Le pape François et le président argentin Fernandez ont cordialement parlé de tout, le 31 janvier 2020, à l’exception de l’avortement, que ce dernier introduit en Argentine.
Le Saint-Siège a été contraint de s’expliquer : « Mais le sujet a été traité avec le secrétaire d’État ». L’avortement est considéré comme un thème secondaire. Et le péroniste concubin a également pu communier au Vatican !
Le quotidien italien La nuova bussola quotidianna révèle ces tristes et scandaleux faits dans un long article paru le 2 février 2020 :
« Tout a été dit sauf pour l’avortement. En effet, non, mais oui, bref … peut-être. Allez, l’Église [officielle, ndlr] est dans la confusion. En Argentine, le débat est incandescent sur la volonté du nouveau président albicelestede dépénaliser l’avortement. Après le rejet du Sénat en 2018, la vague des mouchoirs verts est revenue à la charge, grâce aussi aux ambiguïtés de son prédécesseur à la Casa Rosada, Mauricio Macri. Et l’avortement était le thème tabou qui a plané dans le salon du Vatican où le pape François a rencontré Alberto Fernandez vendredi.
Mais durant les 44 minutes de conversation cordiale sur de nombreux points communs, dont les questions sociales – comme le disent les chroniques – il n’y avait pas de place pour parler de l’avortement, qui devrait cependant être plus cher à l’Église que la pauvreté et le chômage, et qui est en train d‘orienter l’agenda politique du pays latin. De l’avortement donc, il n’en fut pas question au cours de la conversation entre le chef de l’État et le pape. Et la machine communicative du Vatican l’a réaffirmé avec diligence en corrigeant une gaffequi créait des maux de tête à l’entouragedu président. (…)
En effet, Fernandez, immédiatement après la rencontre avec le pape, a réitéré qu’il poursuivra son travail pour donner la possibilité aux femmes qui le souhaitent d’avorter légalement. Le fait est que le Saint-Siègedans une note venait de dire que lors de cette récente rencontre, il avait été également question de « protection de la vie dès la conception ». Fernandez a cependant nié que lors de l’audiencecette question ait été abordée, définie par certains reportages comme « source de division ».
Alors ? Les deux ont-ils parlé d’avortement, oui ou non ? Quelle est la bonne version ? Un deuxième communiqué de la salle de presse du Vatican arésolu le problème: « Tous les thèmes mentionnés dans le communiqué de presse concernant l’audience avec le président argentin n’ont pas été abordés dans la même conversation. Certains ont été examinés lors d’une rencontre avec la Secrétairerie d’État en marge de la réunion avec le Saint-Père », a déclaré le directeur de la salle de presse du Vatican, Matteo Bruni.
Traduction : oui, on a parlé d’avortement, mais pas avec le pape, mais avec le cardinal Pietro Parolin. Et en quels termes alors? Fernandez a ensuite pu boucler le cercle et – interrogé par La Nacion– dire que « Parolin m’a manifesté son inquiétude sur de sujet et m’a rappelé que la position de l’Église est toujours en défense de la vie dès la conception », ajoutant qu’il s’est agi d’une évocation fugace, après quoi d’autres questions ont été abordées. (…)
L’étape Vatican pour le président péroniste ne s’est donc pas mal passée, somme toute, et grâce aussi à cet « incident » clos à temps et avec habileté par les porte-paroles du Vatican, il a pu surmonter le dernier obstacle : celui de l’opposition de l’Église à la loi de dépénalisation de l’avortement. Avec une ambiguïté suspecte : d’une part la doctrine est réitérée, mais d’autre part, si l’on considère aussi cet épisode, le thème de l’avortement devient une matière secondaire, à traiter uniquement avec le ministre des Affaires étrangères d’outre-Tibre. (…)
Si ce n’est pas une bénédiction pour Fernandez, nous en sommes proches. En revanche, ce n’était pas une bénédiction, mais un véritable viatique, ce que Fernandez a recueilli quelques minutes avant de rencontrer le Saint-Père : il a pu faire la communion au Vatican. Lui, qui non seulement est l’exemple classique de l’homme politique avorteur, mais qui, vivant more uxorio avec la journaliste Fabiola Yáñez, qui est appelée « compagne » pour la distinguer de l’ex-femme, n’est pas dans les dispositions pour pouvoir accéder au sacrement de l’Eucharistie (…).
La vidéo qui encastre le tout est en train de faire le tour des journaux hispanophones et indigne les réseaux sociaux : elle montre le nouveau président de la République argentine Alberto Fernandez lors d’une messe, celle célébrée le 31 janvier dernier au Vatican par le chancelier de l’Académie pontificale des sciences sociales, l’archevêque Marcelo Sánchez Sorondo, également argentin. Quelques secondes, juste le temps d’encadrer le président et sa concubine en train de communier. Les deux sont vus de dos, mais ils se reconnaissent aisément et personne n’est intervenu pour les empêcher de communier. Scandale, sacrilège ou peut-être seulement opportunisme politique?
Les commentaires sur les réseaux sociaux ont été bon train, le plus « doux » serait celui-ci : « Legaliza el aborto y comulga siendo divorciado vuelto a ‘casar’. Que vergüenza el Vaticano » (Il légalise l’avortement et il communie malgré le fait qu’il soit divorcé et vit en concubinage. Quelle honte le Vatican !)
Ce qui est certain, c’est que contrairement à l’accueil réservé à Macri (les chroniques mirent alors précisément l’accent sur la froideur de la rencontre), ici l’amitié avec le gouvernement péroniste est soulignée. Fernandez peut donc dire qu’il a gagné plus qu’une neutralité de la part des Sacrés Palais, une véritable assistance. A dépenser immédiatement, par exemple le 1er mars, lorsqu’il enverra un projet de dépénalisation de l’avortement au Congrès argentin. Le dernier assaut vorace, puis aussi pour l’Argentine le meurtre d’enfants deviendra un droit. Après tout, pour un objectif comme celui-ci, un petit voyage à Rome vaut bien une messe. Péroniste ou non, du Caudillo, Fernandez a décidément appris la capacité d’utiliser la religion à ses fins. Mais cette fois, l’Église laisse faire. » (Traduction Francesca de Villasmundo)
Mais faut-il vraiment s‘étonner de la position ambiguë du Vatican sur cette question de l’avortement et de la communion aux divorcés remariés civilement ? L’Église conciliaire, depuis bien avant François, surfe sur l’ambiguïté doctrinale en tout domaine, le pape argentin, les temps et les esprits étant mûrs pour cela, ne faisant que déporter cette ambiguïté, caractéristique principale du concile Vatican II, sur les questions morales !
Francesca de Villasmundo
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