger un peu sur l’ordre de l’Église (après tout, c’est Lui qui l’a voulue). Mais franchement, cela me semble un scénario improbable. Je pense plutôt que la première question sera quelque chose comme : « Alors Aldo Maria, te voilà. Dis-moi, as-tu été un homme bon ? As-tu gardé mes commandements ? As-tu cru en Moi ? Avez-vous été témoin de la foi ? As-tu aimé mon Fils ? M’as-tu mis au-dessus de tout ? »

Après cela, ayant pris confiance, on avancera peut-être sur le terrain glissant des nœuds ecclésiaux les plus épineux (et à ce moment-là je pense vraiment que ce serait moi qui demanderai au bon Dieu de m’enlever un peu de ma curiosité). Mais, je le répète, j’imagine que les priorités seraient autres.

Vous me direz : « Ah, tu es un petit rusé, ainsi tu t’en laves les mains ». Mais non, je l’ai dit et je le répète : je n’ignore pas l’importance de certains enjeux. Il me semble simplement qu’ils ne sont pas si décisifs pour le sort de mon âme. En effet, j’ai l’impression qu’ils me poussent à polémiquer inutilement et à perdre de vue l’essentiel.

Il ne m’appartient pas d’établir si Untel, strictement selon les codes et les canons, est pape ou non.

Vous me direz encore : alors pourquoi soutenez-vous Mgr Viganò ? C’est simple : je le soutiens parce que je partage son analyse et je retiens que, au milieu de tant de confusion, sa voix est claire, et m’aide à nourrir ma foi. Cependant, il ne m’appartient pas d’établir si Untel, strictement selon les codes et les canons, est pape ou non. Ni il me semble utile de poursuivre de vagues reconstitutions des coulisses. Je peux seulement dire, en toute sincérité, si dans mon cœur je ressens Untel en tant que pape, c’est-à-dire père, ou non. Et à ce sujet, je l’ai déjà dit ouvertement à plusieurs reprises : je ne ressens pas dans mon cœur le Pape actuel comme un père. Je l’ai aussi mis noir sur blanc (c’était en février 2021) dans un article intitulé Rome sans pape [vous pouvez le retrouver ici], comme le beau roman de Morselli. Et la raison est très simple : je ne le ressens pas comme pape parce qu’il ne me confirme pas dans la foi. Qu’il s’agisse d’un usurpateur, d’un squatteur ou d’un pape non autorisé, je laisse le soin d’en décider à qui de droit. Les paroles de l’Évangile me suffisent : « Vous les reconnaîtrez à leurs fruits ».

D’ailleurs, une question que le bon Dieu, je parie, me posera sera celle-ci : « Et toi, mon cher, quel genre d’arbre étais-tu ? Quel genre de fruit as-tu produit ? Tu sais, n’est-ce pas, que tout arbre qui ne produit pas de bons fruits est coupé et jeté au feu ? »

Alors je serai envahi par une immense anxiété, comme lors de tous les examens que j’ai passés dans ma vie depuis la deuxième année du primaire, où je restais silencieux comme un poisson devant l’institutrice qui voulait savoir de moi combien font quatre fois quatre.

Soutien à Mgr Viganò car sa voix est claire

Je sais, je sais… Si un théologien de la nouvelle école lisait mes notes (tout est possible), il dirait maintenant : « Regardez comme c’est rétrograde ! Encore avec cette histoire du Juge Suprême ! Toujours la peur de Dieu. Le pauvre, il ne sait pas que tout ça a été dépassé ! »

Eh bien, avec respect, j’ai l’impression que les théologiens de la nouvelle école disent cela parce qu’au fond, ils s’en fichent du bon Dieu, ils veulent juste une vie facile.

En tout cas. Le fait est que je laisse volontiers le droit canonique et ecclésiastique à ceux qui ont étudié le sujet. Et pendant qu’ils s’affairent à dénouer des nœuds très complexes, j’adresse une prière au Ciel : « Seigneur, ayez pitié de moi, pécheur ».

Je suis peut-être un catholique basique, mais c’est tout.

(Même l’invocation « Seigneur, ayez pitié », j’en suis sûr, ne plait pas aux théologiens de la nouvelle école. Mais tu sais quoi ? Je m’en fiche). »

Une réflexion que la rédaction de MPI fait sienne !

Francesca de Villasmundo

Les autres articles – sur cette fausse excommunication – parus sur MPI :
– 20 juin 2024 : Communiqué de S.E. Mgr Carlo Maria Viganò, archevêque, à propos de l’ouverture du procès pénal extrajudiciaire pour crime de schisme que lui intente Rome
– 20 juin 2024 : Le Vatican accuse Mgr Viganò de schisme pour « déni de la légitimité du pape François »
– 24 juin 2024 : Mgr Viganò : “non, je ne me suis pas rendu au Vatican et je n’ai pas l’intention d’aller au Saint-Office le 28 juin”
– 28 juin 2024 : “J’accuse” : déclaration de Mgr Carlo Maria Viganò, Archevêque Titulaire d’Ulpiana, Nonce Apostolique, sur l’accusation de schisme
– 28 juin 2024 : Solidarité pour Mgr Viganò, le pasteur qui donne la parole aux véritables marginalisés
– 29 juin 2024 : Sur « l’affaire Viganò » : un regard d’ensemble
– 01 juillet 2024 : Wikileaks 2017 et “affaire Viganò” : le coup d’État de Clinton, Obama, Soros contre Benoît XVI
– 03 juillet : Procès contre Mgr Viganò : le soutien de Iustitia in Veritate
– 05 juillet : L’Église conciliaire excommunie Mgr Viganò
– 05 juillet : Mgr Schneider avait demandé au pape François de ne pas excommunier Mgr Viganò
– 07 juillet 2024 : Mel Gibson envoie une lettre de soutien à Mgr Carlo Maria Vigano, archevêque titulaire d’Ulpiana, Nonce apostolique
– 08 juillet 2024 : Mgr Strickland : “Le Vatican est plus intéressé à faire taire Mgr Viganò qu’à répondre à ses allégations”
– 15 juillet 2024 : Suite des réflexions sur la déclaration de Mgr Vigano à la suite de son « excommunication »

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